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N° 6. 31 Mars 1884. Vingt-sixième Annee

JOURNAL DES BEAUX-ARTS

ET DE LA LITTÉRATURE.

DIRECTEUR : M. Ad. SIRET.

membre de l'academie roy. de belgique, etc.

SOMMAIRE. Beaux-Arts : Histoire de voleurs.—
Bibliographie : Représentation des corps. —
Gilde de St-Thomas et de St-Luc. — Cham. —
Le musée de Douai. — Chronique générale. —
Le monument Wiertz. — Cabinet de la curiosité.
Annonces.

Beaux-Arts.

HISTOIRES DE VOLEURS.

(Suite).

LES IVOIRES ET LES STATUES.
Abandonnons, pour un instant, les ta-
bleaux, et parlons de certains bibelots pré-
cieux que recherchent les amateurs et que
1 on falsifie audacieusement.

Les ivoires anciens sont imités avec une
Perfection que j'appellerai cruelle,car ce n'est
lu'en les cassant que, pour beaucoup, la
fraude peut être découverte. Tout le monde
a connu ce célèbre Dyptichon en ivoire que
Gouvernement belge a manqué d acheter
a un faussaire, il y a quelques vingt ans. Ici
c'était un ivoire véritable, dans lequel on
avait taillé une imitation parfaite de l'origi-
nal, mais je veux parler d'une masse de
Plaques en faux ivoire qui inondent les mar
chés. Un amateur célèbre très versé dans ces
voleries, pour les découvrir , possédait une
collection connue. C'était M. Essing qui de-
meurait à Cologne. Un jour que je m'exta-
siais devant une charmante petite plaque
d ivoire taillée, de l'école de Nuremberg, il
Se mit à sourire et me dit que, comme tout le
blonde, j'étais trompé. Il prit la plaque, la
•Bit dans un mortier et,à mon grand effroi,il
^a pila jusqu'à ce qu'elle fut en poudre, après
'îuoi, il me mit cette poudre sous les yeux et
'a divisa en plusieurs sections : ivoire pilé,
Plâtre, gomme arabique, blanc d'œuf et ocre
)aUne.

— Voilà, dit-il, cet ivoire de Nuremberg.
^ est une sorte de barbotme confectionnée où
1 °n veut et que l'on verse dans un moule en
c&outchouc au moyen duquel on a pris une
etHpreinte de l'original. Tenez, j'ai ici tout
1 -i panier rempli de ces faussetés que pour
mieux dissimuler les voleurs appliquent sur
vieux bois.Quand l'ivoire est d'une bonne
taille et épais comme ceux de certaines cou-
vertures d'évangéliaires romans, ou chauffe
a Une haute température du véritable ivoire
et dans la matière amollie on imite l'original

paraissant deux fois par mois.

PRIX PAR AN : BELGIQUE : 9 FRANCS.

étranger : 12 fr.

qui généralement est assez fruste. Il y a, à
Cologne, toute une brigade de coupeurs
d'ivoire parfaitement au courant de ce travail.
On donne à l'ivoire les apparences de rouille,
de vétusté, d'éraillure, par des moyens ingé-
nieux qui constituent les finasseries du mé-
tier. La perfection dans ce genre est tellement
absolue que, malgré mon expérience et, j'ose
le dire, ma profonde connaissance des vieux
ivoires, je suis journellement trompé. Dans
l'ivoire fait avec cette barbotine dont voici la
poussière, on imite les veines intérieures du
véritable ivoire de la manière suivante : on y
mêle, à l'état liquide, un peu de blanc d'œuf
légèrement ocré et on imprime au moule qui
a reçu le liquide, un petit mouvement dans
le même sens et fréquemment répété. Il faut
s'arrêter à temps et au moment où la liqué-
faction a perdu sa qualité tremblotante. L'ob-
jet retiré du moule est soumis, quand il est
bien sec, à un frottement par des bâtonnets
entourés d'une petite flanelle. Alors on dis-
tingue comme dans le marbre ou le stuccage,
les veinules qui ne sont pas que superficielles,
mais qui pénètrent très avant dans la matière.
Les ivoires fortement fouillés sont générale-
ment véritables et encore ayez soin de scier ou
c'e limer un coin quelconque de la pièce que
vous voulez acheter. Il n'y a absolument au-
cun autre moyen de contrôler les ivoires vé-
ritables.

Cette appréciation d'un des plus grands
connaisseurs de l'époque, mettra en garde
ceux de nos lecteurs qui font dans les ivoires.

J'ajouterai que c'est dans les Indes et au
Mexique que se font les meilleures ccmtrefa-
çons du genre. Un échiquier du temps de
Charlemagne a été reproduit avec une per-
fection telle par un ivoirier indien, que l'ori-
ginal et la copie, placés^sur la table, il a été
impossible au propriétaire de distinguer l'un
de l'autre. Il a fallu que l'ouvrier expliqua
lui-même les différences à peine visibles. Je
tiens le fait de M. le comte Branicki.

Qu'on ne s'imagine pas que ces voleries
soient une institution moderne. Sans doute on
a perfectionné, mais voici une aventure toute
récente qui prouvera qu'il y un siècle, on
mystifiait déjà le pauvre monde de la plus
misérable façon.

Dans une église de mon voisinage, sur
l'autel de la Vierge, se trouvent deux statues
de grandeur naturelle, représentant S4 Joseph

ADMINISTRATION et CORRESPONDANCE
a s'-nicolas (Belgique).

et Ste Anne. Les comptes de l'église témoignent
qu'elles ont été commandées en marbre à
l'artiste qui devait avoir une certaine réputa-
tion à en juger par le travail qui est vraiment
fort beau. L'artiste était de Rupelmonde et
demeurait à Anvers. La commande fut faite
en 1750 au prix d'une somme d'argent dont
la quotité exacte nous échappe par suite de
détérioration du registre des comptes, mais
en faisant le total de la page,on découvre que
ce prix devait être de 5ooo frs. par statue,soit
10,000 frs. pour les deux.

Il y a sept ou huit ans, la fabrique d'é-
glise résolut de laver les pièces de marbre de
l'autel devenues d'une saleté vraiment exagé-
rée. Ce n'était pas de la patine, mais bien
une véritable crasse. On dut employer de la
potasse à haute dose. Quand on arriva aux
deux statues on découvrit qu'elles étaient en
terre-cuite ! Un spécialiste constata qu'elles
avaient été habilement recouvertes d'un li-
quide épais qui s'était durci et qui avait été
soumis à une sorte de stuccage trompeur dont
les fabriciens avaient été victimes.

[A suivre.)

BIBLIOGRAPHIE.

Représentation réelle des corps, par Edmond
de Taye, 1 vol. in-8°, avec gravures. Namur,
Wesmael-Charlier.

Décidément, la Belgique entre en plein
dans une période de mouvement, d'efforts et
de travail acharné. Un pareil élan produirait
certainement de beaux résultats dans l'art,
s'il était bien dirigé, et les tentatives d'une
jeunesse audacieuse 11e resteraient sans doute
pas stériles, si un homme d'expérience et de
valeur se décidait parfois à leur ouvrir une
voie large, droite et sûre, la seule qui puisse
mener au progrès et au succès.

C'est la réflexion que nous suggère l'examen
d'un livre nouveau, inspiré par un homme
convaincu, véritable apôtre nourri d'études
fortes et sérieuses, et qui semble s'être créé
autour de lui une petite phalange de travail-
leurs, aides respectueux, pleins d'ardeur
comme lui.

Ce livre est une œuvre de savant3 trop sa-
vante même au premier abord, pour les arti-
sans auxquels il semble s'adresser, bien que
tout esprit sérieux puisse y trouver profit.
Mais il constitue 1111 des jalons d'un traité
 
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