Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Revue égyptologique — 6.1891

DOI Heft:
Nr. 2
DOI Artikel:
Revillout, Eugène: Leçon d'ouverture: prononcée à l'École du Louvre, le lundi, 19 décembre 1887, [2]
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.11061#0106

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
92

Eugène Revillout.

C'est une singulière destinée que celle de l'homme, et 1 on peut admirer ici la justesse
de ce dire d'un ancien : Sunt lacrymae rerum.

Au moment même où M. de Ronchaud éprouvait les premiers symptômes, inaperçus
par lui, de la maladie qui devait l'emporter, — pendant l'automne de 1886, dans le Jura, — il
se sentait tourmenté de la soif insatiable et inexpliquée d'une paix en quelque sorte surnatu-
relle. Le poëte, le votes antique était quelque peu un voyant, un prophète. M. de Ronchaud
était poëte, et, amoureux des anciens, qu'il connaissait à merveille et dont il sentait profon-
dément toutes les beautés, il l'était à la façon des anciens. Aussi ne faut-il pas trop s'étonner
si ses vers étaient inspirés plus par les Muses du Parnasse que par celles de nos salons.
Les Muses devaient être liées avec les Parques : et, dans des rêves prophétiques, elles lui
auront dit son destin.

Ce qui est certain c'est que, d'après les récits qu'il nous a faits lui-même, il se sentait
alors saisi par une sorte d'inspiration mystérieuse :

«Si jamais j'ai été poëte, c'est à ce moment. Quand je commençai à écrire, je ne
» savais où j'allais. Je me voyais poussé vers une direction dont j'ignorais le terme. J'errais
»dans nos belles montagnes, comme celui dont j'ai écrit l'histoire, en me parlant tout bas;
» et lorsque je prenais la plume, il me semblait qu'un autre parlait en moi. Je ne cherchais
»ni un mot ni une rime : tout coulait de source, sans que j'eusse à faire une rature. Je ne
» m'étonne pas que cette pièce vous ait frappé, comme vous le dites. Cela ne pouvait être
» que très bon ou détestable : ce que j'ai fait de meilleur ou ce que j'ai fait de pire. Ce
» n'était inspiré par rien d'extérieur. Mon génie familier, l'âme de mon âme me guidait
» seulement. »

La voix venait d'au delà de la terre et l'appelait vers cet inconnu qu'on nomme tan-
tôt idéal, tantôt utopie, mais qui nous poursuivra toujours. Divine syrène, elle entraînait
M. de Ronchaud aux abîmes et lui faisait prononcer, à lui aussi, son chant du cygne.

Cette pièce intitulée «la paix», malheureusement encastrée, sous le titre général «poëmes
de la mort», au milieu de pièces plus anciennes et qui ne la valent pas, est véritablement
admirable.

Messieurs, je voudrais pouvoir vous parler d'autre chose. Je voudrais vous dire au
moins quels seront les sujets traités par moi cette année dans mes trois cours.
Ces sujets seront multiples.

En démotique nous continuerons l'étude des inscriptions historiques de Nubie. Et d'abord
nous aurons à vous faire part d'une assez intéressante découverte. Il s'agit d'un document
de Dakké, nous donnant, d'un côté, le nom de la langue des célèbres Blemmyes, et, d'un
autre côté, l'indication d'une stèle bilingue tout à fait capitale pour l'interprétation des textes
de cette langue (jusqu'ici appelés méroïtiques), textes dont on ne possédait point encore la
clef. C'est donc à une nouvelle pierre de Rosette que nous avons affaire — devant ouvrir,
comme la première, un nouveau champ d'exploration à la science — et puisque nous savons
parfaitement où elle a été placée et que les ruines de cette région subsistent encore, il faut
espérer que l'un de mes deux derniers élèves diplômés, M. Bénédite, envoyé à Philée, de
commun accord, par M. Maspero et par moi, mettra bientôt la main dessus. L'éminent
directeur des Musées Nationaux et de l'École du Louvre, M. KiEMPFEN, lui a donné sur ma
 
Annotationen