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N° 9.

15 Mai 1881.

Vingt-troisième Année.

JOURNAL DES BEAUX-ARTS

ET DE LA LITTÉRATURE. ï} ■

DIRECTEUR : M. Ad. SIRET. paraissant deux fois par mois. ADMINISTRATION et CORRESPONDANCE

membre de l'académie roy. de Belgique, etc. PRIX PAR AN : BELGIQUE : q. FRANCS. a s'-nicolas (Belgique).

étranger : 12 fr.

SOMMAIRE. Belgique : Salon des aquarellistes.
— Concours de l'Académie d'Anvers. — Lettre
de M. Van den Bussche. — Notes d'un observa-
teur.— Le costume historique.— France : Salon
de Paris. — Nécrologie. — Correspondance. —
Chronique générale.—■ Cabinet de la curiosité.—
Dictionnaire des peintres. — Annonces.

Belgique.

LE SALON DES AQUARELLISTES.
2ime exposition.

L'aquarelle aussi s'en va. Elle est rempla-
cée par je ne sais quelle trituration qui vise
a une sorte de peinture à l'huile ou à l'eau
d'oeuf, comme le procédé ancien, sorte de
gouache lourde et empesée qui n'a ni esprit,
ni finesse, ni spontanéité surtout. Cela rap-
pelle ces eaux-fortes relevées de burin et de
pointe sèche et qui n'ont plus le moindre
ragoût. Ah ! mon cher Directeur, il m'a pris
une grande tristesse en entrant l'autre jour
dans ce salon d'exposition ; rien ne vous
attire, rien ne vous charme, rien ne vous
passionne. L'examen des morceaux exposés
a fait pis encore et me voilà tombé dans une
désolation que partageait M. X"*, un des
amateurs hollandais les plus enthousiastes
du genre aquarelle ou du moins qu'on appe-
lait ainsi autrefois.

N'attendez pas de moi une analyse bien
détaillée ; ma mauvaise humeur s'est au-
gmentée de celle de mon compagnon qui,
ayant demandé au bureau le prix d'une quasi
aquarelle que jadis on eut payée 200 francs
au maximum, a reçu pour réponse, à voix
basse, comme si le révélateur commettait
quelque chose de honteux, ceci : au plus bas
prix deux mille francs. — Il faut le dire bien
haut : si messieurs les artistes se mettent sur
le pied de gâter la position, qui n'est déjà
Pas trop belle par la mise à prix impossible
de leurs travaux, les choses iront de mal en
Pis- Si l'argent a diminué de valeur, si tous
les objets de consommation augmentent de
Prix, c'est une raison de plus pour diminuer
le taux des objets d'art qui sont du luxe; on
n en vendra que plus. J'ignore ce qui se
Passe au salon des aquarellistes, mais je suis
assuré que la vente n'y doit pas être produc-
tive ou bien les prix renseignés sont faux. Ce
lui est une autre maladresse. J'estime que le
Procédé de marchandage usité en pareil cas
est un manque de dignité. Si on accusait le
Prix réel je crois que tout le monde y gagne-
rait. .

Les italiens aussi sont fortement sophisti-
qués. Je ne retrouve plus chez eux ce brio
superbe d'il y a trois ans et cette spontanéité
dallures, qui avait bien aussi ses défauts
^aisqui démontrait un sens vraiment artis-

tique. Quoiqu'il en soit, ils ont encore la
palme aujourd'hui et il faut citer, avec des
éloges parfois restrictifs, les noms et les œu-
vres de MM. Jpris (le Cardinal et F Arc de
Titus), Bartolini (Intérieur arabe), Binagmi
(Bonjour), Cabianca (Paysages), Cipriani
(Vieille femme, Arabe, la Confession), De
Dominicis (Moine capucin) et Vianelli (Der-
rière les coulisses). Il y a dans tout cela
beaucoup d'observation et d'esprit mais le
plus souvent ces qualités sont gâtées par une
recherche de pratique et de procédé qui
diminue considérablement le charme de
l'œuvre.

Nos Belges ne sont pas en veine cette fois-
ci ; quelques valeureux sauvent la situation et
encore les meilleurs de jadis sont les médio-
cres d'aujourd'hui, si pas tous du moins une
bonne partie. M. Stacquet finira par exposer
un papier blanc qui portera pour titre : pay-
sage, et qui sera une petite goutte d'eau dans
laquelle sera tombée une petite mouche.
M. Uyterschaut marche dans le même sen-
tier. M. Al. Hubert, toujours très supérieur
comme dessin et intention, ne s'affirme pas
comme coloriste. M. Hermans a la corde :
Après le bain est un des meilleurs morceaux
du salon et des plus vrais. M. Van Camp est
toujours superficiel et ne creuse pas son tra-
vail. C'est dommage, il y a dans ce talent
quelque chose qui ne veut ou qui ne peut
pas sortir. Le Souvenir de la fête patriotique
de 1880 a certes de l'aspect et de F entrain,
mais c'est heurté et un tantinet chargé. Mes-
sieurs Oyens sont cette année véritablement
mauvais;'ni goût,ni esprit,ni science.M.Meu-
nier gagne en force et ses sujets peu préten-
tieux lui vont bien. M. Mellery est original
et très étudié mais très excentrique dans sa
Convoitise, ses Fiancés et le Violon, peut-être
même un peu trop. Ses Brasseurs forment
un dessin de grande allure Ses modèles sont
pris sur le fait et le genre dans lequel ils
sont travaillés est plus sympathique que le
procédé bizarre employé pour rendre les
Fiancés de Marcken. Les frères De Vriendt
ont exposé des études sommaires faites à
Jérusalem et aux environs. Ce sont évidem-
ment des souvenirs qui ont pour objet de
rappeler les lignes de ces paysages sacrés,
mais le cachet de la couleur locale n'y est
pas en tant qu'accentuation et intensité. On
a revu avec plaisir le Philippe le-beau d'Al-
bert très puissamment reproduit dans une
aquarelle pleine d'éclat. M. L. Becker est
très amusant et très spirituel dans ses deux
Têtes de chien . terriblement gouachées.
M. Pecquereau est toujours très adroit et
très fort, ainsi que M. Dell'acqua qui joint à
une grande habileté une coloration toujours
brillante et énergique. M. Roelofs est un
praticien consommé avec un inépuisable
fond de poésie. Ses Pies et ses Fermes sont

de sérieuses productions au maintien solide
et magistral. Je n'aime point son Chemin de
village trop vert ; je suis convaincu qu'il l'a
vu ainsi mais il ne laut pas toujours peindre
ce que l'on voit. Les Lessiveuses de Kathelin
sont une vraie aquarelle d'un ragoût léger et
naturel : je dirai aussi tout le bien que je
pense des aquarelles de Claus, c'est frais et
reposant. L'art ainsi compris est un art ai-
mable, or l'aquarelle ne doit être que cela.
De Beckman est un virtuose qui se complaît
dans les harmonies de la couleur. Les cinq
aquarelles qu'il expose ont des qualités d'exé-
cution peu communes, le Tombeau de Ma-
homet surtout est une des meilleures choses
du salon. MM. Charette, Francia, De Mol,
Mme de Salles née Stroobant, Gabriel, De
Famar-Testas, Bon Goethals, Hennebicq,
Hoeterickx, Ligny, Lanneau, Mois, Puttaert,
Mme Ronner, Van der Hecht, VanSeben sont
encore à citer. Je voudrais m'étendre davan-
tage sur leurs travaux si vous aviez la place
nécessaire. Passons prudemment sur ceux
de nos compatriotes pour lesquels le silence
sera de l'indulgence pure.

Parmi les étrangers j'ai déjà nommé les
Italiens, arrivons aux autres, à MeIIe Mon-
talba dont trois paysages un peu pâlots sont
cependant d'un charme exquis. C'est une
nature d'artiste remarquablement douée et
je doute qu'on puisse lui opposer une rivale,
pas même la Bne de Rotschild dont le tem-
pérament est tout autre et dont les travaux
confinent à la peinture à l'huile. Avant la
procession, de Llovera, est une scène es-
pagnole d'une allure endiablée et d'une fac-
ture enlevée haut la main. Dans les Anglais,
notons Toovey, toujours magistral dans ses
vues ; les Hollandais n'ont rien envoyé d'ex-
traordinaire : Rochussen est toujours intéres-
sant au possible : sa Vie et mort d'un pirate
forme une collection de huit dessins très
caractéristiques; son monde, qui s'agite tou-
jours dans une atmosphère un peu sombre,
est animé, aisé, souple, délicat et fin de con-
tours. Il est véritablement l'illustrateur de
l'histoire, nul ne sait comme lui remuer la
vie de la guerre. Mesdag a fait grand mais
moins juste que d'ordinaire. Mauve est tou-
jours délicat et mélancolique. Signalons en-
core Stortenbeker, Maris, Roosenboom (Me|le),
Ten Kate, Ter Meulen, Valckenburg, de
Ranitz, Van Borselen, Van de Sande-Bac-
kuysen, Van Trigt, Verveer, Van der Waay,
Vogel, Weissenburch et Wittkamp. Dans les
Français, il n'y a que la Bne de Rotschild
dont j'ai déjà caractérisé l'heureux talent et
parmi les Allemands je ne rencontre que
Skarbina avec une Grande dame très déplai-
sante et une Petite dame aussi aimable, aussi
charmante que sa voisine l'est peu.
 
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