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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 39.1908

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Nr. 1
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Bénédite, Léonce: J.-J. Henner, 5: artistes contemporains
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https://doi.org/10.11588/diglit.24866#0066

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

sous sa plume, marquant déjà son orientation définitive, encore
obscure pour lui-même, et Rome semble répondre à tout son idéal
latent de beauté. C'est dans un square de Rome, près de la Villa,
qu’il rencontre le modèle qui lui servira à faire sa tête d’expression,
aujourd’hui au musée de Colmar. C’est une simple bonne d’enfants,
mais « elle a une tête à faire un chef-d’œuvre; elle est construite
pour servir de modèle à Raphaël », bien qu’elle soit même marquée
« de la petite vérole ». Loin de la gâter, Henner trouve que cela
lui donne « un ton assez vigoureux », qui met « encore plus de carac-
tère à sa tète ».

Il veut donc à tout prix faire quelque belle figure de femme.
(Test ce qu’il exprime dans son italien d occasion à GoutzwiMer
en mai 1861 : « Ora voglio applicarmi a fare qnalche sludie di donne
belle e spero drame un grande profitto. » Il est justement en train
défaire une tête d’après « una bellissima Romana abitante del quar-
tiere dei Monti » qui, comme le Trastevere, a conservé « il piu bello
tipo dei anticati romani ». C’est, semble-t-il, la fameuse bonne
d’enfants qui a renoncé à sa première vocation et est devenue modèle.
Henner déclare qu’il a beaucoup de difficultés à peindre cette tête, cl
il en trouve une très originale raison. Il rappelle un mot de David,
qui, faisant allusion à la difformité de son visage, disait : « Nous
avons plus de difficulté que les autres à faire beau. » Et il établit
qu’un peintre ou un sculpteur fait toujours dans sa nature, se
demandant avec une modestie plus ou moins sincère si ce n’est
pas pour cela que son C/iri.st, qui, nous le savons, fut assez discuté,
n’est pas suffisamment beau.

Aussi, bientôt n’aima-t-il plus à peindre des hommes. Obligé de
choisir un sujet pour son prochain envoi, il expose son incertitude
à son maître; mais il y a une chose certaine, c’est qu’il ne fera pas
un homme. U ne veut pas des héros grecs ou romains, « ce n’est pas
son goût », ni d’un saint quelconque : « Une sainte, à la bonne
heure! » Il pense à une figure nue, et déjà nous voyons poindre la
Suzanne. Aussi, peut-on dire, entre la réalité et le rêve des maîtres,
c’est à Rome que Henner eut la révélation de la beauté de la femme,
et qu’à dater de ce jour son œuvre lui est presque exclusivement
dédié.

L É 0 X C E B É N É D I T E

(La suite prochainement.)
 
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