Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 22.1867

DOI Heft:
Nr. 6
DOI Artikel:
Gruyer, François-Anatole: Les Vierges de Raphael: le Songe du chevalier
DOI Seite / Zitierlink: 
https://doi.org/10.11588/diglit.19883#0610

DWork-Logo
Überblick
loading ...
Faksimile
0.5
1 cm
facsimile
Vollansicht
OCR-Volltext
LES VIERGES DE RAPHAËL.

577

Pérouse de grandes lumières se firent en lui. Cet enfant extraordinaire
s’empara des inspirations de son maître, et, sans leur rien faire perdre de
leur ravissement mystique, les éleva à une hauteur qu’aucun regard
n’avait encore mesurée. Il voua dès lors à la Vierge un culte de prédilec-
tion, et fidèle toute sa vie à la religion de son enfance, il vint à chaque
instant y retremper son âme. Ce sont les manifestations constantes et de
jour en jour plus exquises de cette dévotion, ce sont ces mystères de
grâce, qui, sans cesser cl’être naïfs, s’élèveront un jour jusqu’à la gran-
deur, que nous allons tenter d’étudier et de comprendre.

Raphaël avait puisé dans l’atmosphère où la nature et la civilisation
l’avaient fait naître le germe poétique de toutes les nobles idées. Avec l’air
fortifiant de ses belles montagnes, il avait respiré la religion, la chevalerie,
l’amour. Il ne les comprenait pas encore, mais ces puissances avaient
pris possession de son âme. Dès l’enfance, son cœur s’était ouvert de lui-
même à la ferveur, à l’héroïsme, au dévouement. Au milieu de la rudesse
d’une époque remplie de violence, tant de saints, tant de guerriers, tant
de dames illustres, avaient laissé à Urbin l’exemple de leurs vertus, la
trace de leurs actions, le parfum de leur beauté! Et par-dessus tous ces
radieux souvenirs planait, resplendissante et adorée, l’image d’une mère
confondue presque dans un même culte avec la Vierge inspiratrice de
toute vertu... Lorsque, en 1A95, Raphaël arriva à Pérouse, je me repré-
sente volontiers quelque chose de cette lumière intérieure, souveraine-
ment douce et pénétrante, rayonnant déjà de son âme à l’âme de ses
contemporains, comme elle rayonne de ses œuvres à nos âmes, et attirant
à lui tous les cœurs.

Pietro Vannucci était alors à l’apogée de sa force. Il s’était dépouillé
de la sécheresse primitive de ses formes et n’était point encore tombé dans
la routine. Il venait d’achever le tableau de la Naissance clu Christ dans
l’église Saint-Augustin à Pérouse; il s’apprêtait à peindre une de ses plus
belles fresques, dans le cloître de Sainte-Marie-Madeleine à Florence; et
bientôt, dans la Madone de la confrérie de Saint-Pierre 1, son génie
allait prendre son essor le plus haut. Le Sanzio vit donc se dérouler
dans la plénitude de leur beauté les aspirations mystiques de l’art reli-
gieux. Il aima son maître et se passionna pour ses œuvres. Les Vierges de
Pérugin excitèrent surtout en lui une vive admiration, et tout en entre-
voyant déjà, sans sortir du domaine de la foi, des horizons plus vastes

ciacca, Gerino da Pistoja, Pietro da Monte Varchi, Tiberio d’Assise, l’Espagnol Gio-
vanni (lo Spagna), Girolamo Genga d’Urbin. Il fit ses amis de Domenico di Paris Alfani
et de Gaudenzio Ferrari.

1. A Pérouse.

XXII.

73
 
Annotationen