Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (3. Pér. 22.1899)

GUSTAVE MOREAU

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et fleuris, respire une intangible apathie. Mais toute la signification
du thème est dévolue à la figure du pauvre cyclope ; en lui gît l’ex-
pression philosophique et sentimentale. Moreau chercha longtemps,
comme on le voit par les essais conservés à son musée, le caractère
qu’il convenait de lui donner pour ne point faire du paria cet
ogre impie que Y Odyssée bafoue. Le corps disparut : il ne resta plus

VARIANTE DE LA « GALATÉE »
Aquarelle, par Gustave Moreau.

qu’une tête, colossale par rapporta la Néréide, mais vénérable, sous
les pampres qui la coiffent, comme une divinité chtonienne. L’œil
unique ne surprend pas en ce visage rustique et grave, et le regard
qu’il émet vers la délicate ondine est chargé de je ne sais quelle
mélancolie fruste, accentuée par la timidité, la gaucherie d’une
main formidable, crispée à de grands blocs. Ce masque et cette main
disent à merveille la taille anormale de l’être, et il n’en faut pas
plus pour émouvoir une discrète sympathie.

Avec quel ravissement l’artiste a composé le décor d’un roman