DOI Heft:
Nr. 5
DOI Artikel:Bertaux, Émile: Autour de Donatello, 2: une nouvelle histoire de la sculpture florentine
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GAZETTE DES BEAUX-ARTS
d’admiration que l’autorité ecclésiastique, scandalisée de cette ido-
lâtrie, fit rendre le chef-d’œuvre à la terre. Ainsi, cet Hermaphrodite
qu’on découvrit à Rome, vers 1410, « dans la 440° Olympiade », et
(( dont le langage humain était impuissant à exprimer la beauté ».
Pour Donatello, on sait, par les savantes études de M. Müntz,
comment le sculpteur des Médicis, honoré à la fois comme un émule
et comme un connaisseur érudit de l'art antique, par des humanistes
tels que Flavio Biondo et Cyriaque d’Ancône, fut « le créateur des
Musées florentins1 ». Un annaliste du xve siècle se déclare prêt à
compter le maître parmi les anciens2. Nous n’avons donc pas à
établir que Donatello a connu l’antiquité, mais, pour achever de
discuter la thèse de M. Reymond, nous devons rechercher plus
minutieusement qu’on ne l’a fait jusqu’ici les voies par lesquelles
Donatello a reçu cette révélation, et déterminer, par une analyse
exacte, l’influence qu’elle a exercée sur le développement de son
œuvre.
Rome était, à l’aube du xv° siècle, la mine à peine ouverte des
médailles, des camées et des statues, où les artistes de la Toscane
se donnaient rendez-vous avec les premiers antiquaires, pour y
chercher, les uns des modèles, les autres des trésors. D’après Vasari,
Donatello aurait, dès 1403, accompagné son ami Rrunclleschi dans
le pèlerinage d’artiste que le grand architecte fit à la ville des empe-
reurs avant le retour des papes. M. Reymond a cru pouvoir faire
bon marché de l’autorité de Vasari et révoquer en doute ce premier
voyage. C’était oublier que le biographe s’est borné, ici, à répéter
le dire d’un chroniqueur du xvc siècle, Antonio di Tuccio Manetti,
dont M. Reymond lui-même, en discutant la date d’une œuvre de
Brunelleschi, invoque le témoignage contre Vasari3. Manetti, qui a
vécu dans l’intimité des grands artistes florentins de son temps,
rapporte expressément que Brunelleschi eut à ses côtés, pendant son
séjour à Rome, le sculpteur Donatello4. Je ne vois pas quelle raison
pourrait prévaloir contre ce texte.
1. E. Müntz. Les Précurseurs de la Renaissance, 1882, p. 58.
2. « Da essere numerato fra gli antichi » (publié par M. G. von Fabriczy, Bru-
nelleschi, p. 493).
3. Les Sculpteurs florentins. Première moitié du xve siècle, p. 73.
4. E. Müntz, Histoire de l'Art pendant la Renaissance. Les Primitifs, p. 518,
note.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
d’admiration que l’autorité ecclésiastique, scandalisée de cette ido-
lâtrie, fit rendre le chef-d’œuvre à la terre. Ainsi, cet Hermaphrodite
qu’on découvrit à Rome, vers 1410, « dans la 440° Olympiade », et
(( dont le langage humain était impuissant à exprimer la beauté ».
Pour Donatello, on sait, par les savantes études de M. Müntz,
comment le sculpteur des Médicis, honoré à la fois comme un émule
et comme un connaisseur érudit de l'art antique, par des humanistes
tels que Flavio Biondo et Cyriaque d’Ancône, fut « le créateur des
Musées florentins1 ». Un annaliste du xve siècle se déclare prêt à
compter le maître parmi les anciens2. Nous n’avons donc pas à
établir que Donatello a connu l’antiquité, mais, pour achever de
discuter la thèse de M. Reymond, nous devons rechercher plus
minutieusement qu’on ne l’a fait jusqu’ici les voies par lesquelles
Donatello a reçu cette révélation, et déterminer, par une analyse
exacte, l’influence qu’elle a exercée sur le développement de son
œuvre.
Rome était, à l’aube du xv° siècle, la mine à peine ouverte des
médailles, des camées et des statues, où les artistes de la Toscane
se donnaient rendez-vous avec les premiers antiquaires, pour y
chercher, les uns des modèles, les autres des trésors. D’après Vasari,
Donatello aurait, dès 1403, accompagné son ami Rrunclleschi dans
le pèlerinage d’artiste que le grand architecte fit à la ville des empe-
reurs avant le retour des papes. M. Reymond a cru pouvoir faire
bon marché de l’autorité de Vasari et révoquer en doute ce premier
voyage. C’était oublier que le biographe s’est borné, ici, à répéter
le dire d’un chroniqueur du xvc siècle, Antonio di Tuccio Manetti,
dont M. Reymond lui-même, en discutant la date d’une œuvre de
Brunelleschi, invoque le témoignage contre Vasari3. Manetti, qui a
vécu dans l’intimité des grands artistes florentins de son temps,
rapporte expressément que Brunelleschi eut à ses côtés, pendant son
séjour à Rome, le sculpteur Donatello4. Je ne vois pas quelle raison
pourrait prévaloir contre ce texte.
1. E. Müntz. Les Précurseurs de la Renaissance, 1882, p. 58.
2. « Da essere numerato fra gli antichi » (publié par M. G. von Fabriczy, Bru-
nelleschi, p. 493).
3. Les Sculpteurs florentins. Première moitié du xve siècle, p. 73.
4. E. Müntz, Histoire de l'Art pendant la Renaissance. Les Primitifs, p. 518,
note.