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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 1.1859

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Nr. 6
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Lagrange, Léon: L' atelier d'Overbeck
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https://doi.org/10.11588/diglit.16986#0336

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GAZETTE DES BEAUX-A RTS.

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deux emblèmes de l'Eucharistie, le pain et le vin, les espèces sous
lesquelles l'instituteur du sacrement se livre tous les jours à ses fidèles.

Overbeck se propose de colorier ces dessins à l'aquarelle, et cle les
faire reproduire ensuite en chromo-lithographie. Certes il faut applaudir
à cet essai de procédés nouveaux, et cependant on ne peut s'empêcher de
se demander avec chagrin si l'œuvre même n'y perdra pas. En effet,
qu Overbeck peigne à l'huile ou à l'aquarelle, il peint de la même façon.
Il ne fait que couvrir le modelé d'une teinte faible, sans se préoccuper ni
de la qualité du ton, ni des jeux de la lumière. Il colorie, il ne colore
pas. Il n'ajoute pas un souffle de vie à son œuvre; bien loin de là, il
atténue la vie que le dessin lui a donnée. Or, sans parler des coloristes
proprement dits, des Vénitiens ou des Flamands, il n'est pas un peintre
qui n'ait vu dans la couleur un puissant moyen d'expression. Raphaël lui-
même s'est bien gardé de la dédaigner. Mais, nous l'avons déjà constaté,
Overbeck a craint d'approcher Raphaël de trop près. Aussi doux, aussi
suave, aussi touchant que le divin Sanzio, presque toujours plus saint,
souvent son égal par le sentiment, et quelquefois par la pensée, Overbeck
n'a osé le suivre ni jusqu'à la réalité de la forme ni jusqu'à la vérité du
ton. Il l'a abandonué à mi-chemin, de peur d'arriver avec lui à l'interpré-
tation complète de la nature. A défaut de Raphaël, que n'a-t-il au moins
cherché la coloration plus simple de ses prédécesseurs immédiats, de Pé-
rugin et de Francia? Ou, si ces peintres sont également à ses yeux entachés
de naturalisme, remontons plus haut encore dans l'histoire de l'art, remon-
tons jusqu'à Fra Angelico de Fiesole, le peintre chrétien par excellence.
Fra Angelico est-il seulement dessinateur? — Non, il est peintre. 11 des-
sine comme les anges, et il peint aussi comme les anges. Ses tableaux,
reproduits en noir par la gravure ou la lithographie perdent la moitié de
leur charme. Fra Angelico sentait la vie tout entière, et il l'a rendue tout
entière. Il l'a rendue par l'exquise délicatesse des formes qui laissent
entrevoir l'âme à travers le corps, et il l'a rendue aussi par ce rayon
coloré qui descend du ciel pour baigner ses compositions d'une lumière
si aimable et si douce.

Overbeck s'est tenu trop loin de Fra Angelico. 11 ne Fa pas assez aimé.
Aussi, dans son tableau dut' Triomphe de la .Religion, ne lui accorde-t-il
qu'une place secondaire. C'est que la préoccupation constante d'Overbeck
est de ne pas se confondre avec les Italiens. Il tient avant tout à garder
son originalité de race. Il est venu fraterniser avec Rome catholique, mais,
devant Rome artiste, il s'est en quelque sorte voilé les yeux. Il n'a pas
voulu que le génie allemand s'inclinât devant le génie italien. C'est pour-
quoi l'on retrouve en lui un peu de cette flatuosité des premiers maîtres
 
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