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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 39.1908

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Nr. 2
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Roche, Denis: Nicolas Rœhrich: artistes contemporains
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https://doi.org/10.11588/diglit.24866#0159

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144

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

Ténichév à Talachkino. Aux théories propres des artistes russes
était venu s’adjoindre et s’amalgamer, bien entendu, quelque chose
des théories préraphaélites et des protestations ruskiniennes, et sou-
dain l’art populaire comme hase rationnelle de l’art russe se trouva
fort en vogue. Avec ampleur et magnanimité on se mit à faire fi de
la « science occidentale », du fini académique, du « poli irrépro-
chable » ; on leur préféra à l’improviste la rudesse, la gaucherie,
voire l'humilité nationales, en raison delà saveur qu’elles donnaient
ou devaient donner. Au total, au bout de vingt ans, la formule-pro-
gramme première : sujets russes, se trouvait complétée par ce terme
ou amendement nouveau que chacun adopta, selon son tempéra-
ment, avec intransigeance ou éclectisme : par des moyens russes.

En de pareils débats d’école, tout dépend de ce qu’on entend par
national; tout dépendait, en l’espèce, de ce que chacun entendrait
par « russe ». C’est sur ce point que M. Rœhrich allait faire preuve
d’une originalité certaine. Il la dut pour quelque chose à son lieu
de naissance et peut-être à l’effet de vieux atavismes suédois. Né
dans le gouvernement de Saint-Pétersbourg et prêchant pour ses
saints comme on fait toujours (assurément quant à lui de la meil-
leure bonne foi du monde), il ne tendit à rien moins qu’à déplacer
le centre de ce qui avait été tenu pour « russe ». Ce centre, que
M. Yasnétsov, né cependant très au nord de la Russie (mais qui y
séjourna peu) avait trouvé et voulu fixer surtout à Moscou, un
Moscou enrichi, au contact des grands-ducs et des tsars, de conquêtes
artistiques byzantines, kiéviennes et italo-lombardes, M. Rœhrich
fut un de ceux qui, de façon très paradoxale au premier abord, le
reportèrent violemment vers le Nord. Ce fut lui qui l’y reporta le plus
pleinement et avec le plus de suite.

Il semble qu’on puisse, pour la facilité de l’exposition, traduire
ainsi — en les exagérant sans doute et les privant de toutes
nuances — ses manières de sentir, ses raisonnements ou ses préceptes
plus ou moins exprimés. Assurément, devait-il convenir, Moscou et
son effort artistique sont russes, — mais non pas russes sans
mélange. Les exigences des patriarches et des tsars en ont adultéré,
« forcé » les productions. La production russe la plus autochtone, la
plus vraie, est née par delà les forêts, dans les espaces reculés et
perdus, — pour ainsi dire en vase clos, — là où se réfugièrent, à
l'abri des vexations administratives ou des persécutions religieuses,
ceux de nos compatriotes les plus attachés à leurs sentiments ou à
leurs idées. Livrés à eux-mêmes, reproduisant les modèles tradi-
 
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