Note annexe sue l'argenteus-outen.
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d'argent frappée par Aryandès. Mais ensuite j'avais trouvé la mention de l'argenteus — avec les mêmes
calculs — antérieure à Darius et à Aryandès. J'en étais là quand M. Naville m'a communiqué une très
remarquable inscription hiéroglyphique, de l'an 21 de Philadelphie, qu'il a récemment découverte, et qui
contient une liste de sommes perçues pour l'impôt foncier et pour l'impôt personnel ou la capi-
tation des habitants c»=^ ^ vg> '. Toutes ces sommes sont en argent — ce qui confirme admi-
rablement mes conclusions sur l'étalon d'argent pendant la première partie de la domination lagide. Mais
ce n'est pas là la seule donnée métrologique précieuse de notre stèle (si intéressante d'ailleurs au point
de vue de l'économie politique). Nous y voyons, par exemple, s'échanger l'argenteus, exprimé comme en
démotique, par le seul caractère de l'argent fj^T), et l'outen d'argent F^fwTj principale unité pondérale
antique des Égyptiens. On sait que dans la Bible il en est de même et que le «"pan bpw sékel d'argent
(principale unité pondérale et monétaire des Hébreux) s'échange avec la simple mention =]D3 argenteus. Il
faut donc nécessairement admettre que l'argenteus était primitivement (sous Amasis et Darius, par exemple)
un outen d'argent. Cette conclusion paraît d'autant plus naturelle que la sigle l£ qui se joint parfois à
celle de l'argent (£3) pour désigner l'argenteus ressemble beaucoup à certaines ligatures désignant l'outen
en hiératique. Mais comment, alors, en est-on venu à assimiler l'argenteus ou outen d'argent à 20 drachmes
ou 5 sékels-tétradrachmes ptolémaïques ne pesant que les 4/5 de l'outen antique? Il me semble que ce
problème n'est pas difficile à expliquer. Nous avons eu l'occasion de voir que Ptolémée Soter avait com-
mencé par frapper des drachmes attiques, comme Alexandre, et n'en était venu que progressivement au
poids dit Ptolémaïque. Lors des drachmes attiques, 20 drachmes pesaient 87 grammes : et l'outen antique
n'en pesait que 90 environ. L'écart était, on le voit, peu considérable et l'on avait trouvé commode de faire
concorder ainsi les poids-monnaies des Grecs avec les poids-monnaies des Égyptiens1. En partant de la
même drachme, le sekel fort, babylonien et sémitique, équivalant comme poids à la double darique d'or des
Persans, valait aussi 4 drachmes ou environ le 5e de l'outen. Cela avait l'avantage de faire concorder encore
avec le système égypto-grec, le système des provinces asiatiques possédées par les Ptolémées. Ainsi fut fait :
et l'on conserva les mêmes équivalences, quand le tétradrachme baissa de poids jusqu'à tomber d'abord de
17 gr. 40 à 14, 50 au maximum pour se rapprocher de la pièce d'argent de Philippe 2 et enfin à 12 environ sous
Evergète II par suite de fraudes successives. Lors de l'assimilation primitive des poids-monnaies le 10e de
l'outen, le kati ou kits, avait pris également la valeur du didrachme puisque l'outen valait 20 drachmes.
Cette valeur lui resta, comme celle de 20 drachmes à l'outen, lors de la diminution progressive des poids
et c'est ainsi que ritê signifie toujours en copte didrachma, signification qui n'a été à peu près exacte
(comme celle de l'outen) qu'à l'époque de la drachme attique. Tout devient ainsi parfaitement clair dans
les noms monétaires démotiques et coptes. On aurait seulement tendance à s'étonner de la persistance
du nom (l'argenteus, s'appliquant non plus seulement à l'outen d'argent, mais à l'outen de cuivre. Ce fait
montre que fw^ (comme =]C3 chez les Hébreux) était devenu le nom principal de l'unité monétaire en
usage, c'est-à-dire en Egypte de l'outen, du temps de l'étalon d'argent.
Ajoutons que l'argenteus-outen primitif se retrouve même assez tardivement à l'époque ptolémaïque
sous le nom (ïargenteus fondu du temple de Ptah. Cet argenteus fondu, ancien lingot-outen était expressé-
ment distingué de l'argent gravé (ef-Jcet) apyjptou s7:i<n]fj.ou, c'est-à-dire à la frappe des Ptolémées. On a soin
de spécifier pour le lingot marqué qu'il s'agit de la fonte du temple de Ptah, c'est-à-dire du \ oids sacré
et non du poids monétaire ordinaire. De même, pour éviter l'erreur de chiffres, on donne un calcul par
fractions : «21 argenteus fondus du temple de Ptah ou 20 argenteus plus 5/c> 7io> Véo? Veo, Veo (valant un
entier), 21 argenteus fondus du temple de Ptah en tout» au lieu de dire, comme pour les monnaies gravées :
«21 argenteus ou 120 sekels (tétradrachmes ptolémaïques), 21 argenteus en tout» ou bien encore, mais pour
d'autres sommes, comme dans les exemples suivants :
«en outen d'argent, argenteus 5, en sékels 25, en outen d'argent, argenteus 5 en tout, argenteus gravés»
ou bien encore :
1 Nous avons déjà fait remarquer que l'outen d'argent (argenteus de 20 drachmes) répondait comme valeur à la principale unité
d'or ou y_puaouç didrachme des Athéniens.
2 Voir dans la Revue, t. II, n° II—III. p. 219, 229, 232 et suiv., ce que nous avons dit de ces pièces de Philippe, d'après les-
quelles Ptolémée Soter fit fondre les tétradrachmes proprement ptolémaïques. Ptolémée, qui passait pour fils de Philippe, tâchait de se
rattacher le plus possible à ce prince et il n'avait pas eu de peine à renoncer peu à peu au nouveau système purement attique imaginé par
son frère putatif Alexandre. Le poids des pièces de Philippe varie généralement entre 14, 56 et 14, 06. Il s'en trouve même de plus légères.
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d'argent frappée par Aryandès. Mais ensuite j'avais trouvé la mention de l'argenteus — avec les mêmes
calculs — antérieure à Darius et à Aryandès. J'en étais là quand M. Naville m'a communiqué une très
remarquable inscription hiéroglyphique, de l'an 21 de Philadelphie, qu'il a récemment découverte, et qui
contient une liste de sommes perçues pour l'impôt foncier et pour l'impôt personnel ou la capi-
tation des habitants c»=^ ^ vg> '. Toutes ces sommes sont en argent — ce qui confirme admi-
rablement mes conclusions sur l'étalon d'argent pendant la première partie de la domination lagide. Mais
ce n'est pas là la seule donnée métrologique précieuse de notre stèle (si intéressante d'ailleurs au point
de vue de l'économie politique). Nous y voyons, par exemple, s'échanger l'argenteus, exprimé comme en
démotique, par le seul caractère de l'argent fj^T), et l'outen d'argent F^fwTj principale unité pondérale
antique des Égyptiens. On sait que dans la Bible il en est de même et que le «"pan bpw sékel d'argent
(principale unité pondérale et monétaire des Hébreux) s'échange avec la simple mention =]D3 argenteus. Il
faut donc nécessairement admettre que l'argenteus était primitivement (sous Amasis et Darius, par exemple)
un outen d'argent. Cette conclusion paraît d'autant plus naturelle que la sigle l£ qui se joint parfois à
celle de l'argent (£3) pour désigner l'argenteus ressemble beaucoup à certaines ligatures désignant l'outen
en hiératique. Mais comment, alors, en est-on venu à assimiler l'argenteus ou outen d'argent à 20 drachmes
ou 5 sékels-tétradrachmes ptolémaïques ne pesant que les 4/5 de l'outen antique? Il me semble que ce
problème n'est pas difficile à expliquer. Nous avons eu l'occasion de voir que Ptolémée Soter avait com-
mencé par frapper des drachmes attiques, comme Alexandre, et n'en était venu que progressivement au
poids dit Ptolémaïque. Lors des drachmes attiques, 20 drachmes pesaient 87 grammes : et l'outen antique
n'en pesait que 90 environ. L'écart était, on le voit, peu considérable et l'on avait trouvé commode de faire
concorder ainsi les poids-monnaies des Grecs avec les poids-monnaies des Égyptiens1. En partant de la
même drachme, le sekel fort, babylonien et sémitique, équivalant comme poids à la double darique d'or des
Persans, valait aussi 4 drachmes ou environ le 5e de l'outen. Cela avait l'avantage de faire concorder encore
avec le système égypto-grec, le système des provinces asiatiques possédées par les Ptolémées. Ainsi fut fait :
et l'on conserva les mêmes équivalences, quand le tétradrachme baissa de poids jusqu'à tomber d'abord de
17 gr. 40 à 14, 50 au maximum pour se rapprocher de la pièce d'argent de Philippe 2 et enfin à 12 environ sous
Evergète II par suite de fraudes successives. Lors de l'assimilation primitive des poids-monnaies le 10e de
l'outen, le kati ou kits, avait pris également la valeur du didrachme puisque l'outen valait 20 drachmes.
Cette valeur lui resta, comme celle de 20 drachmes à l'outen, lors de la diminution progressive des poids
et c'est ainsi que ritê signifie toujours en copte didrachma, signification qui n'a été à peu près exacte
(comme celle de l'outen) qu'à l'époque de la drachme attique. Tout devient ainsi parfaitement clair dans
les noms monétaires démotiques et coptes. On aurait seulement tendance à s'étonner de la persistance
du nom (l'argenteus, s'appliquant non plus seulement à l'outen d'argent, mais à l'outen de cuivre. Ce fait
montre que fw^ (comme =]C3 chez les Hébreux) était devenu le nom principal de l'unité monétaire en
usage, c'est-à-dire en Egypte de l'outen, du temps de l'étalon d'argent.
Ajoutons que l'argenteus-outen primitif se retrouve même assez tardivement à l'époque ptolémaïque
sous le nom (ïargenteus fondu du temple de Ptah. Cet argenteus fondu, ancien lingot-outen était expressé-
ment distingué de l'argent gravé (ef-Jcet) apyjptou s7:i<n]fj.ou, c'est-à-dire à la frappe des Ptolémées. On a soin
de spécifier pour le lingot marqué qu'il s'agit de la fonte du temple de Ptah, c'est-à-dire du \ oids sacré
et non du poids monétaire ordinaire. De même, pour éviter l'erreur de chiffres, on donne un calcul par
fractions : «21 argenteus fondus du temple de Ptah ou 20 argenteus plus 5/c> 7io> Véo? Veo, Veo (valant un
entier), 21 argenteus fondus du temple de Ptah en tout» au lieu de dire, comme pour les monnaies gravées :
«21 argenteus ou 120 sekels (tétradrachmes ptolémaïques), 21 argenteus en tout» ou bien encore, mais pour
d'autres sommes, comme dans les exemples suivants :
«en outen d'argent, argenteus 5, en sékels 25, en outen d'argent, argenteus 5 en tout, argenteus gravés»
ou bien encore :
1 Nous avons déjà fait remarquer que l'outen d'argent (argenteus de 20 drachmes) répondait comme valeur à la principale unité
d'or ou y_puaouç didrachme des Athéniens.
2 Voir dans la Revue, t. II, n° II—III. p. 219, 229, 232 et suiv., ce que nous avons dit de ces pièces de Philippe, d'après les-
quelles Ptolémée Soter fit fondre les tétradrachmes proprement ptolémaïques. Ptolémée, qui passait pour fils de Philippe, tâchait de se
rattacher le plus possible à ce prince et il n'avait pas eu de peine à renoncer peu à peu au nouveau système purement attique imaginé par
son frère putatif Alexandre. Le poids des pièces de Philippe varie généralement entre 14, 56 et 14, 06. Il s'en trouve même de plus légères.
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