Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 22.1867

DOI Heft:
Nr. 1
DOI Artikel:
Lenormant, François: Le Musée du Temple de Thésée à Athènes: fragment d'un journal de voyage
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.19883#0032

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
MUSÉE DU TEMPLE DE THÉSÉE.

29

passent depuis la conception de l’enfant jusqu’au développement de la
puberté, mettent donc sans cesse en présence les images de la vie et de
la mort ; et ce spectacle doit d’autant plus agir sur l’homme qui l’observe,
que toutes ces péripéties de l’accouchement et de l’éducation se lient
d’une manière plus étroite avec la tendresse instinctive de l’homme pour
les enfants qu’il a engendrés.

De cette observation individuelle, il est tout simple que l’homme
passe à des remarques plus larges, et qu’il embrasse la nature entière
dans la contemplation des phases de la destruction et du renouvellement
des êtres. Les mêmes douleurs, les mêmes dangers qui assiègent l’homme
à sa naissance et dans son berceau, sont communs aux espèces dont l’or-
ganisation se rapproche de celle de l’homme, et les espèces entre elles
ne puisent les forces nécessaires à leur production qu’en se détruisant
mutuellement. Les animaux carnivores assouvissent leur faim avec la
chair des autres animaux ; les herbivores se contentent de détruire les
plantes ; de l’herbe qui sèche et jaunit pend la graine qui renferme une
herbe nouvelle ; le grain pourrit dans la terre et semble s’y dissoudre
avant que de germer; dans le détritus des végétaux, la reproduction des
plantes puise une force inconnue ; la mort des animaux à organisation
complète, et la dissolution qui en est la suite, produisent des résultats de
fertilité plus surprenants encore ; des cadavres putréfiés sortent des mois-
sons vigoureuses, ou même en apparence des êtres animés. L’essaim
d’abeilles qui, dans la fable d’Aristée, s’élance des flancs putrides du
taureau, est une image bien remarquable delà génération spontanée; et
il ne faut rien moins que l’intervention divine pour révéler au jeune berger
le mystère religieux de cette reproduction.

Maintenant il faut se souvenir qu’avec la doctrine de panthéisme qui
fait le fond de toutes les religions païennes, cet ensemble révolutoire de
mort et de vie, dans lequel l’homme se sent emporté, n’est point distinct
à ses yeux de la divinité elle-même. Puisque Dieu est tout et que tout
est Dieu, il est la mort et la vie, la destruction et la reproduction; il veut
la dissolution et le renouvellement des êtres; lui-même, il vit et il meurt
tour à tour. De là, pour les religions panthéistiques, une conséquence
frappante : ce grand Tout qu’on adore, c’est la vie et la mort réunies;
c’est à la fois l’être actif et la matière passive. Ainsi dans le détail des
mythes et des cérémonies de l’antiquité, la divinité occupe-t-elle tour à
tour toutes les places, tantôt semblant demander des victimes, tantôt
représentée comme une victime elle-même.

Les croyances dont j’ai essayé d’embrasser l’ensemble d’un coup d’œil
rapide ne sont pas le résultat d’une froide combinaison scientifique.
 
Annotationen