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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 16.1890 (Teil 2)

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L’ART.




séduits par le soin extrême avec lequel l’auteur a traité
toutes les questions qui ont à leurs yeux — et aux siens —
le plus d'importance. C’est vraiment con amore que
M. Havard vous initie à tous les sujets qui ont directement
ou même indirectement un caractère artistique.

Quel ingénieux parti ne tire-t-il pas des mots Palis-
sandre, Panneau, Papier, Paravent, Pastel, Pavillon,
Peigne, Peintre, Peinture, Penture, Perse, Perspective,
Pharmacie, Piédestal, Pierreries, Plafond, P/tzf, Plateau,
Poêle, Porcelaine, Porte,

Portrait, etc. !

Quel est le Curieux, quel
est l’homme de goût qui après
avoir vu le Panneau en bois
sculpté,peint et doré, si bien
dessiné par M. Mangonot,
d’après l’original décorant le
grand salon de l’ancien hôtel
de Roquelaure, aujourd’hui
ministère des Travaux pu-
blics, n’aura hâte d’aller ad-
mirer l’ensemble de cette
boiserie d’une si élégante
richesse ?

Je n’ai signalé que quel-
ques mots pris parmi ceux
de la première lettre du vo-
lume. Toutes les autres, jus-
ques et y compris le Z, vous
réserveront de non moins
agréables surprises. Vous
reconnaîtrez que l’auteur a
partout épuisé la matière,
que vous vous arrêtiez à
Quenouille, à Rafraicliissoir,
à Reliquaire, à Rideaux, Ro-
caille, Salière, Salle, Salon,

Saucière, Sceau, Sculpture,

Seau, Serrure, Serrurerie,

Siège, Poz’e, Soupière, Statue,

Sucrier, Surtout, Table, Ta-
bleau, Tapis, Tapisserie,

Tasse, Tenture, Urne, Vais-
selle, Vase, Velours, Vernis,

Verre, Verrière, Zodia-
que, etc. Chaque fois, si ins-
truit que vous soyez, vous
trouverez à apprendre, et,
tout en augmentant votre
savoir, vous développerez
constamment votre goût,

M. Henry Havard ayant pour
principe dont il ne s’écarte
jamais, de mettre constam-
ment en lumière le côté artis-
tique de toute chose et de
traiter le plus naturellement du monde au point de vue
de l’art les sujets qui y sont le plus étrangers, aux yeux
non seulement du vulgaire, mais de bon nombre de gens
distingués. Un exemple emprunté textuellement à l’auteur
en dira plus long à cet égard que toutes les digressions
auxquelles je pourrais me livrer et cet exemple fera infini-
ment plus de plaisir à mes lecteurs. 11 s’agit d’un mot qui
n’est plus en usage et que vous saurez gré à M. Havard
d’avoir, de si savante façon, tiré de l’oubli :

Touaille, s. f; Toaille, s. f. — « Linge qu’on pend d’ordinaire sur
un rouleau, auprès d’un lieu où on se lave les mains, qui sert à les
essuyer. 11 y a des touailles auprès des réfectoires des religieux. Ce

mot vient de l’italien touaglia qui a été fait de tarai ou torale, qui
signifie le tapis ou la nappe qui se mettoit sur le lieu où l’on mangeoit,
qu’en latin, on nommoit torus. » Cette définition, donnée par Fure-
tière, nous paraît singulièrement étroite. Ce mot, en effet, a été, pen-
dant plus de quatre siècles, considéré comme l'équivalent de serviette,
et la touaille était alors employée à tous les usages auxquels la ser-
viette répond de nos jours. On s’en servait assurément pour s’essuyer
la bouche, la figure et les mains. La citation qu'on va lire, emprun-
tée au gracieux roman de Floire et Blancheflor (p. 68), ne laisse
aucun doute à ce sujet :

leeles doi que il eslit
A son lever et à son lit;

L’une sert de l’ève doner,

Et la touaile tient son per.

Eustache Deschamps, dans son
Mirouer du mariage (édit. Cra-
pelet, p. 2i2 et 213), n’est pas
moins explicite :

En chambre, après les gransmangers,
Touailles blanches sans reprouche,

A quoy on essura sa bouche.

Quant le drageoir yert descouvert.

On peut invoquer encore les
quatre vers suivants cités dans une
discussion de linguistique,'par le
Mercure de janvier 1705 :

Apporte le pot à laver.

Et le bassin et la touaille,

Puis à laver me baille,

J’ay grande haste, acheve-moi tost.

En outre, il est à remarquer
que la plupart des auteurs asso-
cient dans leurs énumérations les
nappes et les touailles, et ce rap-
prochement assigne à notre mot
sa juste signification. Ainsi, le
Livre des mestiers porte :

Encore vous falent
Nappes et touailles.

Et doubliers et escorcbeuls.

La Complainte du nouveau ma-
rié ajoute, de son côté :

A mesnaige fault pain et vin
Sarges et coustes et cous[s]lin,

Varlet et chamberière,

Nappes, touailles, draps en lin...

Enfin, dans le Mirouer du ma-
riage, que nous citons plus haut,
Eustache Deschamps dit encore
que les jeunes époux doivent
mettre :

.leurs entendues (leur attention)

A belles touailles et nappes...

Étienne Boileau, en cela, est
d’accord avec les poètes. Dans la
seconde partie de son Livre des
mestiers, il écrit (titre XVI, ch. m) :
« Cil qui vendent braies et che-
mises et dras de lit nues, et napes
et touailles nueves, ils ne doivent
riens de coutume, se ils ne mestent
sus estai. » Bien mieux, un Compte
de l’hôtel du duc Jean de Berry
(1398), où nous voyons que les plus
grands seigneurs, au xtv° siècle,
louaient parfois du linge de table
pour leurs réceptions officielles,
porte : « A la dame du Pot d’es-
tain, pour louaige de touailles fines, ix sols vii deniers tournois.

A Ysabel la Lavandière, louage de napes, x sols tournois. » Mais la
touaille de cette époque, comme la serviette de nos jours, servait
encore à bien d’autres usages. Si, dans VInventaire de Clémence de
Hongrie (i328), nous trouvons « Quatre touailles à essuyer mains »,
nous rencontrons également : « Une petite touaille ouvrée pour
letrin », car on plaçait des touailles sur pupitres, pour préserver les
riches reliures. L'Inventaire des biens trouvés en l hôtel de Quatre-
mares après l’arrestation de Jeanne de \ alois (1324) mentionne :

« vi pièces de longues touailles, à mettre sus tables », qui tenaient
lieu de napperons ; et l’article suivant, emprunté au Trousseau de
Marie de Bourgogne, comtesse de Çlèves (1415), semble indiquer
un pareil emploi. « Premièrement, unze nappes pour la table de
ma ditte dame de Clèves. •— Item, unze touailles longues de mesmes.
— Item, dix-huit nappes longues pour le commun. •— Item, dix-
huit touailles longues de mesmes. » Les Comptes de l’hôtel de

CH. G.OUTZWTLLE'R^ pka.Micfclerpa.rit.

Plafond de l’Hôtel des frères Lallemand,
a Bourges.

(Gravure extraite de : Dictionnaire de l’Ameublement et de la Décoration.)
 
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