GAZETTE DES BEAUX-ARTS
moins près, si l’on veut, — des œuvres du Maître de Notre-Dame des
Sept Douleurs.
Encore deux ouvrages qui devront quitter la salle des Primitifs
allemands; l’un est la Crucifixion (n° 1088), prêtée par Mrs. J.-H.
Green, tableau flamand d’exécution, qui, par le type de ses ligures,
se rattache directement à l’école de Josse van Clève le Vieux; l’au-
tre, un Portrait d'homme (n° 947), prêté par M. Wynn Ellis comme
une production de l’école flamande, mais, en réalité, œuvre incon-
testablement française. Nous croyons même pouvoir en nommer
l’auteur, peut-être à la grande surprise de quelques-uns. Corneille
de Lyon, aujourd’hui bien connu dans la moyenne de ses ouvrages,
n’est pas sans s’être permis quelques écarts. Sa manière ordinaire
était libre, spontanée, prime-sautière ; elle joignait à un véritable
sentiment de nature une part de convention dans le dessin des yeux,
des sourcils, etc., et les mains étaient pour lui un de ces accessoires
sans importance que l’on indique sommairement. Or, les écarts qu’il
s’est permis ici et qui empêchaient presque de le reconnaître ont con-
sisté précisément à vouloir parfois corriger ce qu’il y avait d’un peu
conventionnel dans sa manière, à serrer de près la physionomie de
son modèle. Ajoutez à cela que, voulant faire de son mieux, il a
donné à certains portraits des proportions plus grandes qu’à l’ordi-
naire. Résultat presque inévitable : le mieux a été l’ennemi du bien;
la préoccupation d’un dessin plus soigné et plus sage a refroidi la
verve de l’artiste ; elle a ôté à son coloris, dans une certaine mesure,
la transparence et la fraîcheur qui en étaient d’ordinaire le charme
principal. Nous avions déjà remarqué ce manque relatif de sponta-
néité dans un très beau portrait du musée d’Avignon, qui supporte
néanmoins assez mal son attribution actuelle à Hobbein. Celui de
la National Gallery, remarquable encore, la supporterait moins. Il
ressemble presque autant à l’œuvre d’un excellent élève qu’à celle
du maître lui-même. Tel quel, il doit passer dans la petite salle de
l’école française, où, en somme, il ne fera pas mauvaise figure sous
le nom de Corneille de Lyon.
Les corrections proposées, — disons-le une fois de plus en termi-
nant cette étude, — ne prétendent nuire en rien à la bonne renom-
mée d’un catalogue qui, tout compte fait, n’est pas de qualité infé-
rieure, comparé à ceux de la plupart des grands musées. Il n’existe,,
en tout cas, aucun catalogue qui ne contienne des erreurs.
E. DURAND-GRE V1 LEE
moins près, si l’on veut, — des œuvres du Maître de Notre-Dame des
Sept Douleurs.
Encore deux ouvrages qui devront quitter la salle des Primitifs
allemands; l’un est la Crucifixion (n° 1088), prêtée par Mrs. J.-H.
Green, tableau flamand d’exécution, qui, par le type de ses ligures,
se rattache directement à l’école de Josse van Clève le Vieux; l’au-
tre, un Portrait d'homme (n° 947), prêté par M. Wynn Ellis comme
une production de l’école flamande, mais, en réalité, œuvre incon-
testablement française. Nous croyons même pouvoir en nommer
l’auteur, peut-être à la grande surprise de quelques-uns. Corneille
de Lyon, aujourd’hui bien connu dans la moyenne de ses ouvrages,
n’est pas sans s’être permis quelques écarts. Sa manière ordinaire
était libre, spontanée, prime-sautière ; elle joignait à un véritable
sentiment de nature une part de convention dans le dessin des yeux,
des sourcils, etc., et les mains étaient pour lui un de ces accessoires
sans importance que l’on indique sommairement. Or, les écarts qu’il
s’est permis ici et qui empêchaient presque de le reconnaître ont con-
sisté précisément à vouloir parfois corriger ce qu’il y avait d’un peu
conventionnel dans sa manière, à serrer de près la physionomie de
son modèle. Ajoutez à cela que, voulant faire de son mieux, il a
donné à certains portraits des proportions plus grandes qu’à l’ordi-
naire. Résultat presque inévitable : le mieux a été l’ennemi du bien;
la préoccupation d’un dessin plus soigné et plus sage a refroidi la
verve de l’artiste ; elle a ôté à son coloris, dans une certaine mesure,
la transparence et la fraîcheur qui en étaient d’ordinaire le charme
principal. Nous avions déjà remarqué ce manque relatif de sponta-
néité dans un très beau portrait du musée d’Avignon, qui supporte
néanmoins assez mal son attribution actuelle à Hobbein. Celui de
la National Gallery, remarquable encore, la supporterait moins. Il
ressemble presque autant à l’œuvre d’un excellent élève qu’à celle
du maître lui-même. Tel quel, il doit passer dans la petite salle de
l’école française, où, en somme, il ne fera pas mauvaise figure sous
le nom de Corneille de Lyon.
Les corrections proposées, — disons-le une fois de plus en termi-
nant cette étude, — ne prétendent nuire en rien à la bonne renom-
mée d’un catalogue qui, tout compte fait, n’est pas de qualité infé-
rieure, comparé à ceux de la plupart des grands musées. Il n’existe,,
en tout cas, aucun catalogue qui ne contienne des erreurs.
E. DURAND-GRE V1 LEE