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carrière peu éclatante, niais laborieuse, par-
tageant son temps entre ses études et ses
voyages.

On ne peut méconnaître l'heureuse influence
que ces derniers exercèrent sur notre artiste,
que la nature au surplus avait heureusement
doué et qui s'était préparé au succès parde lon-
gues études. Aussi consciencieux qu'infatiga-
ble, Van Moer s'attacha toujours à retracer ce
qui le frappait avec la plus scrupuleuse fidélité;
non content d'accumuler les esquisses, les cro-
quis, il annotait les détails dont il voulait con-
server un souvenir précis. Ses cahiers, tenus
avec une minutie incroyable, fourmillent de
détails sur ce qu'il a fait et vu,sur les hommes
avec lesquels il s'est trouvé eu relation. Dans
ces pages intimes, Van Moer se peint lui
même. Son séjour à Venise, dans la Dalmatie,
dans une partie de la France, en Espag ie,et
en dernier lieu en Egypte et dans la Palestine,
enrichirent à la fois son esprit et ses albums
et donnèrent à ses productions une variété
dont l'absence est souvent mortelle pour l'ar-
tiste le mieux doué. Comme tous les hommes
dont les commencements ont été difficiles, il
s'irritait facilement; mais bientôt il s'apaisait
de même. Peu ouvert et peu expansif, il avait
cependant un cœur excellent,et sa brusquerie
apparente cachait un grand fond de douceur.
Sa grande qualité, celle qui garantira sa célé-
brité contre l'oubli, c'est son soin scrupuleux
à exécuter et achever ses tableaux, pour les-
quels il ne négligeait rien, et dont les côtés
matériels : la toile, les couleurs, etc., consti-
tuaient pour lui une cause de soucis inces-
sante.

Après avoir visité une partie de la Belgique
et Paris, Van Moer commença à se faire dis-
tinguer. Dès 1842 on avait vu de lui, à Bru-
xelles, une vue de l'abbaye de Villers. A l'ex-
position de 1848, si brillante pour la nouvelle
école de peinture, il avait quatre tableaux,
parmi lesquelles on remarqua surtout le Mar-
ché aux toiles à Rouen. On le signale alors
comme un « jeune artiste bien organisé; » on
déclare qu'il deviendra un peintre distingué
s'il continue «sa marche progressive «.Nulles
promesses ne furent mieux tenues, et l'on peut
dire de notre peintre que jusque dans ses der-
nières productions on retrouve cette ardeur
à bien faire qui caractérise le véritable talent.

Ou n'en finirait pas si l'on devait énumérer
toutes les toiles sorties du pinceau de Van
Moer,et dont un grand nombre quittèrent son
atelier sans avoir été exhibées en public, ni
exaltées par des amis complaisants. Elles lui
valurent de nombreuses commandes , trois
promotions successives dans l'ordre de Léo
pold (chevalier en 1860, officier eu 4869,
commandeur en 1880) et des distinctions flat -
teuses dans les expositions. Eu 1855, à Paris,
il fut l'un des Belges qui obtinrent la mé-
daille de seconde classe. A Metz, en 1861, il
eut une médaille d'honneur. Mais, par un
travers dont on rencontre souvent des excin

pies, l'artiste se montrait plus sensible qu'il
n'aurait dû l'être à de légers froissements d'a-
mour propre, et son humeur chagrine, avivée
dans les derniers temps par des maux phy-
siques, s'aggrava encore par suite de l'isole-
ment dans lequel il finit par se confiner.

f.a valeur de son talent et l'honorabilité de
son caractère valurent à Van Moer de hautes
protections et de chaudes amitiés, qui ne lui
firent jamais défaut. Sa mémoire vivra surtout
par les œuvres dont son pinceau a orné plu-
sieurs monuments et enrichi des collections
particulières. II a peint pour S. M. le roi
Léopold (en 1867-1868) trois immenses toiles,
placées dans le grand escalier du palais royal,
à Bruxelles : le Quai des Esclavons, la Façade
extérieure de l'église Saint-Marc et la Cour du
palais des Doges, à Venise; au château de Cier-
gnon(enl87^)quatre vues de la même ville,deux
en largeur, deux en hauteur : le Grand canal,
le Quai des Esclavons, la Porta di Caria et la
Piazelta, et, afin d'être offerte à un souve-
rain, si je ne me trompe au shah de Perse,
une Vue de Fhôtel-de-ville de Bruxelles, effet
merveilleux de couleur et de perspective, où
Van Moer a déployé toute la magie de sa pa-
lette.

Véritable enfant de la capitale, notre peintre
avait voué un culte sincère aux vieux monu-
ments de sa ville natale, dont plus que per-
sonne il appréciait la beauté et le caractère
pittoresque. Ce fut avec enthousiasme qu'il
accueillit la proposilion du bourgmestre Jules
Anspach de peindre, pour son antichambre à
l'Hôtel-de ville, quinze vues des quartiers que
l'on devait démolir pour les transformer en un
immense boulevard sous lequel coulerait la
Senne. Dès lors Van Moer passa une partie de
ses journées à parcourir les rues, les ruelles,
les allées voisines de la rivière, choisissant
les aspects les plus caractéristiques, esquis-
sant,dessinant,sans souci des conditions défa-
vorables dans lesquelles s'opérait souvent son
travail. Poussant à l'extrême cette fidélité de
reproduction dont il se glorifia toujours, il
disposa dans son atelier un compartiment re-
produisant rigoureusement les conditions
dans lesquelles ses tableaux devaient être vus.
Son travail constitue réellement un tour de
force: ses vues sont peintes avec une énergie
de couleur qui frappe lorsqu'on les contemple
pendant la journée, et émerveille lorsque
l'appartement dont elles décorent les parois
est illuminé.

On avait l'intention d'orner de la même ma-
nière le salon occupé par le bourgmestre, au
coin des rues de l'Hôtel de ville et de la
Vrunte. On en aurait garni les trumeaux de
vues des monuments modernes de Bruxelles
et, en particulier, de la nouvelle Bourse. Van
Moer a exécuté pour ce projet des esquisses
qui existent ; mais différentes circonstances
ont fait ajourner un travail pour lequel man-
queraient d'ailleurs le cerveau qui l'avait
couru et la main de celui d uit on pouvait en

attendre la réalisation.

Liions encore, parmi les œuvres de Van
Moer : L'intérieur de Vèglise Sainte-Marie, de
Belem, et Bruxelles en 1808, vue prise de U
rue de Saint-Géry, qui sont au musée de
peinture de l'État ; Intérieur d'atelier (son
premier atelier), exposé à Paris en 1855,
aujourd'hui au musée d'Amiens; le château
de lloydonck près de Gand, chez M. le baron
T Kint de Roodenbeke: la Cour d'un cocher à
Ixelles. Une partie de l'église Saints-Michel ^
Gudule, Un corridor à Bruxelles, également
exposés en 1855 ; la Chapelle Saint-Zénon,
à Saint-Marc, de Venise (1861) ; l'île Saint-
Georges, dans la même ville; le Fort de Belem
(1867), propriété de S. M. le Roi ; la Cour des
lions, à l'Alhambra, de Grenade; les quinze
toiles décoratives, avec sujets empruntés à
cette Venise tant aimée, que Van Moer vient
d'achever pour l'hôtel de son ami De Haas, ar-
tiste peintre, à fxelles; des aquarelles peintes
pour S. M. la Reine, etc.

On n a jamais rien gravé, croyons nous, de
toutes ces productions.

Van Moer habitait en dernier lieu dans le
pavillon qu'il avait fait construire à Ixelles,
rue Wiertz, 59, à côté du parc Léopold H
(ancien Jardin Zoologique). Son atelier, très
vaste et très confortable, en occupe presque
tout l'étage. C'est là qu'on l'a trouvé étendu,
vers les deux heures de l'aprés-midi, le 6 dé-
cembre 1884. Tous les efforts tentés pour le
ranimer furent inutiles ; il avait été frappé
mortellement. Le 9, à travers.une pluie bat-
tante, un nombreux cortège d'amis condui-
sirent sa dépouille mortelle à l'église Saint-
Boniface, où le service funèbre fut célébré,
puis on le transporra au nouveau cimetière
de la commune, près .de Booudael.

Van Moer mena toujours une vie très régu
lière et très retirée. 11 n'était pas marié et
n'a laissé que des neveux et des nièces, entre
autres Madame Casse, femme du directeur de
l'hôpital des entants rachitiques de Bruxelles,
à Middelkerke près d'Ostende.

On peut dire de Van xMoer qu'il était un
vrai Flamand, un Flamand de pure race. Ses
compositions, bien agencées, plaisent dès le
premier coup d'œil ; sa couleur, habilement
distribuée, est chaude et harmonieuse. Le
temps, si meurtrier pour les œuvres hâtives et '
négligées, en améliorera, en l'atténuant, la
savante tonalité. On peut prédire, à coup
sur, je pense, que Van Moer restera l'une des
gloires artistiques de Bruxelles et occupera
toujours une place honorable dans les an-
nales de notre école de peinture.

Alphonse Wauters.

REVUE MUSICALE.

Parmi les publications de circonstance se
l'apportant aux festivités de Noël et de Nou-
velle Année nous citerons : pour la maison
Cranz, de Bruxelles, une série de jolies coni
positions pour piano, les unes, très reniai'-
 
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