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N° 24.

31 Décembre 1881.

Vingt-troisième Année.

JOURNAL DES BEAUX-ARTS

ET DE LA LITTÉRATURE.

directeur : m. Ad. siret.

MEMBRE DE l'aCADEMIE ROY. DE BELGIQUE, ETC.

SOMMAIRE : Beaux-Arts. Mort de J. Van de
Kerkhove. — Exposition d'art français au Cercle
artistique de Bruxelles. — Charles Clément. Cor-
resp. particulière. — Courrier du Nord : Art
religieux à Munich. Rideau du théâtre de Ham-
bourg. — Livres de Luxe : l'art ancien ; la céra-
mique japonaise; les précurseurs de la renais-
sance. Littérature : Le mort de Camille
Lemonnier. — Sonnets. — Chronique générale.

Table des matières. — Cabinet de la curiosité.
Annonces.

Beaux-Arts.

H y a quelques jours a eu lieu
à Schaerbeeck,rue Brichaut, l'é-
pilogue du long et navrant épi-
sode Frédéric Van de Kerkhove.
Le père, frappé au cœur des
doutes émis sur sa bonne foi,
épouvanté en quelque sorte du
cynisme avec lequel on a refusé
d'accepter les preuves de sa g
loyauté, dégoûté de ceux même, j
et surtout de ceux-là, qui après S
lui être venus en aide, ont §
gardé un silence... prudent, le I
père qu'ils ont tué, est allé re- 1
joindre le pauvre enfant qu'ils
ont nié. Jean Van de Kerkhove
est mort âgé à peine de 5g ans.
Depuis plusieurs années le cha-
grin l'avait envahi ; il est mort de
douleur dans les bras aimés qui
ont bercé et enseveli Fritz. De-
vant cette victime des haines les 1
plus inavouables, notre amitié et
notre dévouement n'ont pas failli
un seul instant pendant sa vie;
nous les conserverons à sa mé-
moire jusqu'à notre dernière
heure. Adolphe Siret.

EXPOSITION D'ART FRANÇAIS
au Cercle Artistique et Littéraire
de Bruxelles.

Cette exhibition a ceci d'excellent : Elle
nous fait revenir d'une opinion fausse.

PARAISSANT DEUX FOIS PAR MOIS.

prix par an : belgique : 9 francs.

ÉTRANGER : 12 FR.

A nos expositions triennales, la France
nous envoie ses meilleures toiles et nous
admirons, battant des mains.

Au Cercle, à part quelques maîtres, ce sont
des artistes de valeur courante, qui exposent.
Laissons pour un instant Millet, Stevens,
Vollon et Détaille à l'écart. Que reste-t-il,
sinon un ramassis de tableaux médiocres ?

Une Titania avec des yeux de verre, une peau
invraisemblable, une couronne en feuilles de
papier ; deux paysages de Galofre, irritants de
couleur, kaleidoscopiques, peuplés d'enfants
si maigres de bras, qu'on croirait voir une
scène de famine aux Indes; une jeune fille de
Beyle, toute en sucre coloré, péchant avec un
parasol, des fleurs en crème au ras de l'eau,
puis un peu plus loin, cette même jeune fille
travestie en paysanne coquette, à la Jules
Breton, regardant l'horizon toute rêveuse, en
regrettant sans doute, les beaux jours où elle
portait sa robe en sucre polycrômé. Et la
Soirée et High-life de Jean Beraud ! Et YIdylle
de Schennis! Et les ciels papil lottants de Scott !
Et les pastels de Gonzalès ! Et les bords de la
Loue d'Ordinaire! ... Pitié! la litanie serait
trop longue !

Mais voici du bon.

Détaille croque un Higlander, sec comme
un faisceau d'allumettes, mais bien campé,
Dantan signe une excellente aquarelle, Vollon
sert un appétissant melon sur une assiette
superbe. Par contre, ses pêches, ne valent
pas un sou la pièce. Stevens, toujours habile,
nous réédite une de ses parisiennes allangies,
morbides, le visage déplâtré de son fard, les
yeux usés. On l'aime quand même.

Vient Millet, lui, l'artiste simple, fort, péné-
trant. Son aquarelle et son pastel détonnent
dans cet ensemble de tableaux maniérés, com-
pliqués, aux effets cherchés et extravagants.
Son paysan accroupi est admirable. Sa gar-
deuse de moutons debout contre un arbre,
avec son troupeau devant elle, et le ciel clair
derrière, fait rêver à quelque paysage primitif
d'Homère ou de la Bible.

Impression finale : Quelques mets succulents
servis sur une table, où traînent partout à côté
de chaque assiette, des croûtes, des croûtes,
des croûtes ! E. V.

M. CHARLES CLÉMENT.

Avril a des roses, mais décembre a des li-
vres. Que de livres rares et charmants ont vu
le jour depuis un mois! Les biographes sont
souvent embarrassés pour dire la date précise
de la naissance de leurs modèles : les biblio-
philes sont plus heureux. La date d eclosion
d'un beau livre est à chercher invariablement
en décembre.

C'est hier, en effet que Pion nous apportait
ce merveilleux ouvrage de Victor Guérin, la
Terre Sainte. Hier, Quantin publiait le Van-

administration et correspondance

a s'-nicolas (belgique).

Dyck de notre confrère Jules Guiffrey. Le lec-
teur se souvient que nous avons annoncé ici
même ce livre conciencieux. Chez le même
éditeur a paru un maître livre Albert Durer
et ses dessins par M. Ephrussi, Nous avons
sous les yeux ce travail de critique et d'his-
toire : nous pouvons dire sa valeur. Le maître
Allemand qui eut une si grande influence,
même en Italie, ce qui est rare, a reçu de la
main de M. Ephrussi un hommage dont la
portée ne doit poi:;t passer inaperçue.

Mais ce n'est pas Albert Durer qui sera le
sujet de cette lettre. Un autre livre appelle
notre critique. Michel-Ange, Léonard de Vinci,
Raphaël, par M. Charles Clément vient d'être
édité avec luxe par Hetzel. A l'inverse des
ouvrages sérieux que, d'ordinaire on réédite
en format populaire lorsque la vogue des pre-
mières années va décroissant, Michel-Ange
Léonard de Vinci, Raphaël publié d'abord
sans gravures reparaît illustré de cent soixante
sept dessins. Les grands maîtres dont M. Clé-
ment s'est fait l'historien ne méritaient pas
moins, mais si le texte sérieux de l'écrivain
d'art n'avait de longue date assuré le succès
de ces dieux de la Renaissance, Hetzel ne se
fut pas risqué ù offrir au public un livre déjà
connu.

Après tout, les belles oeuvres ne vieillissent
pas, et M. Charles Clément avec sa plume
alerté et savante a tracé trois portraits dont
le groupe satisfait l'esprit. D'autres écrivent
des in-folios sur un maître. Je les pourrais
nommer. Que prouvent-ils souvent V De la
patience. Mais résumer sans restreindre, taire
sans abréger, juger sobrement et avec goût,
tel est le suprême mérite du critique.

Nous ne suivrons pas M. Charles Clément
dans ses recherches biographiques; il apporte
à rectifier ou à compléter ses devanciers le
soin d'un érudit. Ce qui nous frappe davan-
tage chez l'historien et ce qu'il faut relever,
c'est le tact de sa composition. Cent cinquante
pages lui suffisent pour peindre Michel-Ange,
et, je vous le jure, c'est un portrait en pieds
que nous donne le peintre. Non seulement il
suit son modèle dans les phases multiples de
sa vie, non-seulement il traite de tous ses
ouvrages dont il discute la date ou le mérite,
mais d'un pinceau léger et rompu aux nuan-
ces, il laisse de l'homme intime cette sil-
houette délicate :

« De mœurs pures dès sa jeunesse, Michel-
Ange était tout à son art... 11 avait toutes ses
habitudes dans le monde de la pensée. Que
pouvait-il attendre de l'amour ? Moins que
rien, ou un continuel orage... Pris dans leur
caractère exceptionnel, de pareils hommes
sont sublimes...

« A sa manière, Michel-Ange devait pour-
tant aimer. C'est l'affection d'une femme et
le souvenir passionné qu'il en garda jusqu'à
sa plus extrême vieillesse qui remplit et qui
 
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