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Ménard, E.: Les ouvrages de peinture, sculpture et gravure exposés au Champ de Mars, [3]
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L’ART.
a l’air inintelligent et est, en outre, aussi mal bâti que possible; que la coiffure, à la dernière
mode moderne, de ces femmes soi-disant antiques, est de l’effet le plus étrange ; que l’homme
aux jambes couvertes de knickerbockers est ridicule, que son index et son pouce dépassent toutes
les limites de la fantaisie ; que le jeune homme, près de la femme assise à gauche, a les genoux
affreusement emmanchés ; que la femme qui offre une fleur est un simple échalas ; bref, je vous
abandonne les figures; elles n’existent à aucun titre artistique; mais voyez le paysage! Quelle
beauté de lignes ! Quel style ! » Il eût continué de la sorte, si je n’avais eu l’irrévérence de lui
objecter que telle branche est plus que colossale, que de proportions il n’y a pas trace et que
l’architecture n’est autre qu’un maladroit emprunt au Parc Monceau. C’est un très galant homme ;
il se le tint pour dit.
M. Cazin a peint trois pauvres tableaux : les Voyageurs, Un Soir, l’Eté, vides, veules,
cotonneux à l’excès, et un quatrième tout à fait excellent : Moisson ; le terrain est superbe. Les
six cadres de M. Carrière ne sont que fumisterie pure; ce ne sont que des dessous, des frottis
à la suie de cheminée ; cela n’acquerra de valeur que lorsqu’on aura peint dessus — avec talent.
M. Carolus Duran s’est manifesté sept fois, dont une sous les espèces d’une cul-de-jatte vue de
Dunkerque. — L’entrée du port.
Dessin d’Eugène Boudin, d’après son tableau appartenant à M,n° la baronne Nathaniel de Rothschild, exposé au Champ de Mars.
dos, — un dos plat comme la paume de la main, — et qu’il a baptisée Lélia. Si ce peintre
s’était borné à envoyer le portrait de dame âgée, vêtue de noir, et le portrait, •— également en
buste, — d’un homme en jaquette bleue, d’un ton heureux, il eût, bien que les deux visages
soient dans un fâcheux état de transpiration, il eût, dis-je, encore réussi à donner le change à
certains égards ; mais quelle illusion serait-il possible de conserver sur son art, lorsqu on voit
Mme *** — n° 183 — transformée en une coulée de rouge criard, exhiber des bras qui ne
tiennent pas, des bras plats que troue une fossette malencontreuse, et une poitrine non moins
plate ; lorsque la Princesse de *** — n° 177 — éteint de fort jolies tonalités par d’incroyables
absences de distinction, dont le spécimen le plus accompli est le pan d’étoffe retenu tant bien
que mal sur le bras gauche, etc. Le Portrait de Mme *** — n° 178 — s’arrange bien; l’éventail
en plumes est rendu à souhait. C’est tout. Le modèle ne vit pas, on n’y sent pas un muscle.
Quant à Mlle S*** — n° 179 — elle a le haut du bras gauche formidable; le faire est tantôt rond,
tantôt plat, et le fond de la toile ressemble à un rideau balayé par le vent. M. Béraud, qui
s annonçait observateur spirituel et distingué, s’égare de la plus affligeante façon. Les jambes de
son Arlequine n’appartiennent à aucun être en chair et en os; son Portrait de M. TL... n’est
pas d’un peintre; les lumières accrochées sur la canne et la chaîne sont irritantes au possible;
une Etude de femme vêtue de sa nudité et d’un voile noir relève de la porcelaine ; Monte-
L’ART.
a l’air inintelligent et est, en outre, aussi mal bâti que possible; que la coiffure, à la dernière
mode moderne, de ces femmes soi-disant antiques, est de l’effet le plus étrange ; que l’homme
aux jambes couvertes de knickerbockers est ridicule, que son index et son pouce dépassent toutes
les limites de la fantaisie ; que le jeune homme, près de la femme assise à gauche, a les genoux
affreusement emmanchés ; que la femme qui offre une fleur est un simple échalas ; bref, je vous
abandonne les figures; elles n’existent à aucun titre artistique; mais voyez le paysage! Quelle
beauté de lignes ! Quel style ! » Il eût continué de la sorte, si je n’avais eu l’irrévérence de lui
objecter que telle branche est plus que colossale, que de proportions il n’y a pas trace et que
l’architecture n’est autre qu’un maladroit emprunt au Parc Monceau. C’est un très galant homme ;
il se le tint pour dit.
M. Cazin a peint trois pauvres tableaux : les Voyageurs, Un Soir, l’Eté, vides, veules,
cotonneux à l’excès, et un quatrième tout à fait excellent : Moisson ; le terrain est superbe. Les
six cadres de M. Carrière ne sont que fumisterie pure; ce ne sont que des dessous, des frottis
à la suie de cheminée ; cela n’acquerra de valeur que lorsqu’on aura peint dessus — avec talent.
M. Carolus Duran s’est manifesté sept fois, dont une sous les espèces d’une cul-de-jatte vue de
Dunkerque. — L’entrée du port.
Dessin d’Eugène Boudin, d’après son tableau appartenant à M,n° la baronne Nathaniel de Rothschild, exposé au Champ de Mars.
dos, — un dos plat comme la paume de la main, — et qu’il a baptisée Lélia. Si ce peintre
s’était borné à envoyer le portrait de dame âgée, vêtue de noir, et le portrait, •— également en
buste, — d’un homme en jaquette bleue, d’un ton heureux, il eût, bien que les deux visages
soient dans un fâcheux état de transpiration, il eût, dis-je, encore réussi à donner le change à
certains égards ; mais quelle illusion serait-il possible de conserver sur son art, lorsqu on voit
Mme *** — n° 183 — transformée en une coulée de rouge criard, exhiber des bras qui ne
tiennent pas, des bras plats que troue une fossette malencontreuse, et une poitrine non moins
plate ; lorsque la Princesse de *** — n° 177 — éteint de fort jolies tonalités par d’incroyables
absences de distinction, dont le spécimen le plus accompli est le pan d’étoffe retenu tant bien
que mal sur le bras gauche, etc. Le Portrait de Mme *** — n° 178 — s’arrange bien; l’éventail
en plumes est rendu à souhait. C’est tout. Le modèle ne vit pas, on n’y sent pas un muscle.
Quant à Mlle S*** — n° 179 — elle a le haut du bras gauche formidable; le faire est tantôt rond,
tantôt plat, et le fond de la toile ressemble à un rideau balayé par le vent. M. Béraud, qui
s annonçait observateur spirituel et distingué, s’égare de la plus affligeante façon. Les jambes de
son Arlequine n’appartiennent à aucun être en chair et en os; son Portrait de M. TL... n’est
pas d’un peintre; les lumières accrochées sur la canne et la chaîne sont irritantes au possible;
une Etude de femme vêtue de sa nudité et d’un voile noir relève de la porcelaine ; Monte-