WŁADYSŁAWA JAWORSKA
II. 23. Charles Filiger, Pejzaż morski z domkiem,
ob. wl. pryw. w
gwasz, tekt. 16 X 30 cm. D. wl. W. Olewińskiego,
Paryżu. (Fot. W, Jaworska)
viennent les peintres 'de Pont-Aven, ice psychopathe —
selon I’avis des mededins locaux — entretenait de
vives relations avec 1’elite iirutellectuelle et artistique
la plus raffinee de Paris de ce fin-de-siecle. Antoine de
la Rochefioucauld etait son mecene et collectionneur
de ses peinltures, Remy de Gourmont l’iinvitait a colla-
borer dans 1’edition de „L’Imagier” dont il etait redac-
teur. Son oeuvre avait initeresise Alfred Mellerio, Paul
Alexis, Jullien Ledercq. En 1894 Alfred Jarry lui
consacra dans le „Meroure de France” une ample
etude qui devadt etre une critique de l’exposiition du
peintre chez le Barć de Boutteville. Cet article, 'dont
la prose poetique pleiine de meitaphores etait carac-
tedis‘tique pour Alfred Jarry, devinit en fait un
hommage rondu au peintre-symboliste par le poete-
symboliste.
A cetrte epoąue on s’occuppait beaucoup de theo-
sophie, de spiritisme, d’occultisme et de graphologie.
La rnode des horoscopes et des taibles tournantes etait
largement repandue. Avant qu’il [fut etabli a demeure
en Bretagne en 1889, Filiger prenait part a ce genre
d’ioccupationis. II avait ete present aux seances de
spiritisme avec Sar Peladan et Antoine de La Roche-
foucauld. Ce demier l’avait introuduit dans le milieu
de La Rose+Croix ou il exposait dans les salons
officiels en tant que „peintre religieux”.
Peut-etre le imisticisme de Filiger avait-il commence
ainsi. Pourtant il importe de souligner que, meme si
1’artiste pensonnellement avait peut-etre puise son
inspiration religieuse dans le spiritisme et l’occultisme,
ou meme dans le satanisme, comme le veut son ami
hollandais, le peintre Jan Verkade — Part de Filiger
est pure, inspire, naif et son auteur tiejit plus de
Saint Francois d’Assise que du demon,
La raison en etait peut-etre que 1’artiste, s’etant
©carte du imilieu parisien, prit contact avec l’ancienne
sculpture popularne bretonne et le paysage breton.
Mais ce qui importe le plus, c’est sa rencontre avec
le groupe de Pont-Aven. Cependant, ce n’est pas son
style seulement qui en fut influence. De meme que
les autres peintres du groupe, Filiger s’est rapproche
du christianisme comme de la religion des „petits”,
des gens simples. Pour lui, elle constituait une partie
integrale du primitif. Autant que pour Gauguin et
Bernard le motif religieux etait un pretexte artistique
en quelque sorte, autant pour Filiger, son mistiicisme
le poussait a peindre „pour la gloiire de Dieu” et „pour
le reconfort des coeuns”. Ce fait avait ete souligne
par 1’auteur de Ubu-roi 'dans son etude sur Filiger
et sur sa peinture qu’il appelle „Fart d’un giottisme
penitent”.
Accueilli avec enthousiasme par les poetes et avec
reserve par les peintres, ignore par la critique et
iinconnu 'du large public, Filiger fut, pour le cercie
restreint qui l’avait iconnu, le peintre modeme des
figures primitives de saints et d’icónes du XX-e
siecle. Meme ses portraits laiques sont peints selon
la coinvention propre aux icónes. Malgre certains
liens formels, l’oeuvre de Filiger ne suit pas le
courant Principal et l’esthetique du groupe d’avant-
-garde de Pont-Aven. Dans 1’article present je me
propose de faire connaitre Filiger sous un nouveau
jour. Je m’appuie sur cinq paysages inconnus de Fili-
ger qui avaient appartenu jadiś a Władysław Olewiń-
ski, ami polonais du peintre, lui aussi membre du
groupe de Pont-Aven. Ces gouaches sont enormement
interessantes au point de vue des recherches stylisti-
ques. Elles temoignent de liens tres proches avec
1’ecolę dę Pont-Aven. Leur analyse permet d’aperce-
22
II. 23. Charles Filiger, Pejzaż morski z domkiem,
ob. wl. pryw. w
gwasz, tekt. 16 X 30 cm. D. wl. W. Olewińskiego,
Paryżu. (Fot. W, Jaworska)
viennent les peintres 'de Pont-Aven, ice psychopathe —
selon I’avis des mededins locaux — entretenait de
vives relations avec 1’elite iirutellectuelle et artistique
la plus raffinee de Paris de ce fin-de-siecle. Antoine de
la Rochefioucauld etait son mecene et collectionneur
de ses peinltures, Remy de Gourmont l’iinvitait a colla-
borer dans 1’edition de „L’Imagier” dont il etait redac-
teur. Son oeuvre avait initeresise Alfred Mellerio, Paul
Alexis, Jullien Ledercq. En 1894 Alfred Jarry lui
consacra dans le „Meroure de France” une ample
etude qui devadt etre une critique de l’exposiition du
peintre chez le Barć de Boutteville. Cet article, 'dont
la prose poetique pleiine de meitaphores etait carac-
tedis‘tique pour Alfred Jarry, devinit en fait un
hommage rondu au peintre-symboliste par le poete-
symboliste.
A cetrte epoąue on s’occuppait beaucoup de theo-
sophie, de spiritisme, d’occultisme et de graphologie.
La rnode des horoscopes et des taibles tournantes etait
largement repandue. Avant qu’il [fut etabli a demeure
en Bretagne en 1889, Filiger prenait part a ce genre
d’ioccupationis. II avait ete present aux seances de
spiritisme avec Sar Peladan et Antoine de La Roche-
foucauld. Ce demier l’avait introuduit dans le milieu
de La Rose+Croix ou il exposait dans les salons
officiels en tant que „peintre religieux”.
Peut-etre le imisticisme de Filiger avait-il commence
ainsi. Pourtant il importe de souligner que, meme si
1’artiste pensonnellement avait peut-etre puise son
inspiration religieuse dans le spiritisme et l’occultisme,
ou meme dans le satanisme, comme le veut son ami
hollandais, le peintre Jan Verkade — Part de Filiger
est pure, inspire, naif et son auteur tiejit plus de
Saint Francois d’Assise que du demon,
La raison en etait peut-etre que 1’artiste, s’etant
©carte du imilieu parisien, prit contact avec l’ancienne
sculpture popularne bretonne et le paysage breton.
Mais ce qui importe le plus, c’est sa rencontre avec
le groupe de Pont-Aven. Cependant, ce n’est pas son
style seulement qui en fut influence. De meme que
les autres peintres du groupe, Filiger s’est rapproche
du christianisme comme de la religion des „petits”,
des gens simples. Pour lui, elle constituait une partie
integrale du primitif. Autant que pour Gauguin et
Bernard le motif religieux etait un pretexte artistique
en quelque sorte, autant pour Filiger, son mistiicisme
le poussait a peindre „pour la gloiire de Dieu” et „pour
le reconfort des coeuns”. Ce fait avait ete souligne
par 1’auteur de Ubu-roi 'dans son etude sur Filiger
et sur sa peinture qu’il appelle „Fart d’un giottisme
penitent”.
Accueilli avec enthousiasme par les poetes et avec
reserve par les peintres, ignore par la critique et
iinconnu 'du large public, Filiger fut, pour le cercie
restreint qui l’avait iconnu, le peintre modeme des
figures primitives de saints et d’icónes du XX-e
siecle. Meme ses portraits laiques sont peints selon
la coinvention propre aux icónes. Malgre certains
liens formels, l’oeuvre de Filiger ne suit pas le
courant Principal et l’esthetique du groupe d’avant-
-garde de Pont-Aven. Dans 1’article present je me
propose de faire connaitre Filiger sous un nouveau
jour. Je m’appuie sur cinq paysages inconnus de Fili-
ger qui avaient appartenu jadiś a Władysław Olewiń-
ski, ami polonais du peintre, lui aussi membre du
groupe de Pont-Aven. Ces gouaches sont enormement
interessantes au point de vue des recherches stylisti-
ques. Elles temoignent de liens tres proches avec
1’ecolę dę Pont-Aven. Leur analyse permet d’aperce-
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