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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 16.1890 (Teil 2)

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Molinier, Émile: Un décorateur américain: J. G. Low
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https://doi.org/10.11588/diglit.25870#0162

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L’ART.

comme une preuve de ce qu’un enseignement continu et raisonné peut faire au point de vue
de l’art. Mais pour les États-Unis ce serait une dizaine de South Kensington qu’il faudrait et
les Etats-Unis ne possèdent pas les éléments d’un seul de ces Musées. La question, telle qu’elle
se pose maintenant, est donc quelque peu insoluble : Vous fermez un pays sans vous être pro-
curé à l’extérieur les outils ou la matière première qui vous seront ensuite nécessaires pour fabri-
quer vous-mêmes. Nous allons assister bientôt aux résultats de ce traitement héroïque. C’était
peut-être brûler ses vaisseaux un peu trop tôt; il n’est pas prouvé que les industries d’art amé-
ricaines puissent marcher sans lisières.

Les décorations que nous mettons sous les yeux du lecteur sont dues à un artiste américain,
John G. Low, dont l’éducation s’est faite en France; successivement élève de Couture et de
Troyon, il étudia la peinture décorative pendant de longues années; ce même goût pour la déco-
ration intérieure l’amena à s’occuper de la céramique et l’on ne peut nier que, pour l’époque où

il a commencé ses travaux, l’idée était neuve. On n'avait
point, comme on le fait couramment aujourd'hui, tant en
France que dans le reste de l’Europe, osé demander à la
céramique un ensemble décoratif monochrome ou poly-
chrome et il est évident que Low a été, dans ce sens, un
précurseur à sa manière. Le succès de ses produits a été
et continue à être grand en Amérique et, à vrai dire, si
nous n’avons rien à lui envier, il n’en faut pas moins
reconnaître que plusieurs de ses compositions ont un réel
mérite. Décorations de cheminées, briques décoratives,
tableaux, tout cela est d’un sentiment très fin et modelé

Renaissance et aussi du réalisme tout moderne; certains
panneaux font penser de loin aux belles compositions
dans lesquelles Millet a voulu représenter les formes
énergiques et un peu massives, mais d’une simplicité
réellement grande, des travailleurs des champs; d’autres,
plus faibles, font un peu songer à ce que l’on appelle
communément la tête d’expression, mais c’est l’exception
et, à part quelques enfantillages, auxquels la sculpture
italienne de nos jours nous a habitué, le niveau artistique
de ces productions est assez élevé.

A tout prendre, si dans toutes les branches des arts
industriels les Américains nous montraient un talent aussi réel, c’en serait fait rapidement de la
vieille Europe. Notre droit est d’espérer qu’il en sera autrement pendant longtemps encore, car
cette perspective n’a rien de particulièrement gai. Tant que nous conserverons notre supériorité
commerciale et industrielle, grâce à notre supériorité intellectuelle, il faudra compter avec nous ;
mais le jour où nous n’aurons plus cette supériorité intellectuelle, 0Ï1 par un travail d’assimilation,
qui est loin d’être impossible, les Américains auront acquis tout ce que nous devons à de longues
traditions, à un long passé dont chaque jour a été marqué par un léger progrès, alors plus de
débouché pour rien de ce que nous fabriquons et l'on ne peut estimer au juste quelles seront
les conséquences de cette exportation rentrée. C’est là un terme fatal, encore éloigné sans doute,
mais auquel il faut penser.

Émile Molinier.

fort habilement. De tout un peu, du reste, dans cette
décoration : du japonisme, de l'antiquité classique, de la

La Coutuke.

Terre cuite, par John G. Low.

Le Gérant, E. MÉNARD.
 
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