Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 1.1859

DOI issue:
Nr. 6
DOI article:
Lagrange, Léon: L' atelier d'Overbeck
DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.16986#0335

DWork-Logo
Overview
Facsimile
0.5
1 cm
facsimile
Scroll
OCR fulltext
332 GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

sacrement, Poussin n'a vu qu'un fait historique, le baptême de Jésus
par saint Jean ; il a été impuissant à exprimer et le sens religieux et
l'idée de perpétuité qui seule fait de cette action un sacrement. Overbeck
a rejeté le baptême de Jésus parmi les sujets accessoires, et il a choisi
pour sujet principal un fait historique aussi, mais en môme temps sym-
bolique, qui exprime le sens et la valeur du sacrement du baptême dans
l'Église. Les apôtres, pleins de l'Esprit saint, puisent l'eau au vase des
grâces divines et la répandent sur toutes les nations accourues à leurs
pieds. Ils sont prêtres déjà et ils font des chrétiens.

Il en est de même pour le sujet de VEucharistie. Poussin a peint un
repas présidé par Jésus qui, en consacrant le pain et le vin, institue l'Eu-
charistie. Mais cette action caractéristique du sujet, exprimée par un
mouvement des mains du Christ, se noie dans l'ensemble, et, sauf l'au-
réole du personnage principal, rien n'indique que ce repas soit la Cène
plutôt qu'un symposium de philosophes. Il n'y a donc là qu'un tableau
d'histoire. Chez Overbeck, au contraire, le sens religieux du sujet est
tellement spécialisé, qu'il faut être chrétien pour le bien comprendre.
Jésus tient le calice, et, penché par-dessus la table dans un mouvement
d'effusion divine, il distribue aux apôtres, comme le prêtre aux fidèles,
la véritable communion, l'hostie consacrée. Les apôtres, à peine repus du
pain symbolique, échangent entre eux le baiser de paix. Sur le devant du
trbleau, Jean et Pierre à genoux s'embrassent, comme plus tard François
et Dominique, la piété tendre et la piété forte, unies du même amour par
la vertu du même sacrement. Il n'y a pas à s'y tromper, on a sous les
yeux, non pas une scène d'histoire sacrée ou profane, mais une véritable
cérémonie religieuse. Là est évidemment le triomphe cl'Overbeck. Et
jamais, on peut le dire, il n'a été si complètement lui-même que dans ce
sujet de Y Eucharistie. Une onction sainte est répandue partout. Le dessin
en est comme imprégné. Les figures forment moins un groupe qu'une
grappe, qui pyramide en fuyant par l'effet d'une ligne d'une ineffable dou-
ceur. On les dirait emportées vers le ciel sur l'aile d'une aspiration toute-
puissante. Il n'y a plus rien là de matériel : c'est un élan de l'âme qui
a pris un corps, une prière fixée sur le papier. Les arabesques et les
sujets secondaires du cadre indiquent les précédents historiques du
sacrement, l'Agneau Pascal, la Manne dans le désert, deux circon-
stances où Dieu s'est plu à nourrir son peuple; et d'autre part le miracle
des noces de Cana et le miracle de la multiplication des pains, deux
occasions aussi où Jésus a rassasié la faim et la soif. Des gerbes et des
épis de blé, une vigne chargée de fruits enlacent les médaillons et la com-
position centrale. Ainsi le sujet tout entier se trouve encadré entre les
 
Annotationen