Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (2. Pér. 33.1886)

PAUL BAUDRY

Il a vécu, le glorieux peintre du foyer de l’Opéra, le
maître de l’art décoratif, celui qui nous rappelait les génies
féconds de la Renaissance. PaulBaudry est mort dimanche
17 janvier 1886, à quatre heures du matin. Huit jours
plus tôt il travaillait encore, plein de projets et d’espoirs,
confiant dans l’avenir, rêvant de grandes choses. Il sem-
blait entièrement remis de la redoutable maladie qui nous
avait tant alarmés l’an dernier. Nous le félicitions de ce
retour à la santé; nous nous pressions autour de l’ami
rendu à son art et à nos affections, et voilà qu’en quelques
jours il nous est enlevé, et ce noble cœur a cessé de battre,
et cette main savante est glacée.

Nous ne voulons point retracer ici la longue carrière
du Maître qui n’est plus. Au lendemain de cette mort
presque foudroyante, nous n’aurions pas la force de le
suivre pas à pas dans la route si glorieusement parcourue.
Et d’ailleurs que de fois ici même s’est-on arrêté sur ce nom
cher à la Gazette et à ses lecteurs. On aimait à parler de
lui, à signaler chacune de ses œuvres nouvelles, à étudier
les faces diverses de cet esprit si souple et si varié ; on
avait accueilli ses débuts avec de légitimes espérances, on
avait applaudi à ses triomphes avec un joyeux orgueil. Tout
récemment encore, quand les plafonds du foyer de l’Opéra,
si longtemps ensevelis, furent rendus au jour, nous avons
salué cette résurrection impatiemment attendue.

L’artiste aux nobles aspirations, à l’idéal toujours élevé,