Universitätsbibliothek HeidelbergUniversitätsbibliothek Heidelberg
Metadaten

Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 4. Pér. 9.1913

DOI issue:
Nr. 6
DOI article:
Berenson, Bernard: La "Sainte Justine" de la collection Bagatti-Valsecchi à Milan
DOI Page / Citation link:
https://doi.org/10.11588/diglit.24886#0498

DWork-Logo
Overview
Facsimile
0.5
1 cm
facsimile
Scroll
OCR fulltext
-i68

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

sommes loin du rythme exquis de la palme qui s’incline sur la
gauche du tableau de Milan.

Une fois seulement (main gauche d’une sainte portant une
monstrance à l’Académie de Vienne), Alvise a peint une main qui,
accidentellement, ressemble à celle de sainte Justine; mais que le
lecteur compare lui-même! J’admets d’ailleurs que les mains ne
sont pas la meilleure partie de ce beau tableau.

Un des caractères du peintre de la Sainte Justine, c’est l’amour
de la parure, de l’ornement qui rehausse la beauté, de l’éclat des
pierreries : il n’y a rien de tel dans Alvise : les livres qu’il a souvent
figurés, les surfaces métalliques qu’il a peintes (comme l’armure de
saint Georges et de saint Michel dans ses tableaux d’autel), semblent
des choses tristes et mortes à côté des somptueux accessoires du
grand artiste avec lequel on l’a confondu.

*

* *

L’attribution à Giovanni Bellini peut résulter de l’excellence même
de l’œuvre; maison peut y arriver aussi par voie d’exclusion. Les
seuls peintres assez grands pour entrer en ligne sont Gentile Bellini,
Carpaccio et Cima; qui voudrait songer à des artistes de second
ordre comme Montagna, Bonsignori, Benedetto Diana, ou même
Lazzaro Sebastiani ? Tous ces noms éveillent le souvenir de person-
nalités artistiques bien définies qui ne s’accordent pas avec celle que
révèle la Sainte Justine. Cima da Conegliano seul a montré quelque
chose du raffinement, de l’élégance sévère qui la caractérise; mais,
avec tous ses dons, il n’était ni assez intellectuel ni assez bon ou-
vrier pour s’élever si haut. Ses meilleures œuvres font songer à de
la peinture sur porcelaine, parce qu’il peignait, pour ainsi dire, de
dehors en dedans, tandis que la Sainte Justine est peinte de dedans
en dehors, qualité que seul Giovanni Bellini possédait à son époque.
La Sainte Catherine de la collection Wallace à Londres offre, dans
son ensemble, quelque analogie avec la Sainte Justine ; je la repro-
duis à titre de comparaison. Les différences sont aussi évidentes
qu’elles sont intéressantes à constater. Nous voyons d’où Cima tirait
son inspiration; nous voyons aussi qu’il n’a pu ni inventer ni exé-
cuter le chef-d’œuvre de Milan.
 
Annotationen