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L' art: revue hebdomadaire illustrée — 16.1890 (Teil 2)

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Bosseboeuf, Louis-Auguste: Les sculptures de Solesmes et l'école de Tours, I-VII
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https://doi.org/10.11588/diglit.25870#0247

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LES SCULPTURES DE SOLESMES ET L'ECOLE DE TOURS.

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Essayons, s’il se peut, de jeter un rayon de lumière
sur cette œuvre magnifique, mais enveloppée de mystère.
On parle « des saints, des sculptures, des statues de
Solesmes », en se bornant à les classer en deux catégories,
celle de 1496, que nous connaissons, et celle de 1553,
suivant une date à laquelle nous reviendrons : illusion au
premier chef. Dans les monuments qui occupent le tran-
sept nord, il est nécessaire de reconnaître trois époques
bien distinctes par le caractère de l’ensemble et des détails.
Au milieu de ce somptueux entassement de sculptures et
de personnages qui, à première vue, paraissent assez
homogènes, on aperçoit, après examen, une première
construction formée de trois parties : le portique du fond
et les deux ailes en retour se terminant à l’arcade qui
ouvre le bras nord de ce transept ; le portique du fond a
environ 4 mètres de long et ceux des côtés 3 m. 5o cent. ;
la hauteur commune de ce bel œuvre, d’une ordonnance
achevée, est, jusqu’à l’entablement, de 41m. 80 cent. Nous
n’essayerons pas de décrire
la richesse du portique cen-
tral, avec ses grandes lignes
formées de quatre pilastres
supportant un entablement
soutenu par des consoles
fleuries, et, entre les pilastres
extrêmes, deux niches sur-
montées de dais ravissants ;
la partie principale offre trois
jolies arcades, dont une plus
grande et surbaissée, et les
deux petites reposant sur
deux colonnes et deux pilas-
tres ; puis, au-dessus, une
galerie décorée de quatre
niches à coquille avec per-
sonnages. Jamais il n’a été
plus vrai de dire que le ciseau
s’est joué des difficultés et
s’est plu à couvrir les pieds
droits, les arcades, les co-
lonnes, les pilastres et cha-
piteaux, les niches et surtout
la frise, de ce que l’on peut
imaginer de plus gracieux :
rinceaux, oiseaux, mascarons,
génies, feuilles et fruits s’y
déroulent avec une légèreté
et une élégance qui n’ont
d’égale que la variété des motifs. A l’intérieur, dans une
grotte ou chapelle disposée en parallélogramme, sont huit
niches, dont quatre au fond et quatre sur les côtés; le
plafond, en cintre surbaissé, est divisé en caissons, au
centre, et, sur les côtés, par des nervures avec un pen-
dentif très en relief.

La même richesse, au service du même goût, se
retrouve dans le portique de gauche. On remarque, en
particulier, sur les colonnes, les instruments de la Passion ;
sur les frises, des têtes de mort d’un réalisme achevé, —un
des clichés de la Renaissance, — et, dans les écoinçons,
des têtes d’anges; la partie de la frise correspondant aux
pilastres est ornée de deux charmants petits personnages
assis, dont l’un tient une sphère à jour. Ici, il importe de
signaler une différence dans la disposition. Les colonnes,
au lieu de reposer sur le sol, portent sur un soubassement
d’environ 1 m. 25 cent, de haut, de façon que la chapelle
ou grotte est surélevée. Elle est à cinq pans, dans chacun
desquels s’ouvre une niche avec pilastres; par exception,
celui du fond en a deux. La voûte, coupée de nervures
Tome XLIX.

style xvie siècle, laisse voir plusieurs pendentifs dont,
au centre, un plus allongé, qui est décoré d’un ange avec
une banderole. En raison de l’élévation dont nous avons
parlé, il n’existe pas de galerie au-dessous de la frise, dans
laquelle se déploie également toute la souplesse de l’orne-
mentation Henri II.

L’habileté du sculpteur paraît au même degré dans un
portique semblable, qui est actuellement dans le transept
sud. La frise est formée de rinceaux terminés à une extré-
mité par un personnage et un oiseau, à l’autre, par un
cheval marin avec cartouches découpés ; les colonnes, un
peu renflées vers le centre, sont ornées d’arabesques, de
grotesques, d’oiseaux et de génies ; celle du milieu, à
gauche, porte sur un cartouche, en chiffres de grande
dimension, la date 1553. Ici et là, les têtes, bustes ou sta-
tuettes, qui donnent le mouvement à ce monde de sculp-
tures décoratives, ne sont pas moins dignes de remarque
et font penser, pour leur finesse, aux sujets des collégiales

d’Oiron et de Champigny-
sur-Veude et aux bas-reliefs
du tombeau de Guillaume de
Langey, dans la cathédrale
du Mans.

Quels ornemanistes ont
travaillé à cette merveille ?
nous ne le saurions dire. Si
l’on a cru pouvoir rapprocher
ces monuments de certains
édifices de l’Anjou, nous
pensons qu’on ne serait pas
moins fondé à les comparer
avec la sculpture dont le
ciseau des artistes de l’école
de Tours, les Betti ou Juste,
— Jean I, Juste, Jean II —
et leurs disciples, Pascherot
(Paschiarotti) et Claveau, a
pu décorer le mausolée des
enfants de Charles VIII, les
hôtels de Beaune ou Gouin
et certaines parties du cloître
Saint-Gatien, en particulier
un charmant plafond avec ses
caissons et ses consoles do-
rées; mais c’est ici le domaine
de l’hypothèse où nous
n’avons garde de pénétrer.
Pourtant nous ne sommes
pas réduits à de simples conjectures. A force de scruter
les replis de cette dentelle de pierre nous avons fini par
découvrir, dans la niche de la piscine et à gauche du der-
nier portique, un nom gravé au ciseau en lettres qui sont
bien contemporaines de la sculpture elle-même. Ce nom,
évidemment celui d’un sculpteur qui a travaillé au monu-
ment, est I. GIGAVLT. Peut-être mettra-t-il quelque
jour sur la trace de révélations plus larges et le voile se
lèvera-t-il tout entier. Pourquoi faut-il que ces statues si
parfaites n’aient pas le don des langues pour nous redire
leur paternité ?

La façade du portique présente, dans les niches que
nous avons indiquées et avec de longues légendes en
lettres gothiques noires, quatre personnages à mi-corps et
deux en pied, les uns et les autres le regard tourné vers le
ciel. Les premiers sont, en commençant par la droite,
saint Bernard en costume monastique avec la crosse abba-
tiale, deux évêques mitrés, les saints Anselme et Hilde-
phonse, et enfin un cardinal, saint Pierre Damien ou
saint Bonaventure, célèbres tous les deux pour leur parti-

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La Vierge et saint Jean, figures de la Mise au toaibeau.
par Michel Colombe. — Dessin de L. Le Riverend.
 
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