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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 39.1908

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Nr. 3
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Bénédite, Léonce: J.-J. Henner, [6]: artistes contemporains
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https://doi.org/10.11588/diglit.24866#0283

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J -J. HENNER

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du Gucrchin, assise sur la margelle de la fontaine, de profil à droite :
dans l’un, s’essuyant les pieds comme dans la peinture du maître;
dans l’autre, se peignant les cheveux, mais avec la même position
du corps.

Au milieu des innombrables combinaisons que suscite à son
imagination, de nature peu inventive mais vivement impression-
nable, l’allégorie de Y Amour du Titien, la Suzanne trouve sa place.
Sa pensée semble d’abord évoluer de préférence entre ces deux
thèmes, mais en les tournant et en les retournant, pour aboutir
à l’attitude originale à laquelle il s’est arrêté.

L’album dont nous venons de parler nous renseigne aussi très
utilement sur son souci de la forme, et sur l’action exercée près de
lui par le goût antique et la pratique de Raphaël. Le charme de ces
croquis, qui parfois ne sont que de simples schémas, ne peut s’expli-
quer. Tout ce qu’on peut obtenir de mélodieux par le juste sentiment
des rapports de chaque partie de l’architecture du corps, par le
déplacement de l’équilibre ou la flexion des lignes, se trouve sensible
ici, comme dans ces décorations de Pompéi que ces exquis griffon-
nages rappellent. Les uns sont plus proches de la réalité, les autres
de la pensée : la forme est pleine, ronde, abondante; Rome,
Parme et Venise y ont eu leur part. 11 y a là surtout, au milieu de
tous les croquis, un dessin vraiment remarquable par la dignité de
son style. C’est très peu de chose, si l’on veut, et, toutefois, c’est d’un
maître, et d’un maître des plus sensibles au rythme le plus pur du
dessin. La jeune femme, vue de dos, se penche à gauche, la jambe
gauche repliée, le pied posé sur la margelle de la piscine sur laquelle
s’appuie son bras gauche. Sa chevelure pendante cache son visage.
Le bras, avancé, découvre le petit sein, du contour le plus charmant.
La ligne du dos, des reins, de la petite croupe ronde, des jambes,
tout cela est mélodieusement jeune et pur. On pense aux beaux
dessins de Raphaël. L’un des plus exquis compréhensifs de la forme
dans les temps modernes est déjà là tout entier. On devine quel
rêve sensiblement ému de la beauté est éveillé sous ce front têtu
et carré, volontaire et sentimental, de paysan alsacien.

Et l’œuvre définitive n’a pas démenti les promesses du croquis.
La Baigneuse couchée n’était encore qu’une étude, un portrait de nu
scrupuleux et charmant. La Suzanne, aussi, est prise sur la nature,
sur cette Rettola ou Tola, semble-t-il, « extrêmement belle fille, nature
large et bien construite » dont il espère « faire quelque chose », et
dont nous voyons le portrait, à plusieurs reprises, souligné de son
 
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