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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 9.1913

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Nr. 2
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Dorbec, Prosper: L' œuvre de Théodore Rousseau aux salons, de 1849 à 1867
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https://doi.org/10.11588/diglit.24886#0135

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L’OEUVRE DE TH. ROUSSEAU AUX SALONS

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saient les regards superficiels, décelait à qui s’en approchait une
fermeté extraordinaire dans le rendu de tous les détails. Il avait
procédé par petites touches minutieusement attentives qui, de près,
faisaient de ce morceau de peinture comme un patient travail au
petit point; en sorte que c’était, comme parvenue à son accomplisse-
ment, la prophétie du peintre Delaberge, le défunt compagnon des
jeunes années : « Vous verrez plus tard, quand le démon de l’ana-
lyse s’emparera de vous, comme il est bon d'aller du petit au grand,
de grandir en se rapetissant... » il y eut à peine deux esprits qui s’avi-
sèrent de l’intérêt de ce tableau si décrié : ce furent Zacharie Astruc
dans ses Quatorze stations du Salon, où l'humour se jouait parmi les
réflexions les plus fines et les plus justifiées, et Ernest Chesneau, que
nous retrouverons, car Rousseau eut en lui un des rares observateurs
qui n’aient pas été réfractaires à ces tentatives finales de sa carrière.

Dans le célèbre Chêne de roche, exposé en 1861 ‘, c’était encore un
immobile et implacable été qui se découvrait, perçait au fond du
tableau à travers d’épais et verts branchages, au-dessus de
masses de grès et des plus sèches végétations. L’œuvre, cette fois,
avait été portée aux dimensions plus imposantes de 0m85 de haut
sur 1rn 18 de large. Tout le long de ce vaste champ, le peintre avait
continué à faire application de ce pinceau méticuleux qui ne voulait
plus rien laisser se dérober à son pointage. On aurait dit de près un
travail de mosaïque, et cet aspect n’avait pas échappé à l’œil du
caricaturiste1 2. Pourtant, à la distance convenable, il fallait bien se
rendre à l’extraordinaire puissance de ce coin dévoilé de végétation
forestière, condensée, touffue à l’excès, au prestigieux accent des
verts de ces feuillages qui suspendaient au cadre comme une frange
opulente et dont les bizarres tonalités donnaient à l’ensemble, disait
Gautier, l’aspect d’un bloc de minerai de cuivre3.

Il y a une impression intéressante à recueillir : c’est celle de
Théophile Thoré qui, revenu de son exil aux Pays-Bas, adressait à
h Indépendance belge des articles de relations sur les Salons de
Paris. Tout en s’inclinant devant ce noble besoin de renouvellement
dont son ami lui faisait l’édifiante surprise, Tardent sociologue de 48
regrettait le Rousseau des jeunes années, de ces vives et lyriques
ébauches qu’il avait défendues si cordialement, le Rousseau de la

1. Rousseau Ta lui-même reproduit en une eau-forte qui a été publiée par la
Gazette (1861, t. II, p. 14).

2. A Galetti, auteur d’un Album caricatural sur ce Salon.

3. Abécédaire du Salon de 1861, in-12.
 
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