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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 33.1886

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Nr. 4
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Lostalot, Alfred de: Revue musicale
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https://doi.org/10.11588/diglit.19427#0376

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REVUE MUSICALE.

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mêmes que lorsqu’on jouait la Damnation de Faust; mais il paraît qu’avec
la même affluence d’auditeurs et les mêmes dépenses, M. Godard coûtait de
l’argent à l’entreprise alors que Berlioz lui en rapporte. Le Tasse fut sacrifié.
Depuis il n’est venu à l’idée d’aucun directeur des concerts subventionnés
de remonter une œuvre qui fait honneur à la musique française; aucun
directeur des théâtres subventionnés ne s’est avisé de confier un livret au
jeune compositeur qui avait, dès ses débuts, affirmé sa valeur avec tant
d’éclat, et que ses rares qualités dramatiques semblaient expressément
désigner pour le théâtre.

A vrai dire, M. Godard a contre lui divers défauts graves : il n’est pas
riche, il n’est pas courtisan, et puis c’est un compositeur français. Ah! s’il
était étranger!

Les nouveaux venus parmi les musiciens français, mieux avisés, font
tout ce qu’ils peuvent pour faire oublier leur origine. Ainsi, les deux lauréats
du dernier concours de la ville semblent-ils s’être préoccupés avant tout de
dissimuler leur nationalité. Dans la crainte d’être entraînés malgré eux à
certaines tournures d’inspiration ou de facture qui les eussent trahis, ils ont
l’un et l’autre bâti leur œuvre sur un thème littéraire où l’esprit français ne
saurait trouver son développement naturel. Les insipides légendes d’outre-
Rhin dont ils ont fait choix ne peuvent en effet être traduites en musique
que par un verbiage pompeux qui est rebelle à toute expression pathétique.
Or, le génie français ne se montre que lorsqu’il y a de l’esprit ou des passions
en jeu et que l’artiste en est égayé ou ému au point d’oublier qu’il a fait ses
classes.

Quand on aura proclamé que le lauréat du concours municipal de 1884-1883
est un musicien fort, très fort, on lui aura rendu toute la justice qui lui est
due. Il connaît ses auteurs à fond et sait en tirer profit. J’ajouterai que
l’amalgame dont est composé son propre talent est parfaitement rationnel ;
il n’y confond pas des maîtres disparates. Les procédés fusionnés de Weber,
Berlioz et Wagner lui donnent un alliage de haute valeur dont il se sert avec
goût et parfois même avec une certaine puissance. M. Vincent d’Indy a donc
beaucoup d’acquit et un réel talent; mais dans le genre qu’il a choisi, cela
ne suffit pas; pour y réussir, il faut avoir du génie.

M. d’Indy, à la fois poète et musicien dans le Chant de la cloche, a emprunté
son sujet à Schiller. Voici, en peu de mots, l’analyse de cette légende. Les
ouvriers viennent de terminer une cloche colossale, dernière œuvre du
maître fondeur Wilhem. Celui-ci, arrivé au déclin de la vie, souhaite de
revoir avant de mourir les principaux événements de son existence où les
cloches ont joué un rôle. « Des nuages passent devant la scène », dit le livret,
et divers tableaux apparaissent successivement où ces événements sont mis
en action. C’est le Baptême, avec son cortège et ses joyeux carillons;
Y Amour : l’on entend au crépuscule un tendre duo scandé par les tintements
de l’Angélus; la Fête suv la place du marché; les cloches se mettent en branle
pour célébrer l’inscription de Wilhelm au livre de maîtrise. Voilà pour la
première partie, tout entière consacrée aux événements heureux; dans la
seconde, le maître fondeur revoit les jours noirs de son existence : Lénore
est morte ! Minuit sonne. Apparition de la bien-aimée qui fait renaître
 
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