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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 33.1886

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Nr. 3
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Baignères, Arthur: Théodore Chassériau
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https://doi.org/10.11588/diglit.19427#0235

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210

GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

Théodore Chassériau est né en 1819 à Saint-Domingue. Il arriva
ou plutôt il fut apporté à Paris lorsqu'il avait un an. Libre à ceux
qui croient à l’influence des milieux d’attribuer la couleur du peintre
à l’éclat du soleil natal ; ils accorderont en tout cas qu’il agissait sur
un inconscient. Pour moi je remonterai moins haut et, la part du
soleil faite, je constaterai celle de M. Ingres, qui fut considérable.
Chassériau entra dans son atelier avant quinze ans. On peut voir,
dans l’intéressant volume de M. Amaury Duval, quel était l’ensei-
gnement du maître, et comme il cherchait à inculquer à ses élèves
non seulement ses théories, mais encore sa pratique. Sa manière
de peindre était une religion, hors de laquelle il n’y avait point de
salut. Un pareil enseignement est très salutaire à l’extrême jeunesse.
Elle acquiert ainsi toutes les qualités du métier et la main se forme
avant l’esprit. Chassériau était-il parmi les élèves de M. Ingres le
jour où celui-ci visitant le Louvre leur dit, au moment d’entrer dans
la galerie des Rubens : « Saluez, messieurs, mais ne regardez pas. »
Chassériau, s’il s’y trouvait, n’a obéi qu’à moitié : il a salué, mais il
a regardé.

La carrière de l’adolescent semblait toute tracée. A voir ses
merveilleuses dispositions et son assiduité au travail, on comptait
qu’il concourrait pour le prix de Rome, et on ne doutait pas qu’il le
remportât. Mais, en 1834, M. Ingres fut nommé directeur de l’Ecole
de Rome. Chassériau le suivit à la Villa Médicis sans attendre le
concours, et la preuve qu’il travaillait aussi bien qu’un lauréat, c’est
qu’en 1839, à vingt ans, il exposait pour la troisième fois. Voici
comment Théophile Gautier parlait de lui dans le feuilleton du
journal la Presse: « Théodore Chassériau, quoiqu’il ait déjà exposé
plusieurs fois, est un très jeune homme, et son début ne doit en quelque
sorte dater que de cette année. Ses premiers tableaux annonçaient
d’heureuses dispositions, mais ils ne faisaient pas soupçonner toute
l’étendue et toute la portée de son talent. » Et après une analyse fort
approfondie des tableaux exposés, la Suzanne au bain et la Vénus marine,
il terminait par ces mots : « Nous prédisons à M. Chassériau l’avenir
le plus brillant, et, sans avoir la prétention d’être prophète, nous
nous sommes rarement trompé dans nos prédictions. » A propos de
la même exposition, M. Thoré (Bürger) écrivait dans le Constitutionnel :
« Encore un jeune artiste, M. Chassériau, qui a pris rang parmi les
peintres dont les ouvrages doivent occuper le public. M. Chassériau
est issu de l’Ecole de M. Ingres, mais c’est un élève peu orthodoxe. »
Rien n’est plus facile que de contrôler les jugements des deux critiques.
 
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