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N° 19.

15 Octobre 1884.

Vingt-sixième Annee.

JOURNAL DES BEAUX-ARTS

ET DE LA LITTÉRATURE.

DIRECTEUR: M Ad. SIRET.

membre de l'académie roy. de belgique, etc.

SOMMAIRE. Beabx-Arts : Concours de gravure.
— Le salon de Bruxelles, peinture. — Le salon
de Bruxelles, sculpture, e'c. — Nouvelles du
pays de l'art. — Correspondance de Paris. —
Collection de Parpart. — Annonces.

Beaux-Arts.
CONCOURS DE GRAVURES

a l'eau-forte,
ouvert par l'administration
du Journal des Beaux-Arts
pour 1883-84.

planches reçues.

1. Dans le bois à La Haye.

2. Coin de ferme à Dieghem.

3. Lenfant au chalumeau.

4. Nuit d'octobre.

5. Récolte de pommes de terre,
Platinée d'octobre en Ardennes.

6. La mère. Eau-forte originale.

7.' Intérieur de l'égliseSt-Jacques.

8. Les frères DeWit, d'après Wap-
pers.

9. Le bac, d'après Ruysdael.

10. La liseuse. Eau - forte origi-
nale.

11. La tricoteuse. Eau-forte origi-
nale.

12. Chiens aux aguets, d'après
^an den Eycken.

13. Après la voltige.

14. Tête d'étude.

15. La bête à bon Dieu, d'après
Alfred Stevens.

16. L'atelier de mon ami P. De-
Ji>itte.

17. Hi! Han ! (Deux ânes).

SALON DE BRUXELLES.

(Suite).

Salle 3.

Mon cher Gervais,

Je regrette vivement que votre accès de
§°utte ne vous permette point de continuer

paraissant deux fois par mois.

prix par an : belgique : q francs

étranger : 12 fr.

avec moi la promenade du Salon. Je vais la
continuer seul et je vous transmets mes ob-
servations m'imaginant que vous êtes tou-
jours près de moi. Quant à votre goutte,
faites ce que vous pouvez pour la tourmenter;
marchez, agissez, vivez sobrement, donnez
lui le moins de prise possible et souvenez-
vous de cette parole :

Goutte bien tracassée

Est, dit-on, à demi pansée.

Me voici devant le portrait équestre de
M. De la Laing C'est une toile qui émeut
tout d'abord, c'est d'une fière allure, c'est
d'une belle brosse et, au dessus de tout cela,
c'est d'une poésie étrange et même un peu
fantastique. Je vais vous la décrire et chemin
faisant je la jugerai. Au milieu, de profil, sur
un cheval qui revient de la manœuvre à en
juger par sa fatigue apparente, et qui va de
droite à gauche, se trouve assis un homme
revêtu de la capote d'ordonnance ; on ne
sait pourquoi, mais il est décoiffé ; sa tête un
peu monacale se profile sur un fond nul,
mais quelle tête! Quelle expression de di-
gnité, de force et d'intime personnalité ! De-
vant cet... officier, car je suppose que c'en est
un, chevauchent des lanciers dont on ne
voit que les têtes et une partie des chevaux.
Ce groupe est enlevé avec une étonnante
fougue. C'est d'une écrasante vérité, hommes
et chevaux ont l'air de vivre Derrière l'offi-
cier chevauchent également des lanciers mon-
tés sur des chevaux dont les têtes seules se
voient. Celles-ci sont des chefs-d'œuvre.

Je ne sais pourquoi en les voyant j'ai songé
à Gros et à Géricault. Toute l'œuvre, qui est
une toile immense puisque les personnages y
sont de grandeur naturelle, est un peu
sombre, le soleil manque dans l'air et plus
encore sur la terre, car que dire de l'informe
et épais talus et du sol que le peintre ne s'est
pas donné la peine seulement d'indiquer suf-
fisamment ? C'est évidemment un parti pris
ou une lassitude regrettable chez un artiste
qui d'un bond prodigieux arrive à se placer
presque au rang de nos maîtres, au moins
comme exécution,car, je le répète, celle-ci est
merveilleuse et en sa présence on se souvient
involontairement des grands chefs fran-
çais et italiens qui jadis ont marqué le pas
dans l'école.

Je suis loin de trouver la composition par-

administration et correspondance

a anvers (belgique) rue albert, 32.

faite; je lui pardonne en faveur de son étran-
geté, or dans l'étrange la logique est rare.
C'est ainsi que je demanderai à M. De la
Laing s'il ne lui paraît pas que son héros,
nu tête, résigné, un peu fatal et regardant
devant lui en songeant, ne ressemble pas à
un condamné à mort conduit entre deux pi-
quets au lieu du supplice ? A coup sûr cela
ne change rien au mérite intrinsèque de
l'œuvre, mais cela froisse le spectateur qui
aime à être saisi de suite par la compréhen-
sion.

Certes une grande destinée paraît réservée
à ce jeune homme qui au début de la vie
cueille des médailles et des croix et, mieux
que tout cela, oblige la critique à le saluer ;
mais ce n'est pas un flamand. M. De la Laing
procède à toute évidence de l'école française,
de l'ancienne, s'il vous plaît, ne nous y trom-
pons pas. Quelque chose du peintre Gros, le
plus grand peintre du monde comme disait
Delacroix, quelque chose de Géricault, vibre
incontestablement dans ce vaillant et mo-
deste éphèbe qui ne se rend pas un compte
exact de ce qu'il sent et de ce qu'il veut,
mais qui, seul peut-être, de la grande bande
artistique, s'est trouvé être original parce
qu'il n'a rien cherché. Que sa bonne étoile le
guide, qu'il aille sans trop écouter ce qu'on
dit de lui il est de force à n'avoir besoin de
personne pour se faire un nom.

Quel douloureux contraste ! me voici devant
unepochadeàpeinedessinée de Mlle Breslau,
la même qui jadis donnait de si grandes
espérances. Son portrait est une sorte de dé-
bauche de brosse et de palette où la désas-
treuse influence de Manet se fait cruellement
sentir. Nous verrons dans d'autres salles si
l'artiste persévère dans ce détestable système
qui est celui que la médiocrité régnante a pris
l'habitude de préconiser.

Ce diable de Verwée est un artiste bien
difficile à prendre au sérieux. Voilà que, sous
prétexte de race bovine, il nous donne des...
Eupatoires. Vous, mon cher Gervais, qui
vivez avec les simples, dites-moi donc quels
rapports existent entre la fleur de Ste-Cune-
gonde et les taureaux ? Serait-ce à cause des
vertus purgatives de cette plante rustique ?
Quoi qu'il en soit, je n'hésite pas à déclarer
que ce tableau est désagréable à voir malgré
l'air vif qu'on y respire. On m'assure que je
.verrai mieux de lui dans une autre salle. Je
l'espère.
 
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