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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 16.1890 (Teil 2)

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Gabillot, Cyrille: Le musée Guimet et les religions de l'Extrème-Orient
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https://doi.org/10.11588/diglit.25870#0292

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2Ô0

L’ART.

ami de Sougrîva , rend les plus grands services à Râma
dans cette expédition. Entre autres épisodes du siège de
Lanka, Râma et Lakshmana, sur le point de succomber
sous les morsures de serpents envoyés par Ràvana, sont
sauvés par l’oiseau Garouda ; Lakshmana, blessé par la
lance de Râvana, est guéri par la plante Ghandhâmadana
qu’Hanoumat va chercher en bravant les embûches du
démon aux dix nuques.

Enfin Râma engage le combat suprême avec Râvana,
et lui perce le cœur avec la flèche d'Indra, qu’il avait
reçue du saint rishi 1 Agastya. Les immortels célèbrent ce
triomphe ; le cri « Il a vaincu » retentit dans le ciel ; le
tambour des dieux résonne au milieu des airs, et une pluie
de fleurs tombe sur la terre; les Gandharvas chantent un
hymne et cinq Apsaras dansent un pas devant Râma.
Râvana mort, ses femmes le pleurent, et on lui fait des
funérailles comme à Hector 2.

Sîtâ, injustement soupçonnée par
son époux, à cause de son séjour
dans le gynécée de Râvana, passe
par l’épreuve du feu et en sort vic-
torieuse. Elle revient ensuite régner
avec Râma à Ayodhyâ, se sépare de
nouveau de lui, à cause des mêmes
soupçons, et finalement, après une
réconciliation suprême, rentre dans
le sein de sa mère.

La légende de Râma se retrouve
d’ailleurs dans un grand nombre
d’ouvrages de dates diverses.

Lorsque ces grandes divinités
populaires, revues et corrigées par
les Brâhmanes, eurent été définitive-
ment adoptées par eux, il fallut
naturellement concilier l’ancienne
orthodoxie avec les croyances nou-
velles. Parmi les différentes combi-
naisons imaginées, la plus célèbre
est celle de la Trimourtî ou Trinité
indoue, dans laquelle Çiva et Vish-
nou sont associés à Brahmâ. Brahmâ,

Vishnou, Çiva, les trois personnes
de cette trinité, sont les trois mani-
festations de l’Etre absolu : Brahmâ
est le créateur, Vishnou, le conserva-
teur, et Çiva le destructeur. Chacune
de ces trois personnes est représentée
par l’une des lettres A, U, M, for-
mant la syllabe sacrée Aum, sym-
bole de l’Absolu. Mais cette fusion n’a guère d’impor-
tance que dans la littérature religieuse, et. les sectes ne
connaissent réellement que Vishnou et Çiva. Les religions
sectaires peuvent donc ainsi se ramener à deux groupes,
Vishnouites ou Çivaïtes, suivant qu’elles donnent la pri-
mauté à l’un ou l’autre de ces dieux, le deuxième n’étant
alors que le satellite du premier. Certaines sectes éclec-
tiques ont même fondu les deux divinités en une seule,
Hari-Hara (Vishnou-Çiva), qui a fini par devenir une
figure tout à fait concrète, et le dieu Harihara est encore
aujourd’hui très adoré dans le sud de l’Inde. Quant à
Brahmâ, dieu majestueux mais terne, il n’a jamais été

1. Les rishis sont des anachorètes légendaires.

2. Le peintre Cormon a représenté la mort de Râvana dans un
tableau qui a figuré à l’Exposition Universelle de 1878. Nous rap-
pellerons aussi que Leconte de l’Isle a tenté plusieurs assimilations
en vers de la littérature de l’Inde : Bhagavat (poèmes antiques, 1 S5g) ;
Cunacépa (poèmes et poésie, 1859), et que Méry, tout en prenant
avec les dieux de 1 Inde les libertés ordinaires aux romanciers, a su
en parler d’une manière intéressante.

bien populaire; il n’a pour ainsi dire pas de culte propre,
et il n’y a guère qu’un temple, celui de Poushkara, près
d’Adjmir, qui lui soit exclusivement consacré; on lui
donne pour épouse Vâc ou Sarasvâtî, la parole, déesse de
l’éloquence.

Non seulement Vishnou et Çiva ont un culte et même
plusieurs, autant souvent qu’ils ont de noms, mais aussi
les divinités ou les héros qui se rattachent au Vishnouisme
et au Çivaïsme. Il faut à l’Indou des objets d’adoration, et
ses traditions lui en fournissent d’innombrables : Krishna,
Râma, Hanoumat, les fils de Pândou et leur épouse Drau-
pada, une foule d’esprits secondaires, comme les Bhoutas,
les Nagas ou dieux serpents, auxquels il faut ajouter des
divinités locales, des personnifications telles que celles du
Gange, d’anciens dieux brâhmaniques, Indra, Agni, les
planètes, le soleil même, qui est encore aujourd’hui direc-
tement honoré. Ces dieux ont leurs images et leurs sym-
boles : le symbole de Çiva est ordi-
nairement le phallus, figuré par un
linga ayant la forme d’un tronc de
cône, lequel a souvent pour support
l’organe femelle, layoni, figuré par
un prisme triangulaire représentant
Dêvî. Le symbole de Vishnou est
l’ammonite, celui de Lakshmî une
plante. Il y a aussi les animaux
sacrés : la vache, déjà l’objet d’un
culte dans l’ancienne religion ; le
taureau, consacré à Çiva ; le serpent,
le singe, allié de Râma, consacré à
Vishnou. Le culte de Vishnou est
en général plus aimable que ceux de
Çiva et de Dourgâ; celui de Çiva est
quelquefois sanglant, et toujours
celui de la sombre Kâli, sur les au-
tels de laquelle le sang humain a
autrefois coulé L A ces derniers
cultes appartiennent ces ascètes
fanatiques, mais surtout charlatans,
appelés j'Ogins, qui donnent en spec-
tacle leurs macérations, vendent des
charmes, et disent la bonne aventure.
Certaines sectes, aussi bien vish-
nouites que civaîtes d’ailleurs, à
côté de leurs pratiques avouées,
celles de la main droite, en ont
d’autres secrètes, celles de la main
gauche, qui ne sont rien moins
qu’édifiantes.

Aucun peuple, autant que l’Indou, n’a mêlé à sa vie les
pratiques religieuses. Outre les prières, les litanies, qui
accompagnent tous les actes de la journée, il y a les céré-
monies du culte particulier à chaque secte, qui s’accom-
plissent dans les temples. Il y a aussi des fêtes et des
pèlerinages d’un caractère plus général, auxquels toute la
population prend part, sans distinction de sectes; tels
sont: le carnaval, en mars, fête Krishnaïte; la fête du
retour du soleil en janvier ; les fêtes de Dourgâ en sep-
tembre, dans le Bengale ; la représentation de l’histoire de
Râma et de Sîtâ, pantomime qui dure plusieurs jours ; la
fête des lampes, en octobre, que les uns célèbrent en l’hon-
neur de Dêvî, les autres en l’honneur de Lakshmî. Il n’y
a aucun lieu remarquable par les souvenirs qui s’y rat-
tachent, qui ne soit un but de pèlerinage; presque toutes
les localités des bords du Gange et de la Yamouna sont

1. La secte des Thugs ou étrangleurs prétendait avoir reçu sa
mission de la déesse Kâli, pour lutter contre le principe conser-
vateur.

Çiva Trimourti et le Linga.

Fragment de char de Karikal. (Musée Ouimet, n- 2365.)
 
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