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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 5. Pér. 12.1925

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Nr. 2
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Demonts, Louis: Deux peintres de la première moitié du XVIIe siècle: Jacques Blanchard et Charles-Alphonse Dufresnoy
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https://doi.org/10.11588/diglit.24946#0192

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

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mais si rond, si tendre, Si délicat, l’air de la tète est si enfantin, ses yeux si
doux et si riants, sa chair si blanche... » Et Sauvai conclut : « La passion de
Blanchard fut l’amour ». Regarder le Cimon, c'est conclure do même.

Où s’est donc formé l’art de ce peintre ? La clef du mystère est là. Ce n’est
pas à Bologne, ce n’est pas à Rome : c’est à Venise. Est-ce dans la Venise du
Titien? On a appelé Blanchard le Titien français; mais, comme beaucoup
de surnoms, celui-ci est mal donné. Sans doute Blanchard a-t-il regardé les
œuvres du Titien, de Tintoret, de Véronèse ; le point de départ du Cimon
semble bien être, d’ailleurs, dans le tableau du Titien, Diane et Açiéon, de
Bridgewater-House. Mais il a surtout fréquenté ses contemporains. C’était
en 1626, en 1627. Jan Lys, l’ancien «suivant» du Garavage, produisait les
œuvres étonnantes de sa dernière période, qu’étudiait il y a quelques années
le regretté Rudolf Oldenbourg, ces œuvres véritablement anachroniques, comme
dit si bien cet auteur, et qui semblent presque contemporaines de Piazzetta1.
De quelles influences était faite celte façon nouvelle ? Car à cette époque
et en dehors du tempérament particulier des artistes, il faut toujours
envisager le problème de l’action qu’eut chacun sur chacun ; c’est à chaque
fois un dosage délicat à exécuter. Ce mélange des influences n’était pas alors
seulement un effet du hasard, mais le résultat d’une théorie ; ce le fut dès
les Carrache ; déjà le Parmesan avait composé son style de Raphaël, de
Michel-Ange et du Corrège. Domenico Fcti venait (ou Fetti) de mourir à
Venise même en 1624, et l’importance de ce maître commence à peine à se
montrer à nous. Il y a là, avec Bernardo Strozzi, tout un groupe d’artistes,
qui, jusqu’à ces derniers temps, n’avait pas été assez mis en lumière. Feti
était parti de l’art du Cigoli, avait imité le Garavage, écouté Elsheimer, tra-
vaillé à Mantoue, et s’était joint, à Venise, aux recherches de Lys. Strozzi,
descendant du Baroche par Salimbeni, et du Corrège par Cambiaso, étudia
Rubens à Gènes, puis imita le Garavage, et se fit ainsi une manière toute
neuve2.

Un Vénitien rubénien1, corrégien, barochiste, appartenant à cet étrange

1. Cf. Rudolf Oldenbourg: Jahrbuch der Preuss. Kunstsammlungen, p. 136-167,
et Jan Lys, Biblioteca d’Arte illustrata, Rome. Voir notamment, le Satyre et le
Paysan de la collection Widener et la Toilette de Vénus aux Offices.

2. Sur Feti, voir Jahrbuch der K. preussischen Kunstsammlungen x,\xv, 150,
156, 158. — Endres-Soltmann, dans le Künstlerlexicon de Thieme et Becker. —
R. Oldenbourg, Domenico Feti, Biblioteca d’Arte illustrata, Rome. — Sur Strozzi,
voir Giuseppe Fiocco, Bernardo Strozzi, Biblioteca d’Arte illustrata, Rome. — Ludo-
vico Cardi da Cigoli, dans sa dernière manière, telle qu’on peut l’étudier à la Galerie
du Capitole à Rome, en examinant l’ancienne décoration du casino du Cardinal
Scipion Borghèse, peinte en 1610-1612, et représentant VHistoire de Psyché, nous
parait avoir eu sur Blanchard, durant son séjour à Rome (1624-1625), une directe
 
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