LES ARMES EUROPEENNES ANCIENNES.
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pièce très rare qui protégeait la nuque; quelques armets à
méçails grimaçants, à M. Riggs; quelques autres à canne-
lures maximiliennes, au comte d’Arlincourt, entamerons-
nous le xvie siècle.
Ce siècle est le triomphe de cette coiffure ; les plus
célèbres orfèvres ont ciselé des armets; toutes les mer-
veilles de gravure, de damasquinure, d’incrustations que
nous avons rencontrées sur les armures de corps sont
répétées sur l’ajustement de tête et cet ajustement, la plu-
part du temps, est un armet, au moins pendant tout le
règne de François 1er; aussi n’avons-nous que l’embarras
du choix entre un armet de la famille de la Trémoïlle, à
entrelacs, avec la devise: Spes mea dat vires ; un autre,
au roi Philippe II; un troisième en fer bruni gravé et
doré, au duc d’Albe, avec son chiffre : A. F. T. liés, Fer-
nand Alvarez de Toledo (vitrine 57) ; un autre en fer doré,
décoré de palmes, couronnes et foudres, de même facture
qu’une armure de l’Armeria de,Turin et qu’un brassard et
un plastron de la collection Spitzer (vitrine 57) ; un cin-
quième en fer damasquiné d’or et d’argent, portant l’aigle
d’empire et ayant appartenu à Ferdinand V, duc deTyrol,
plus tard Ferdinand II d’Allemagne ( 1 578 j 1637), prove-
nant de la collection d’Ambras, de Vienne; un dernier, du
début du xviie siècle, en fer repoussé, à rinceaux, masca-
rons et fleurs de lis d’or rapportées, avec couronne royale
et branches de laurier, de tous points identique à l’armure
de Louis XIII, du Musée d’artillerie; toutes ces pièces à
M. Riggs.
La Renaissance, ce retour aux traditions antiques, n’a
pas exercé son influence seulement sur la décoration des
armures; elle a remis en faveur les formes grecques et
romaines. Nous avons cité plus haut une celata vene\iana,
nous avons maintenant à signaler différents casques, dits
à l’antique, usités surtout en Italie dans les cérémonies
officielles et renouvelés de la galea des centurions de la
période impériale.
Tels sont : un casque plaqué d’argent avec branchages
en relief, de la famille Visconti; un autre figurant une tête
de dauphin, à M. Riggs; un en bronze à grotesques se
rapprochant un peu de la forme bourguignotte, n° 674,
collection Weber; un dernier, n° 658 bis, à M. Spitzer, en
fer repoussé et noirci, orné sur la bombe de deux figures
d’enfants et passant pour avoir appartenu à André Doria,
le célèbre amiral (1468-1560).
Comme coiffures de parement, la fin du xvie siècle
vit naître également le cabasset employé déjà auparavant
en temps de guerre; nous en avons signalé deux précé-
demment, d’une grande richesse, en voici encore un en
fer peint, décoré d’un lion de Saint-Marc (vitr. 56, collec-
tion Riggs).
Il y avait de même des morions de luxe comme le
n° 65g de la collection Spitzer, présentant un combat de
cavaliers, en fer repoussé et noirci, ou le n° 187 de la
collection Dupasquier, à entrelacs et médaillons sur fond
doré.
Ces deux dernières sortes de coiffure ont fait les beaux
jours des guerres de religion : quiconque a entendu les
Huguenots à l’Opéra les connaît de vue, s’il en ignore le
nom. M. Riggs a prêté justement quelques morions à la
fleur de lis de la garde suisse sous Henri III et Henri IV,
qui semblent n’attendre que la tête d’un Saint-Bris ou d’un
Nevers.
Mais en voilà bien long sur ce sujet : encore une bour-
guignotte italienne du xvie siècle, à grotesques et figures
de fleuves (n° 5 2, collection Riggs), transformation de la
salade, qui fut la dernière coiffure défensive de guerre des
gentilshommes au xvne siècle; une autre très remarquable
à M. Riggs aussi, avec une crête à cartouches et hippo-
Tome XLIX.
campes merveilleusement ciselés sur fond doré, provenant
d’une armure de l’Armeria de Madrid; une autre, à
M. Spitzer, avec trophées d’armes et combats de cavaliers
sur la crête; quelques pots en tête des troupes du génie du
temps de Louis XIV, quelques casques bizarres à ailettes
de l’unique régiment de cuirassiers de ce règne (collection
Riggs), analogues à ceux du Musée d’artillerie, et passons
aux armes offensives :
Jusqu’aux progrès des armes à feu survenus à la fin du
xvie siècle, et cause de l’abandon des armures de guerre
devenues trop épaisses et trop pesantes, les tournois étant
tombés en désuétude dès la mort de Henri II, il y a infé-
riorité flagrante de l’attaque sur la défense, artillerie à part
bien entendu : un gentilhomme du xve siècle et même du
xvie, armé de pied en cap, sans parcimonie, chez le bon
faiseur, et solidement campé sur un cheval aux jarrets
sûrs, pouvait aller de bon cœur au combat; il avait neuf
chances sur dix de s’en tirer sans une égratignure, hormis
le cas de mort de sa monture; tout le monde sait l’histoire
de Bayard au pont du Garigliano. Aussi ne parvenait-on
pas aux jolis bilans de notre fin de siècle où, en moins de
quarante ans, la terre a été nettoyée de plus de deux mil-
lions d’hommes par le seul moyen des batailles. Le combat
des Trente en 135 1 est l’exception, et il fut livré antérieu-
rement aux perfectionnements du harnais de guerre; la
règle se rapprochait plutôt de cette journée fameuse où
les armées de deux républiques italiennes du xve siècle,
luttant depuis le matin, arrivèrent au soir au total d’un
mort; encore était-ce d’une chute de cheval!
Il y a une telle abondance d’épées à l’Exposition que
nous pouvons seulement nous arrêter sur une faible partie
d’entre elles, nous contentant de passer rapidement sur
les autres. M. Riggs a envoyé (vitrine 56) quatre épées du
xve siècle, dont deux à quillons chantournés, deux à
quillons renversés, montrant encore dans toute sa simpli-
cité le branc des poètes, type usité depuis les Croisades.
Du xvie siècle, M. Spitzer a prêté une épée à poignée
française en fer ciselé partiellement doré et à lame de
Solingen, provenant de la famille Saulx-Tavannes, et une
suite de huit épées accompagnées de leurs dagues, l’une
avec un calendrier gravé sur la lame, une autre à poignée
damasquinée d’or, une autre en fer incrusté d’argent : il
faudrait des pages entières pour en décrire l’admirable
travail.
De même la vitrine à pans de M. Riggs contient des
merveilles que nous ne pouvons pas omettre : ainsi une
épée de parement à poignée de fer doré et incrusté d’ar-
gent dont les quillons contournés se terminent en caria-
tides rappelant le n° J. 5q du Musée d’artillerie, signée :
Peti fecit et ayant été donnée à Anne de Montmorency
par François Ier, qui lui-même l’avait reçue de Charles-
Quint ;
Un stocco benedetto de Léon X, la troisième année de
son pontificat, à ses armes, épée d’honneur que les papes
offraient en cadeau, comme la rose d’or qu’ils continuent
seule aujourd’hui à distribuer, et dont il n’y a plus que
quelques exemples : un au Musée de Cassel avec son
fourreau, don d’innocent VIII ; un au palais de Monbijou,
à Berlin, également pourvu de son fourreau, présent
d’Alexandre VI ; un enfin au trésor de Saint-Marc, offert
en 168g au doge Francesco Morosini, le Péloponnésiaque,
par le pape Alexandre VIII, et d’un mauvais goût achevé;
Puis une épée et sa dague, témoins de la gratitude de
Philippe II envers la famille Ximenès; une épée d’arçon
de Henri IV ; pour finir, une épée à poignée de fer
incrusté d’argent, signée : Bouqueton, armurier du roi,
ayant appartenu à Louis XIII.
Un mot de l’épée bien connue de Ferdinand d’Avalos,
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pièce très rare qui protégeait la nuque; quelques armets à
méçails grimaçants, à M. Riggs; quelques autres à canne-
lures maximiliennes, au comte d’Arlincourt, entamerons-
nous le xvie siècle.
Ce siècle est le triomphe de cette coiffure ; les plus
célèbres orfèvres ont ciselé des armets; toutes les mer-
veilles de gravure, de damasquinure, d’incrustations que
nous avons rencontrées sur les armures de corps sont
répétées sur l’ajustement de tête et cet ajustement, la plu-
part du temps, est un armet, au moins pendant tout le
règne de François 1er; aussi n’avons-nous que l’embarras
du choix entre un armet de la famille de la Trémoïlle, à
entrelacs, avec la devise: Spes mea dat vires ; un autre,
au roi Philippe II; un troisième en fer bruni gravé et
doré, au duc d’Albe, avec son chiffre : A. F. T. liés, Fer-
nand Alvarez de Toledo (vitrine 57) ; un autre en fer doré,
décoré de palmes, couronnes et foudres, de même facture
qu’une armure de l’Armeria de,Turin et qu’un brassard et
un plastron de la collection Spitzer (vitrine 57) ; un cin-
quième en fer damasquiné d’or et d’argent, portant l’aigle
d’empire et ayant appartenu à Ferdinand V, duc deTyrol,
plus tard Ferdinand II d’Allemagne ( 1 578 j 1637), prove-
nant de la collection d’Ambras, de Vienne; un dernier, du
début du xviie siècle, en fer repoussé, à rinceaux, masca-
rons et fleurs de lis d’or rapportées, avec couronne royale
et branches de laurier, de tous points identique à l’armure
de Louis XIII, du Musée d’artillerie; toutes ces pièces à
M. Riggs.
La Renaissance, ce retour aux traditions antiques, n’a
pas exercé son influence seulement sur la décoration des
armures; elle a remis en faveur les formes grecques et
romaines. Nous avons cité plus haut une celata vene\iana,
nous avons maintenant à signaler différents casques, dits
à l’antique, usités surtout en Italie dans les cérémonies
officielles et renouvelés de la galea des centurions de la
période impériale.
Tels sont : un casque plaqué d’argent avec branchages
en relief, de la famille Visconti; un autre figurant une tête
de dauphin, à M. Riggs; un en bronze à grotesques se
rapprochant un peu de la forme bourguignotte, n° 674,
collection Weber; un dernier, n° 658 bis, à M. Spitzer, en
fer repoussé et noirci, orné sur la bombe de deux figures
d’enfants et passant pour avoir appartenu à André Doria,
le célèbre amiral (1468-1560).
Comme coiffures de parement, la fin du xvie siècle
vit naître également le cabasset employé déjà auparavant
en temps de guerre; nous en avons signalé deux précé-
demment, d’une grande richesse, en voici encore un en
fer peint, décoré d’un lion de Saint-Marc (vitr. 56, collec-
tion Riggs).
Il y avait de même des morions de luxe comme le
n° 65g de la collection Spitzer, présentant un combat de
cavaliers, en fer repoussé et noirci, ou le n° 187 de la
collection Dupasquier, à entrelacs et médaillons sur fond
doré.
Ces deux dernières sortes de coiffure ont fait les beaux
jours des guerres de religion : quiconque a entendu les
Huguenots à l’Opéra les connaît de vue, s’il en ignore le
nom. M. Riggs a prêté justement quelques morions à la
fleur de lis de la garde suisse sous Henri III et Henri IV,
qui semblent n’attendre que la tête d’un Saint-Bris ou d’un
Nevers.
Mais en voilà bien long sur ce sujet : encore une bour-
guignotte italienne du xvie siècle, à grotesques et figures
de fleuves (n° 5 2, collection Riggs), transformation de la
salade, qui fut la dernière coiffure défensive de guerre des
gentilshommes au xvne siècle; une autre très remarquable
à M. Riggs aussi, avec une crête à cartouches et hippo-
Tome XLIX.
campes merveilleusement ciselés sur fond doré, provenant
d’une armure de l’Armeria de Madrid; une autre, à
M. Spitzer, avec trophées d’armes et combats de cavaliers
sur la crête; quelques pots en tête des troupes du génie du
temps de Louis XIV, quelques casques bizarres à ailettes
de l’unique régiment de cuirassiers de ce règne (collection
Riggs), analogues à ceux du Musée d’artillerie, et passons
aux armes offensives :
Jusqu’aux progrès des armes à feu survenus à la fin du
xvie siècle, et cause de l’abandon des armures de guerre
devenues trop épaisses et trop pesantes, les tournois étant
tombés en désuétude dès la mort de Henri II, il y a infé-
riorité flagrante de l’attaque sur la défense, artillerie à part
bien entendu : un gentilhomme du xve siècle et même du
xvie, armé de pied en cap, sans parcimonie, chez le bon
faiseur, et solidement campé sur un cheval aux jarrets
sûrs, pouvait aller de bon cœur au combat; il avait neuf
chances sur dix de s’en tirer sans une égratignure, hormis
le cas de mort de sa monture; tout le monde sait l’histoire
de Bayard au pont du Garigliano. Aussi ne parvenait-on
pas aux jolis bilans de notre fin de siècle où, en moins de
quarante ans, la terre a été nettoyée de plus de deux mil-
lions d’hommes par le seul moyen des batailles. Le combat
des Trente en 135 1 est l’exception, et il fut livré antérieu-
rement aux perfectionnements du harnais de guerre; la
règle se rapprochait plutôt de cette journée fameuse où
les armées de deux républiques italiennes du xve siècle,
luttant depuis le matin, arrivèrent au soir au total d’un
mort; encore était-ce d’une chute de cheval!
Il y a une telle abondance d’épées à l’Exposition que
nous pouvons seulement nous arrêter sur une faible partie
d’entre elles, nous contentant de passer rapidement sur
les autres. M. Riggs a envoyé (vitrine 56) quatre épées du
xve siècle, dont deux à quillons chantournés, deux à
quillons renversés, montrant encore dans toute sa simpli-
cité le branc des poètes, type usité depuis les Croisades.
Du xvie siècle, M. Spitzer a prêté une épée à poignée
française en fer ciselé partiellement doré et à lame de
Solingen, provenant de la famille Saulx-Tavannes, et une
suite de huit épées accompagnées de leurs dagues, l’une
avec un calendrier gravé sur la lame, une autre à poignée
damasquinée d’or, une autre en fer incrusté d’argent : il
faudrait des pages entières pour en décrire l’admirable
travail.
De même la vitrine à pans de M. Riggs contient des
merveilles que nous ne pouvons pas omettre : ainsi une
épée de parement à poignée de fer doré et incrusté d’ar-
gent dont les quillons contournés se terminent en caria-
tides rappelant le n° J. 5q du Musée d’artillerie, signée :
Peti fecit et ayant été donnée à Anne de Montmorency
par François Ier, qui lui-même l’avait reçue de Charles-
Quint ;
Un stocco benedetto de Léon X, la troisième année de
son pontificat, à ses armes, épée d’honneur que les papes
offraient en cadeau, comme la rose d’or qu’ils continuent
seule aujourd’hui à distribuer, et dont il n’y a plus que
quelques exemples : un au Musée de Cassel avec son
fourreau, don d’innocent VIII ; un au palais de Monbijou,
à Berlin, également pourvu de son fourreau, présent
d’Alexandre VI ; un enfin au trésor de Saint-Marc, offert
en 168g au doge Francesco Morosini, le Péloponnésiaque,
par le pape Alexandre VIII, et d’un mauvais goût achevé;
Puis une épée et sa dague, témoins de la gratitude de
Philippe II envers la famille Ximenès; une épée d’arçon
de Henri IV ; pour finir, une épée à poignée de fer
incrusté d’argent, signée : Bouqueton, armurier du roi,
ayant appartenu à Louis XIII.
Un mot de l’épée bien connue de Ferdinand d’Avalos,
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