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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 5. Pér. 9.1924

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https://doi.org/10.11588/diglit.24943#0274

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BIBLIOGRAPHIE

a55

Faucheux et Malvaux. Il n’est pas jusqu’au
papier dont la solidité et la beauté ne méritent
un éloge spécial.

Je n’adresserai guère à ce standard ivork qu'une
critique : c’est qu’il perpétue par son titre une ex-
pression, à mon sens malheureuse, celle de minia-
ture pour désigner les illustrations des manuscrits
médiévaux. Ce terme devrait être réservé aux
lettres en couleurs tracées au minium, ou aux petits
portraits séparés, sur ivoire, émail ou parche-
min, dont la vogue commence au xvnc siècle.
Les illustrateurs du Moyen Age s’intitulent eux-
mêmes enlumineurs et c’est le mot enluminure
qu’il conviendrait de donner à leurs œuvres.
M. Martin le sait fort bien puisqu’il cite lui-
même le vers classique de Dante (Purg. XI,
80) : queir arte ch’ alluminare e chiamata in
Parisi. Pourquoi n’a-t-il pas eu le courage de
réagir contre un usage qui n’est qu’un abus?

r. n.

Le portrait gravé et ses maîtres. Nanteuil,

par Eugène Bouvy. Chez Le Goupy. Paris,
1924.

Voici le premier ouvrage « de fond » sur
Nanteuil, et neuf. L’artiste en valait la
peine puisqu’il est l’observateur le plus
pénétrant d'une époque qui a fait de l’étude de
l’homme, au physique et au moral, l'objet essen-
tiel de sa pensée. La biographie fait apparaître
son rôle éminent dans la préparation du fameux
arrêt de Saint-Jean-de-Luz, charte de la Gravure
en France. L’étude de son dessin au crayon et
au pastel nous révèle sa curieuse conception du
portrait. Nous voici introduits dans la maison
bourgeoise du quai Guénégaud, dans Batelier de
l’artiste qui a écrit fièrement «je sçais mon
art » ; nous assistons à sa méthode de travail
depuis l’instant où il pose et fait causer son
modèle pour animer sa physionomie, puis jette
sur le papier un premier crayon, jusqu’à la
troisième épreuve où la figure sort enfin avec
tout son relief, son « caractère », son âme. Beau
chapitre, qui a Battrait d’un secret dévoilé : à la
précision de l’analyse il joint le don heureux de
la vie. Sur le pastelliste, tout ou presque est nou-
veau. Puis, ces portraits dessinés, Nanteuil les
grave. Alors, démarche du burin, ses tailles
variées, diversité des techniques et de leurs
ell'ets selon les cheveux, les carnations, les

tissus..., M. Bouvy ne laisse rien échapper de
ce métier très sur, sans que son étude de spécia-
liste soit jamais aride. Car en chaque ressource
du graveur il sait nous montrer le moyen
d’expression. Chaque morsure de burin est une
manifestation de l’âme sur la figure de ces
« honnêtes gens », bien plus graves et plus inté-
rieurs que nous. Et maintenant, les voici eux-
mêmes. En un dernier chapitre M. B., armé
des données certaines de l’Histoire, commente
leur figure par leur vie. Sur leurs traits il nous
fait lire leur destinée, comme par la chronique,
et la correspondance est saisissante. Et s’il ne
s’agissait que du Roi, de Colbert, de Turenne,
de Bellièvre, de Harlay..., ce serait déjà bien
intéressant. Mais M. B. sait mieux que personne
qu’un « portrait dessiné ou gravé par un grand
maître qui lui-même appartient à une grande
époque est quelque chose de plus que l’effigie
d’un homme. C’est un type collectif, une syn-
thèse, un « symbole». De là ces pages « informées »,
qui derrière le portrait individuel font surgir
l’Epoque : la Famille royale, les Princes, les
hommes d’Etat, l’Église, la Robe, les Lettres et
les Arts, les Femmes de Nanteuil. Belle France,
solide et sérieuse. L’artiste, qui l’a éternisée, est
lui même une nature équilibrée et heureuse,
peu inquiète, peu soucieuse d’attraper comme
nous Binslant aigu. M. B. définit d’un mot très
juste ce portrait « une sorte de moyenne, aussi
durable que possible, entre les aspects variés de
la physionomie du modèle ». Chercher le per-
manent sous la mobilité des apparences : voilà
bien la méthode classique. Ainsi M. B. apporte
une contribution excellente à l’élude de l’Art au
xvue siècle, plus varié, plus vivant, plus péné-
trant que ne l’ont dit les superficiels. Dans cet
ouvrage bien venu se rencontrent (parce qu’ils se
sont cherchés) le goût sur, l’érudition historique,
les connaissances techniques d’un amateur
rafiiné, dès longtemps initié à la gravure par le
contact des chefs-d’œuvre dont il a hospitalisé
chez lui un choix magnifique. Pour soutenir sa
valeur et assurer son succès, l’éditeur n a rien
ménagé. La présentation est soignée : le moel-
leux délicat des gravures n’a rien perdu sous les
presses, et ce sont presque les originaux de
Nanteuil qui viennent nous garantir les com-
mentaires du critique.

RENÉ SCHNEIDER
 
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