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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 22.1867

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Nr. 2
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Goncourt, Jules de; Goncourt, Edmond de: La Tour, [1]
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https://doi.org/10.11588/diglit.19883#0134

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LA TOUR

I.

uelquefois dans ces collections d’ama-
teurs logées au quatrième étage d’une
maison de Paris, et qui représentent
l’occupation , la privation et la joie de
toute une vie, il arrive d’apercevoir,
sur un coin de mur, un petit cadre
noir 1, au bas duquel un bout de pa-
pier porte d’une vieille écriture, d’une
encre jaunie, un nom qui se laisse à
peine lire. Là dedans, dans le châssis
de sapin, sous un verre à vitre, il y a
une feuille de papier qui a dû être bleue autrefois, et qui a maintenant
le passé du temps : elle est de travers dans le cadre, l’encadreur n’a
fait que plier en quatre la grande feuille, et l’a fourrée tant bien que
mal dans le bois noir. Vous regardez ce qu’il y a sur le papier :
quelques coups de crayon de couleur heurtés, de larges lumières à
la craie, des balafres de sanguine et de noir, rien que cela, — et c’est
une tête. Vous regardez toujours; cette tête vient à vous, elle sort
du cadre, s’enlève du papier, et il vous semble n’avoir jamais vu,
dans aucun dessin de n’importe quelle école, une pareille représentation
d’une ligure, quelque chose de crayonné qui fût autant quelqu’un de
vivant. Et à mesure que vos yeux étudient, votre admiration croît devant
cette brutalité créatrice et cette puissance d’animation, devant cette
science incomparable de l’anatomie du visage humain, l’armature des
traits, l’indication de l’orbiculaire enchâssant les yeux, le rendu prodi-

1. Ce petit cadre noir est le cadre dans lequel La Tour avait encadré toutes ses
;préparations, préparations qu’il semble avoir précieusement gardées jusqu’à sa mort,'
et dont il avait fait autour de lui comme un musée. C’est dans ces cadres noirs qu’on
les retrouvait encore, il y a quelques années, au Musée de Saint-Quentin.
 
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