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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
groupe que nous avons étudié. Mais les peintures dont j’ai donné
l’énumération ne sont pas les seules qui en fassent partie : il en
reste un certain nombre, pour la description desquelles je ne dispose
pas d'assez de place1, et d’autres encore — des portraits — dont je
n’ai pas voulu parler jusqu’à présent.
Gomme la plupart des sujets sacrés et légendaires du même
groupe, ces portraits sont généralement attribués à Botticelli, à
Ghirlandajo ou à Filippino. Ils ont peu de chose en commun avec
ce dernier et sont inférieurs aux portraits de Botticelli, autant par le
sentiment que par l’exécution.
Le premier en date est la figure de femme, vue à mi-corps,
connue sous le nom de Esmeralda Bandinelli, qui appartient à
M. Constantin Ionidès, de Brighton. Elle est entièrement de face,
debout dans une salle étroite ; ses cheveux sont crêpés et bouffent
sur les tempes ; sa main droite touche un pilier, sa main gauche est
appuyée sur son côté droit. Bien qu’attribuée à Botticelli, cette œuvre
très caractéristique est de notre anonyme et date de l’époque où il
travaillait sous l’influence de Sandro : cela est établi par chaque
détail de la peinture. Le dessin et le modelé sont exactement ceux
de la Madone de Mme Austen; la bouche et le nez, les yeux mêmes ont
l’indécision particulière qui nous est maintenant bien connue. Les
perspectives sont à pente brusque — notez le dessin défectueux de
la base du chapiteau — et la lumière ruisselle à travers l’ouverture.
Les plis des draperies sont, pour ainsi dire, mousseux ; la tonalité
est blonde, la chevelure couleur d’ambre et les chairs dorées. Enfin,
il est tout à fait incontestable que c’est bien une œuvre de notre
anonyme, datant de 1476 ou à peu près.
C’est deux ou trois ans plus tard qu’il doit avoir peint le por-
trait en buste, bien connu, de Julien de Médicis, dans la collection
Morelli à Bergame (n° 83). Ici encore, tout rappelle notre anonyme :
le dessin, le modelé, la perspective, la couleur et la qualité — si
inférieure à celle de Sandro 2. C’est même inférieur, n’ayant proba-
blement pas été peint d’après nature, à ce que notre peintre exécutait
à ses bons moments — certainement bien inférieur à Foeuvrc
1. Voir, dans ma seconde édition des Peintres florentins, actuellement sous
presse, une liste des peintures appartenant à ce groupe, sous la rubrique Amico
di Sandro.
2. Morelli le croyait un Botticelli authentique. Par un mélange de docilité et
de négligence, j’ai aussi énuméré ce portrait parmi ceux de Botticelli, dans mon
livre sur les Peintres florentins.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
groupe que nous avons étudié. Mais les peintures dont j’ai donné
l’énumération ne sont pas les seules qui en fassent partie : il en
reste un certain nombre, pour la description desquelles je ne dispose
pas d'assez de place1, et d’autres encore — des portraits — dont je
n’ai pas voulu parler jusqu’à présent.
Gomme la plupart des sujets sacrés et légendaires du même
groupe, ces portraits sont généralement attribués à Botticelli, à
Ghirlandajo ou à Filippino. Ils ont peu de chose en commun avec
ce dernier et sont inférieurs aux portraits de Botticelli, autant par le
sentiment que par l’exécution.
Le premier en date est la figure de femme, vue à mi-corps,
connue sous le nom de Esmeralda Bandinelli, qui appartient à
M. Constantin Ionidès, de Brighton. Elle est entièrement de face,
debout dans une salle étroite ; ses cheveux sont crêpés et bouffent
sur les tempes ; sa main droite touche un pilier, sa main gauche est
appuyée sur son côté droit. Bien qu’attribuée à Botticelli, cette œuvre
très caractéristique est de notre anonyme et date de l’époque où il
travaillait sous l’influence de Sandro : cela est établi par chaque
détail de la peinture. Le dessin et le modelé sont exactement ceux
de la Madone de Mme Austen; la bouche et le nez, les yeux mêmes ont
l’indécision particulière qui nous est maintenant bien connue. Les
perspectives sont à pente brusque — notez le dessin défectueux de
la base du chapiteau — et la lumière ruisselle à travers l’ouverture.
Les plis des draperies sont, pour ainsi dire, mousseux ; la tonalité
est blonde, la chevelure couleur d’ambre et les chairs dorées. Enfin,
il est tout à fait incontestable que c’est bien une œuvre de notre
anonyme, datant de 1476 ou à peu près.
C’est deux ou trois ans plus tard qu’il doit avoir peint le por-
trait en buste, bien connu, de Julien de Médicis, dans la collection
Morelli à Bergame (n° 83). Ici encore, tout rappelle notre anonyme :
le dessin, le modelé, la perspective, la couleur et la qualité — si
inférieure à celle de Sandro 2. C’est même inférieur, n’ayant proba-
blement pas été peint d’après nature, à ce que notre peintre exécutait
à ses bons moments — certainement bien inférieur à Foeuvrc
1. Voir, dans ma seconde édition des Peintres florentins, actuellement sous
presse, une liste des peintures appartenant à ce groupe, sous la rubrique Amico
di Sandro.
2. Morelli le croyait un Botticelli authentique. Par un mélange de docilité et
de négligence, j’ai aussi énuméré ce portrait parmi ceux de Botticelli, dans mon
livre sur les Peintres florentins.