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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 16.1890 (Teil 2)

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Méreu, Honoré: Le dôme d'Orvieto, [XII]=Fin
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https://doi.org/10.11588/diglit.25870#0216

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L’ART.

la science du nu et du clair-obscur. Piero était surtout un chercheur, un observateur fidèle de la
nature, et, à Saint-François d’Arezzo, on conserve de lui, derrière le maître-autel, des fresques
où le mouvement du corps humain et des animaux dénote une étude approfondie de la vie et
une recherche consciencieuse de la vérité. Il y a là une Victoire de Constantin qui pourrait bien
avoir avec le fameux tableau de Raphaël, au Vatican, le même degré de parenté qui existe
incontestablement entre le Jugement dernier d’Orvieto et celui de la chapelle Sixtine.

Au début de sa carrière, Signorelli s’attacha chabord à imiter son maître et il y réussissait
si bien que les gens du métier avaient peine quelquefois à s’y reconnaître. Il ne commença
d’ailleurs que très tard à travailler pour son compte personnel. Les plus anciennes peintures
qu’on connaît de lui sont celles de la chapelle de Sainte-Barbe, à San Lorenzo, d’Arezzo, et qui
datent de 1472. 11 était alors âgé de trente-trois ans, étant né en 1439. Il travailla tour à tour
pour Sainte-Catherine, pour la Trinité, pour Saint-Augustin et pour Saint-François. Dans cette
dernière église, à la chapelle des Accolti, il peignit le fameux panneau où l’on voyait saint
Michel pesant les âmes sur une balance. Il a aussi travaillé beaucoup à Pérouse, à Sienne, à
Volterre, à Città di Castello, à la Pieve, à Castiglione, et dans presque toutes les grandes villes
de l’Ombrie, ainsi qu’à Cortone, sa ville natale, et à Rome, où il peignit, au Vatican, le Testa-
ment et la Mort de Moïse ; mais son chef-d’œuvre est à Orvieto, où il a laissé un des plus beaux
morceaux de peinture murale dont puisse s’enorgueillir l'art italien et dont la renommée a été
jusqu’à présent fort au-dessous de ses mérites, tant il y a que les chefs-d’œuvre du pinceau ont,
eux aussi, comme les livres, leur destinée.

Arrivé à l’âge mûr, il chercha le repos et se retira à Cortone, au sein de sa famille. Il ne
travailla plus que pour la gloire, ayant acquis assez de fortune pour vivre de ses revenus, mais
cela ne l’empêcha pas de travailler encore beaucoup. La mort le surprit le pinceau à la main, à
l’âge de quatre-vingt-deux ans, pendant qu’il ornait d’un Baptême de Jésus-Christ le palais du
cardinal Passerini, de Cortone.

C’était un homme aimable, cultivé, enjoué et de mœurs très douces. Il s'habillait toujours
avec beaucoup d’élégance et il accordait un soin particulier à sa chevelure frisée et abondante,
ainsi qu’on peut le voir dans le portrait qu’il nous a laissé de lui-même à côté de celui d’Angelico.
Il devait avoir à cette époque une soixantaine d’années, son premier contrat avec la fabrique
d’Orvieto datant de 1499. A lire entre les lignes de Vasari, on croirait qu’une pointe de gour-
mandise et d’épicuréisme relevait tous ces agréments. Il était, au surplus, gai et affable, et
surtout très épris et très fier de son art. S’étant rendu une fois pendant qu’il était déjà vieux,
chez les Vasari, il apprit que Giorgio, encore enfant, s'amusait à barbouiller tous ses cahiers de
dessins au crayon et à la plume, et que Antonio, son père, contrariait cette vocation.

— Puisque le petit Georges ne déroge pas, dit-il au vieux peintre, laisse-le s'exercer au
dessin, car, si même il cultivait les lettres, l’art serait toujours pour lui, comme pour tout homme
de bien, un titre d’honneur et une source de jouissance.

Puis, comme on lui racontait que Giorgio était sujet à de fréquentes hémorragies nasales,
il lui noua lui-même au cou un collier avec une pierre de jaspe, qui passait alors pour avoir la
vertu d’arrêter cette infirmité. Vasari donne aussi à entendre qu’après avoir examiné ses bar-
bouillages, il lui prédit qu’il serait un grand peintre. Cela confirme encore une fois le proverbe
qui dit qu’on n’est pas toujours bon prophète dans son pays. Mais qui sait si, sans cette inter-
vention de Signorelli, Vasari, éloigné par son père des choses de l’art, nous aurait laissé les
biographies qui nous sont maintenant d’un si grand secours, quoiqu’il ne faille les consulter qu’à
bon escient?

Je vais maintenant compléter cette étude historique sur le Dôme par le relevé sommaire des
appointements alloués aux artistes principaux appelés à travailler à cet édifice. Cela pourra
donner une idée approximative de la façon dont étaient appréciés, à cette époque, les talents des
hommes qui dédaignaient les professions lucratives pour se consacrer aux occupations qui exigent
surtout du goût, de l’assiduité, de la résignation et du désintéressement, sinon de la modestie.

Les documents qui m’ont servi à dresser cet aperçu embrassent une période qui va du
 
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