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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 39.1908

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Bénédite, Léonce: J.-J. Henner, 5: artistes contemporains
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https://doi.org/10.11588/diglit.24866#0043

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36

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

longtemps que le charme a été rompu. Il semble même que cette
crise morale puisse remonter à peu près au lendemain de 1870.
A cette date des débouchés inespérés s’étaient inopinément ouverts
en Amérique aux productions de notre école. La Fortune secouait
sa corne dans les ateliers. Les jeunes pupilles de la rue Bonaparte
étaient plus pressés de cueillir les lauriers symboliques des Salons
que d’aller s’isoler derrière les réalités ombreuses et parfumées de
ceux du Bosco. Ils y trouvaient des avantages plus immédiats ou
plus tangibles. Depuis, des causes différentes ont produit les mêmes
effets. Pour comprendre le prestige exercé par l’Italie sur l’imagi-
nation des artistes, il faut avoir connu les représentants de ces
anciennes générations; il faut les avoir vus magiquement rajeunis à
l’évocation de ces souvenirs. Tel directeur, rappelé, ne voulut-il
point retourner mourir à Rome ? Tel autre s’est-il consolé de n’y
pouvoir finir ses jours? Il faut avoir été naguère témoin de la joie
d’enfant manifestée, lorsqu’il fut nommé, par celui qui préside
aujourd’hui aux travaux de l’Académie. Cet enthousiasme, d’ailleurs,
n’était pas exclusif aux peintres de notre école. Il était partagé par
les artistes des autres écoles du Nord, Anglais et Allemands, Alle-
mands surtout, qui affluaient à Rome avec leurs chapeaux pointus
et leurs longs cheveux, tels que les dépeint Henner qui les fréquente
quelquefois et raconte leur cordialité avec leur bel appétit. C’est ce
qui explique ce mouvement très marqué d’italianisme que, sous des
formes différentes, subissent également ces écoles diverses au milieu
du xixc siècle.

Pour sa part, Henner ne parlait de l’Italie qu’avec un accent
particulier d’émotion dans la voix. Elle fut pour lui vraiment comme
une seconde patrie, de même qu’il s’y découvrit, sinon comme un
autre homme, du moins comme un autre artiste. 11 y procéda à sa
métamorphose définitive.

Avec quelle joie il met le pied dans la Ville sainte! Il y débarque
dans les premiers jours de janvier 1859, après avoir pris le
chemin des écoliers. Car il s’y est pour ainsi dire préparé en par-
courant lentement la Provence et le Nord de l’Italie. Il a visité
successivement Vienne, Orange, Avignon, Nîmes et Arles. Phéno-
mène curieux! Ce paysan d’Alsace se devine tout à coup une nature
de véritable méridional. Ce qui le frappe bien plus que tous les
monuments, ce sont les bords du fleuve. « Le midi de la France »,
écrit-il, « est un pays admirable, créé, dirait-on, exprès pour inspirer
les artistes... Pas de volets verts aux maisons, pas de couleurs roses
 
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