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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 22.1899

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Nr. 2
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Desjardins, Paul: Les salons de 1899, 4, Peinture
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https://doi.org/10.11588/diglit.24686#0160

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LES SALONS DE 1899

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dans la traduction des diversités individuelles une application plus
dévote, une main si dégagée de toute habitude, un esprit si vacant
de toute théorie ou généralité. Il crut fermement qu’une forme de
nez ou d’oreille, rencontrée une fois chez un particulier qui bientôt
disparaîtra pour jamais, vaut d’être sauvée du néant. Il distingua le
père du fils, les frères l’un de l’autre, un personnage de lui-même à
dix ans d’intervalle. Il ne fit point de catégories de gens. A chaque
fois qu’il observait un modèle., il effaçait de son imagination tous
les autres. Cela est prodigieux. Ainsi devrait faire toujours, selon
ses moyens, le bon peintre de portraits. Mais pour cela il faut un
regard qui se pose tranquillement sur les objets, de la patience et
aussi peu d’infatuation que possible, toutes conditions qui sont fort
rares.

M. Dagnan-Bouveret garde aujourd’hui cette tradition des
observateurs studieux d’autrefois. Il a l’œil perçant, fureteur, qui
retient tout le détail et n’en laisse échapper que ce qu'il veut, par
une simplification choisie. Son outil est diligent et toujours maître
de soi. A ceux qui voudraient savoir ce qu’un simple contour à la
mine de plomb peut prendre de puissance pliysionomique, je con-
seille de s’arrêter devant la Lecture de la lettre, dont s’est enrichi
naguère le Luxembourg. Mais depuis quelques années M. Dagnan a
tourné sa recherche vers les effets lumineux ; il a, en même temps,
détendu son dessin, jusque-là écrit d’une main un peu contractée et
sèche. Visiblement, il a tenté d’équilibrer ses facultés, de compléter
son éducation du côté où sa nature était moins portée. Car il est né
dessinateur, c’est là sa maîtrise propre. Rien n’est plus digne de
respect que cet effort, chez un maître établi dans l’admiration, pour
s’ajouter des énergies nouvelles, de façon à ne rien négliger dans son
art. Et cependant,, quelques-uns (dont je suis), tout en admirant ses
compositions de grande envergure et ses essais d’illumination rare,
continuent de priser surtout les petits panneaux serrés où il traça
des figures individuelles observées de très près, en rival de Bastion
Lepage, en continuateur du grand Ilolbcin et de M Ingres. C’étaient
là choses faites pour la durée. Ainsi, dans l’œuvre littéraire de Mau-
passant, après avoir rendu hommage à l’élargissement classique et
tempéré de Pierre et Jean ou de Fort comme la mort, on revient aux
premières nouvelles^ burinées dans la matière dure avec l’entête-
ment d’un travailleur qui s’est mis des œillères et ne veut rien
donner que de sien.

Cette année, M. Dagnan expose seulement un portrait, que
 
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