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Revue égyptologique — 3.1883

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Nr. 3
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Revillout, Eugène: La location: leçon professée à l'École du Louvre (cours de droit égyptien)
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https://doi.org/10.11588/diglit.10047#0168

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128

Eugène Revillout.

seuls maîtres du sol. — Second danger : second abîme. — Bocchoris voulut éviter égale-
ment Carybde et Scylla. De là proviennent les différences essentielles qui séparent la vente
de la location. Dans la vente, disions-nous, le vendeur seul est obligé, car il est payé d'avance.
Dans la location le locataire seul est obligé, car il doit payer plus tard, à la façon d'un débiteur
ordinaire. Loin de rapprocher, comme en droit romain récent, la vente de la location, Bocchoris
les a séparées autant que possible dans deux espèces toutes différentes de contrats. Je dirais
que la vente égyptienne ressemble à la mancipation si la vieille mancipation romaine, — basée
essentiellement sur une revendication faite par l'acheteur, (qui a payé le prix entier, comme
chez les Égyptiens), n'était pas pour ainsi dire étrangère au vendeur, n'adhérant que par son
silence, au lieu de s'obliger personnellement, comme dans le droit de Bocchoris. En somme,
la vente de la vallée du Nil participait de la nature de la mancipation en ce que c'était un
transfert de propriété donnant lieu à des actions réelles, et de la nature des contrats en ce
qu'elle créait sur le vendeur une obligation personnelle — mais uni-latérale — uniquement
à sa charge, au lieu d'être bilatérale, à la charge du vendeur et de l'acheteur, ainsi que dans
Yemptio-venditioK La location égyptienne, au contraire, tout en ayant un bien-fonds pour
objet, était avant tout une obligation personnelle du même genre que le prêt, — ou, si l'on
veut, que l'antique stipulation romaine, — et qui tombait tout entière sur le preneur, au lieu
de tomber tout entière, à la façon de la vente, sur le bailleur. C'est pour cela que le prix
de la location doit être versé plus tard, soit en un terme, soit en plusieurs termes, comme
dans les prêts, au lieu d'être versé d'avance, comme dans la vente. En effet celui-là seul est
obligé qui a reçu quelque chose, soit en biens-fonds, soit en argent, soit en nature : en biens-
fonds s'il s'agit d'une location; en argent s'il s'agit d'une vente, toujours soldée d'avance en
argent; en nature s'il s'agit d'un mutuum, etc. Quiconque a reçu ainsi doit rendre, c'est-à-dire
livrer réellement et complètement l'objet qui forme la base du contrat. S'il s'agit d'une vente,
il doit livrer le bien, non pas une fois et en apparence, mais réellement et complètement —
toujours -— c'est-à-dire en prouvant la légitimité perpétuelle de sa propriété et en la défen-
dant contre toute atteinte. S'il s'agit au contraire d'une location ou d'un prêt, il doit livrer
le prix stipulé, soit par le contrat, soit par la loi réglant le taux de l'intérêt et les autres
clauses accessoires. Dans l'un et l'autre cas on a vraiment affaire à une dette payable à
termes fixes, aux échéances. Les mêmes garanties se trouvaient donc clans les deux genres
de contrats, qui ont quelques formules presque entièrement similaires : notamment en ce que
concerne l'hypothèque générale, assurée par le preneur au bailleur sur tous ses biens, l'amende
ou la clause pénale, stipulée en certains cas pour non exécution exacte du contrat, le rôle
du ret ou procureur du bailleur, pouvant faire valoir les droits résultant du contrat à toute
époque, etc. Enfin c'est le locataire ou l'emprunteur qui rédige seul le contrat et s'oblige;
tandis que dans la vente c'est l'autre partie : le vendeur. Notons cependant une différence
importante entre le prêt et la location. Dans le prêt, le bailleur, ayant livré ce qui forme
l'objet du contrat, n'a, quant à lui, d'obligations d'aucune sorte par rapport au preneur. Dans
la location, bien qu'il ait livré la chose, cette chose restant sienne, il peut la reprendre : il
doit même la reprendre à l'échéance. Tant qu'il ne la reprend pas, il n'a d'obligations d'aucune

1 Ces mots emptio-venditio sont cependant un souvenir de l'ancienne mancipatio par la place prépon-,
dérante accordée à l'acheteur sur le vendeur.
 
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