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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
que nihil — qu’une simple mention nous a transmis. Filippino,
— on l’a toujours admis comme chose certaine — était l’élève de
Botticelli. Je ne veux pas discuter l’entière vérité de cette assertion;
mais Botticelli, à lui seul, ne peut expliquer Filippino, ni ses drape-
ries, ni ses types, ni la tendance au ton d’or bruni de son coloris.
C’est parce qu’il existe actuellement une certaine ressemblance, sous
tous ces rapports, entre ses œuvres et les dernières peintures d’Amico,
qu’un si grand nombre de celles-ci ont été confondues avec les
œuvres de Filippino ou de ses élèves. Quelques-unes indiquent l’affai-
blissement des facultés de l’auteur, et pour cette seule raison on a
déclaré, comme pour la Madone de Berlin, qu’elles sont les dernières
productions de Filippino ou même de son école. Nous avons vu cepen-
dant que si elles étaient, si peu que ce soit, l’œuvre de Filippino,
on devrait les regarder comme des essais juvéniles. Mais nous avons
évité cette absurdité en nous assurant qu’elles proviennent d'un
artiste tout à fait distinct, d’un peintre qui développait son style
assez rapidement, mais pourtant par degrés. Et, en dépit des res-
semblances existant entre Filippino et Amico, leur but était diffé-
rent : au fond, Filippino était un artiste appliqué, académique
presque, avec une tendance très marquée à ce que les Italiens
appellent le seicentismo, — de la sentimentalité unie à la bizarrerie
de la forme. Il n’y a rien de tout cela dans Amico, qui, sérieux ou
gai, est un quattrocentiste, toujours un quattrocentiste, sans rien qui
fasse présentir, même de loin, ni le Sodoma, ni les Bolonais de la
décadence.
Pour expliquer la ressemblance entre Amico et Filippino, je
suppose que ce dernier, dans les plus jeunes et les plus impression-
nables années de sa carrière, s’est trouvé fortement influencé par le
premier. Les fresques du Carminé, qui nous restent de cette époque
de la vie de Filippino, en fournissent une bonne preuve, ainsi que la
Madone aux Anges, de la galerie Corsini à Florence, et Y Annon-
ciation de Naples. Les fresques nous rappellent Amico, parfois dans
les types, plus souvent dans les draperies, et, très sensiblement,
dans l’architecture et les ouvertures figurées en perspective. Quant
au tableau de Corsini, par la couleur, par certains plis et deux ou
trois personnages, il rappelle tellement Amico que je me suis
demandé, pendant des années, s’il était de lui ou de Filippino ; je n’ai
pu me décider en faveur de ce dernier qu’après avoir nettement
défini la personnalité du premier. Le type de la Madone est presque
verrochiesque, et tel que vous n’en rencontrez jamais chez Filip-
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que nihil — qu’une simple mention nous a transmis. Filippino,
— on l’a toujours admis comme chose certaine — était l’élève de
Botticelli. Je ne veux pas discuter l’entière vérité de cette assertion;
mais Botticelli, à lui seul, ne peut expliquer Filippino, ni ses drape-
ries, ni ses types, ni la tendance au ton d’or bruni de son coloris.
C’est parce qu’il existe actuellement une certaine ressemblance, sous
tous ces rapports, entre ses œuvres et les dernières peintures d’Amico,
qu’un si grand nombre de celles-ci ont été confondues avec les
œuvres de Filippino ou de ses élèves. Quelques-unes indiquent l’affai-
blissement des facultés de l’auteur, et pour cette seule raison on a
déclaré, comme pour la Madone de Berlin, qu’elles sont les dernières
productions de Filippino ou même de son école. Nous avons vu cepen-
dant que si elles étaient, si peu que ce soit, l’œuvre de Filippino,
on devrait les regarder comme des essais juvéniles. Mais nous avons
évité cette absurdité en nous assurant qu’elles proviennent d'un
artiste tout à fait distinct, d’un peintre qui développait son style
assez rapidement, mais pourtant par degrés. Et, en dépit des res-
semblances existant entre Filippino et Amico, leur but était diffé-
rent : au fond, Filippino était un artiste appliqué, académique
presque, avec une tendance très marquée à ce que les Italiens
appellent le seicentismo, — de la sentimentalité unie à la bizarrerie
de la forme. Il n’y a rien de tout cela dans Amico, qui, sérieux ou
gai, est un quattrocentiste, toujours un quattrocentiste, sans rien qui
fasse présentir, même de loin, ni le Sodoma, ni les Bolonais de la
décadence.
Pour expliquer la ressemblance entre Amico et Filippino, je
suppose que ce dernier, dans les plus jeunes et les plus impression-
nables années de sa carrière, s’est trouvé fortement influencé par le
premier. Les fresques du Carminé, qui nous restent de cette époque
de la vie de Filippino, en fournissent une bonne preuve, ainsi que la
Madone aux Anges, de la galerie Corsini à Florence, et Y Annon-
ciation de Naples. Les fresques nous rappellent Amico, parfois dans
les types, plus souvent dans les draperies, et, très sensiblement,
dans l’architecture et les ouvertures figurées en perspective. Quant
au tableau de Corsini, par la couleur, par certains plis et deux ou
trois personnages, il rappelle tellement Amico que je me suis
demandé, pendant des années, s’il était de lui ou de Filippino ; je n’ai
pu me décider en faveur de ce dernier qu’après avoir nettement
défini la personnalité du premier. Le type de la Madone est presque
verrochiesque, et tel que vous n’en rencontrez jamais chez Filip-