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N° 12.

30 Juin 1884.

Vingt-sixième Annee.

JOURNAL DES BEAUX-ARTS

ET DE LA LITTÉRATURE.

DIRECTEUR : M. AD. SIRET.

MEMBRE DE L'ACADÉMIE ROY. DE BELGIQUE, ETC.

PARAISSANT DEUX FOIS PAR MOIS.

PRIX PAR AN : BELGIQUE : g FRANCS.

ADMINISTRATION ET CORRESPONDANCE

A S'-NICOLAS (BELGIQUE).

ETRANGER : 12 FR.

SOMMAIRE : Bea.ux-Ar.ts : L'art au parlement.
— Histoire de voleurs (suite). — La sculpture
(fin). — Tables tournantes. — Lettre de M. Yan
den Bussche. — Bibliographie : Brouwer par le
Dr Bode. — Chronique générale. — Cabinet de
la curiosité. — Annonces.

Beaux-Arts.

L'ART AU PARLEMENT.

S'il est une gloire légitimement acquise à la
Belgique, c'est celle que lui a donnée sa pré-
dominance dans les arts. On serait même
tenté de croire que c'est véritablement la seule
à laquelle elle ait droit. Du resté,nul ne songe
^ lui contester cette gloire qui s'est étendue à
l<>us les coins du monde civilisé. C'est à ce
Point qu'au bord du désert du Sahara, un
artiste belge (Slingeneyer) causait avec le
Caïd d'une petite ville et celui-ci apprenant
qu'il avait devant lui un Flamand, s'épanouit
dans un large sourire, et jetant le bras vers
''espace, il prononça le nom de Rubens.

Comprend-on qu'en présence de la respon-
sabilité qui incombe à notre pays dans une
situation si flatteuse, nous soyons restés cin-
quanteanssans avoir eu, au seindu parlement,
quelqu'un qui représentât une classe de
citoyens si utile à notre réputation et si né-
cessaire aux multiples intérêts issus de l'art
dans toutes ses ramifications? Pendant cin-
'l'Jante ans, les arts, les lettres et les sciences,
se sont défendus comme ils ont pu au sein des
Chambres. Alors que toutes les questions éco-
nomiques, politiques, administratives et au très,
donnaient lieu à des débats approfondis, les
arts étaient laissés à la porte comme choses
inutiles. Quelquefois, mais bien rarement, des
voix éloquentes plaidaient cette cause qui
nous est si chère, mais hélas ! au fur et à
mesure que l'orateur pénétrait au cœur de
'a question, on voyait la salle du parlement se
vider lentement et tout était dit. Nul n'avait
songé à la grandeur artistique de la patrie;
nul n'avait pensé à cette catégorie de contri-
buables tout aussi intéressante selon nous que
celle des cabaretiers, nul ne s'était donné la
peine de réfléchir que les arts, et notamment
'es arts industriels, contribuent, dans une
large mesure,à la richesse publique, brel une
'gnorance ou une indolence inexplicable avait
•'elégué, nous ne disons pas au dernier plan,
niais hors du tableau, notre existence au

monde intellectuel. Nul projet, nulle mesure,
aucun mouvement, nulle innovation, aucune
initiative, ne se faisait jour. On lisait au milieu
des conversations distraites, les articles du
budget des beaux-arts, et tout était voté sans
qu'on s'en fût aperçu. Si quelquefois un peu
de bruit se faisait, nul doute qu'il n'y eût
en jeu quelque irritante question politique ou
personnelle. Tous ceux qui se sont occupés
avec quelque intérêt du thème que nous abor-
dons, devront convenir que nous sommes
dans le vrai.

Aujourd'hui, par suite de la nomination de
M. Slingeneyer au sein du parlement, cet
ostracisme a cessé. Nous n'avons pas la naï-
veté de croire que nos représentants vont se
passionner, plus que jadis, pour toute ques-
tion d'art, mais nous sommes assurés que
nos intérêts seront surveillés et qu'au moment
voulu,la chambre sera éclairée autrement que
par le ministre, qui ne peut tout savoir sur
tout ce qui concerne et la dignité de notre
existence artistique et sa prospérité. M.Slin-
geneyer a une âme chaleureuse, il s'exprime
fièrement et éloquemment, il a une expérience
consommée en ce qui concerne l'enseignement
académique, il a beaucoup vu, beaucoup
voyagé, ses relations sont considérables et de
haute valeur, il est d'un commerce aussi doux
qu'agréable, son zèle et son dévouement sont
à toute épreuve, rien ne manque donc à la
sauve-garde de notre précieuse existence ar-
tistique et ceux qui, comme nous, le con-
naissent, sont convaincus qu'il eût été dilli-
cile de faire un choix plus heureux pour faire
sortir de sa torpeur, si c'est possible, une
chambre jusqu'à présent si peu enthousiaste
de notre vie intellectuelle.

Evidemment encore nous ne pouvons de-
mander à l'honorable défenseur de nos droits
qu'il substitue l'âge d'or à l'âge de misère qui
est actuellement celui où nous vivons, mais il
nous semble que c'est bien le moins que nous
ayons désormais quelqu'un qui, à l'heure dite,
fasse remarquer à qui de droit ceci : La Bel-
gique depuis le 15me siècle compte une chaîne
ininterrompue de célébrités artistiques qui
ont fait et font encore sa force et son éclat
dans le monde entier. 11 lui est défendu de
décheoir et c'est au gouvernement, par l'appui
des chambres, qu'il appartient de veiller avec
le plus grand soin à ce que cette situation se
maintienne. Nous ne demandons ni grâces

ni faveurs, mais simplement une protection

égale a celle qui est accordée aux autres
intérêts vitaux du pays.

HISTOIRES DE VOLEURS.

[Suite.)

Le vol à la longue.

Deux habitués d'un célèbre hôtel de ventes
avaient dressé un plan d'opérations qui ne
demandait que l'occasion pour se pioduire
dans tout son beau.Cette occasion se présente :
on annonce une vente de tableaux italiens.
Il s'y trouve un Tiépolo, un Bernardino
Luini, un Mantegna, n'importe. Adoptons
Mantegna. Ces deux habitués, dont l'unique
industrie consistait à être à l'affût de combi-
naisons dont on puisse tirer parti, savent que
M. le comte *** n'a pas de Mantegna dans sa
collection et qu'd donnerait gros pour com -
bler ce vide. L'acheter pour le revendre avec
un honnête bénéfice à M. le comte, serait ba-
nal. Il faut faire grand. Nos deux habitués
décident que, quoiqu'il arrive, le Mantegna
doit leur rester. De plus, il importe absolu-
ment de faire monter les enchères tout au
moins jusqu'à 25,ooo francs. Ce qu'il faut
établir d'abord, c'est la haute côte du maître,
car il y a non seulement la présente vente à
exploiter mais encore toute vente où appa-
raîtra un Mantegna quelconque, ce qui est
à considérer tout autant, si pas plus, que la
présente occurrence. La vente commence sur
une mise à prix de 5ooo fr. Il y a marchand
à 1000 fr. A partir de ce moment les enchères
montent et arrivent, poussées par cinq ou
six amateurs, à 10,000 francs. Ici il y a un
moment d'arrêt. Il n'y a plus que deux
enchérisseurs, ce sont nos hommes. Bref, le
Mantegna est adjugé à l'un d'eux pour 25,000
fr. L'adjudicataire crie à haute voix le nom
de l'acquéreur : le prince X** à Saint-Péters-
bourg.

Voilà le premier acte.

Dans la pièce qui se joue il y a manque
d'unité de temps, mais on n'y regarde pas
de si près, ni au théâtre ni à l'hôtel des ventes.

Dans le cours de l'année on remarque que
tous les journaux d'art ont plein la bouche
du Mantegna et de ses œuvres lesquelles
deviennent de plus en plus rares, surtout
depuis que l'hôtel de M. le marquis C**, à
Naples, qui en possédait six, à brûlé de fond
 
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