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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 16.1890 (Teil 2)

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https://doi.org/10.11588/diglit.25870#0205

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179

t;

complètement disparu; l’e'tonnante fragilité du pastel, nous l’avons
dit, nous enlève toute certitude sur ses origines.

Ce genre de dessins compte, en effet, trois ennemis irréconci-
liables : le frottement, le soleil et l’humidité. Le frottement est le
premier, mais n’est peut-être pas le plus redoutable. Le peintre
emploie trois sortes de crayons, qui sont qualifiés durs, demi-durs
et tendres. Les crayons durs et demi-durs se taillent. Ils servent à
faire l’esquisse, à indiquer les plans, les masses d’ombre et de
lumière. On procède avec eux par hachures; et comme on appuie
assez fortement, ils laissent sur le papier une trace durable. 11 n’en
est pas de même des crayons tendres. Ceux-ci
s’écrasent, et on les applique sur le dessin ébauché
— qu’on nomme préparation — soit avec le doigt,
soit avec une estompe ou un tortillon de papier.

Ln sorte que cette dernière couche, formée d’une
fine poussière, souvent assez épaisse, est si peu
adhérente au papier, qu’il suffit d’un choc un peu
fort, ou d’un coup de blaireau, pour la faire com-
plètement disparaître. On comprend, après cela,
quels dangers le moindre frottement fait courir au
pastel. Toutefois, quand celui-ci est couvert d’une
glace, une partie des risques se trouvent conjurés.

Malheureusement il n’en est pas de même à l’égard
de l’humidité. Celle-ci est absorbée avec une facilité
déplorable par le papier sans colle, et par consé-
quent spongieux, sur lequel la couleur est déposée.

Puis vient le soleil qui dévore les nuances délicates
avec une regrettable rapidité. Quand nous aurons
ajouté à ces causes de destruction les secousses et
vibrations, imprimées par mille petits accidents au
cadre et au papier, et qui détachent peu à peu la
poussière délicate du pastel, nous aurons ample-
ment justifié sa réputation de fragilité.

Quelles que soient, au surplus, les origines du
pastel, sa grande mode date, chez nous, du premier
quart du siècle dernier. C’est à la suite du voyage
en France de Rosalba Carriera, qu’il commença à
faire fureur ; c’est à la suite des succès surprenants
de cette étonnante artiste, que nombre de peintres
s’essayèrent, avec un bonheur jusque-là inconnu,
dans cette voie plus ou moins nouvelle. Ses qua-
lités aimables et brillantes, jointes à la rapidité'de
travail, à la facilité de le quitter et de le reprendre
comme on veut, de se corriger autant qu’on le
croit utile, séduisirent nombre d’hommes de talent.

A l’exemple de l’illustre Vénitienne, il se forma
toute une légion de pastellistes français admirables.

Nommer Maurice Quentin de Latour, Vivien, Péron-
neau, Boucher, Tocqué, Liotard, etc., c’est non
seulement énumérer les pastellistes les plus connus,
mais encore citer des artistes qui comptent, à juste
titre, parmi les plus illustres de l’école française.

Ajoutons que ce qui acheva de développer en
France une école féconde de pastellistes habiles,
c’est qu’on commença d’y fabriquer, avec une réelle
supériorité, tout le matériel qui leur était néces-
saire. Dans les premiers temps, ils avaient été
obligés de tirer de l’étranger leurs crayons. Les
artistes français devaient se fournir en Italie ou en
Allemagne. Dès 1745, la fabrication des pastels,
établie à Paris, dépassait en quantité ce qu’on pro-
duisait hors de nos frontières. C’est du moins ce
que tend à établir le passage suivant, emprunté au
Mercure : « Les amateurs et curieux du beau pas-
tel, dit ce recueil, sont avertis qu’il se fait depuis
quelque temps à Paris d’excellents crayons, dont le
célèbre M. de La Tour et autres peintres font usage.

Ces crayons, quoique très tendres, doux et gras,
tiennent la pointe comme ceux de sanguine et s’ef-
facent très difficilement. » (Mercure galant, n° de
février 1746.) Mais cette production, quelque per-
fectionnée qu’elle pût être, rendit aux artistes
moins de services qu’une innovation particulière-
ment précieuse, qu’on doit au sieur Loriot. Cet
habile homme, qu’un document qualifie « mécani-
cien au Louvre », découvrit, en 1748, le moyen de
fixer le pastel. Dès lors, cette fragilité si redoutable
et si redoutée, qui avait été le principal obstacle à
la conservation de ces gracieux ouvrages, disparut en partie.
« Vers 1748, dit le Mercure, rendant compte des travaux du sieur
Loriot, ce mécanicien trouva le secret admirable de fixer le pastel,
de manière à donner à ce genre de peinture la même solidité que
celle à l’huile. La plupart des admirables tableaux en pastel du
célèbre La Tour devront particulièrement à cette découverte leur
perpétuité. » En 1753, Loriot, qui avait « déjà fait l’essai de son
secret sur les ouvrages de quelques-uns des plus grands maîtres de
l’art » et obtenu d’eux l’attestation « qu’on ne pouvoit porter ce
secret à un plus haut degré de perfection » (voir Galette de France
du 22 septembre 1753), soumit son innovation à l’Académie royale
de peinture et de sculpture. Celle-ci l’examina avec soin et inscrivit

Pilastre orné,
composé par Bérain.

(Gravure extraite de : Dictionnaire
de l’Ameublement et de la Décoration.)

sur ses registres un procès-verbal des plus flatteurs. Ceux qui
seraient désireux de connaître, dans ses détails, la découverte du
sieur Loriot trouveront une description complète de ses procédés
dans la Notice de Y Almanach sous verre de 1782 (col. 185, n° 173).

Disons encore que, dès 1771, un sieur Maugé, de Rennes, avait
trouvé une autre manière de fixer le pastel et que l’auteur du
Voj'age d’un Français en Italie en avait signalé une troisième.
(Voir Almanach sous verre, 1771, notice des dix dernières années,
col. 12.) Nous avons tenu toutefois à restituer au sieur Loriot, dont
le nom est aujourd’hui tout à fait oublié, le mérite d’une application
qui a rendu à une branche de l’art français un
service de tout premier ordre.

Pastel. — On donne également ce nom à une
plante tinctoriale, en usage dès la plus haute anti-
quité, non seulement pour colorer les tissus, mais,
chez les peuples barbares, pour se teindre le corps.
Parmi les étoffes que Louis XIV remit aux ambas-
sadeurs de Siam, pour être offertes à leur maître,
se trouvaient « une pièce à fond ponceau à fleurs
lisérées d’or » et « une pièce à fond pastel ». (Mer-
cure, n° de mai 1687.) Le pastel, qu’on appelle aussi
Guede (voir ce mot), donne une couleur bleue qui
fut employée pendant longtemps dans la composi-
tion d’une grande quantité de nuances. On disait
que les tissus étaient teints au pastel ou au pastel
double, suivant qu’ils étaient passés, une ou plu-
sieurs fois, dans la cuve de guède. « Une pièce de
camelot orangé pastel double, à xxxvi livres la
pièce », lit-on dans Y Inventaire de Grégoire Beau-
nom, marchand (Bordeaux, 1607). On récoltait cette
plante en Normandie et en Bretagne ; mais le pastel
du Languedoc était le plus estimé. Il s’en faisait un
commerce énorme, qui prit fin seulement quand
l’indigo, bien supérieur comme matière tinctoriale,
commença d’abonder sur les marchés européens.
Le mot pastel a encore, chez les teinturiers des
siècles passés, servi à désigner certains autres pro-
duits. On nommait notamment pastel d’écarlate la
poudre d’écarlate nouvelle. Ce pastel servait à la
confection des teintes composées, surtout de l’orangé.

Ouvrez le premier des quatre volumes
de M. Havard ; la préface se termine plus
que modestement par ces mots : « Ce livre
contiendra près de quinze années de pa-
tientes recherches et de travail continu.
C’est là, nous semble-t-il, un titre à l’in-
dulgence de ceux même pour qui la sévérité
semble être une sorte de devoir. »

La critique n’aura jamais moins eu à se
montrer indulgente ; elle est heureuse
d’avoir à louer, à louer grandement la per-
sévérance du savant écrivain qui, de volume
en volume, n’a cessé, quatre ans durant,
de dépasser de beaucoup toutes ses pro-
messes. Rien que pour l’illustration, le titre
du tome Ier suffit à le démontrer ; on y lit :
Ouvrage illustré de 256 planches hors
texte et de plus de 2,500 gravures dans le
texte, et l’ouvrage contient près de 1,000 gra-
vures de plus que n’en faisait espérer l’au-
teur, qui s’est montré tout aussi prodigue
de remarquables développements littéraires.

En résumé, M. Havard n’a pas seule-
ment rendu, par son Dictionnaire, un
immense service d’érudition artistique et
industrielle, il a fourni à l’histoire, à la véri-
table histoire des peuples et non à l’histoire
adulatrice et légendaire des seuls tueurs
d’hommes, les matériaux les plus précieux, fidèle à l’esprit
de sa préface où, dès les premières lignes, ce penseur
s’exprimait ainsi : « On se plaignait de toutes parts de
l’absence d’un livre de ce genre. Les sciences historiques
étaient entrées, depuis un demi-siècle, dans les voies qu’on
pourrait appeler humaines. On s’était enfin aperçu que la
vie d’un peuple ne se résume pas dans la nomenclature
plus ou moins fidèle d’une suite de batailles et de mariages
princiers. Les moeurs des nations, leurs usages, leurs cos-
 
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