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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 2. Pér. 33.1886

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Nr. 6
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Lostalot, Alfred de: Salon de 1886, 1, La peinture
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https://doi.org/10.11588/diglit.19427#0513

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS.

été reléguées clans les hauteurs ; nous voulons croire que dans le
remaniement des toiles du Salon une meilleure place leur sera
réservée ; en tous cas, le peintre pourra se consoler en pensant, avec
M. Belmontet, que l’estime du public est la plus belle des cimaises.

Notre admiration pour les Baigneuses de M. Harrison ne nous
empêche pas de voir ce qu’il y a de grâce et de valeur réelle dans la
Femme au masque de M. Gervex, et dans la nymphe annuelle de

M. Henner; nous sommes ici en présence de nudités où l’exquise

qualité des colorations désarme toute critique. Enfin, je comprends
qu’on ne soit pas indifférent à la beauté factice de la Vénus de

M. Mercié et d’une jeune fille nue, étendue sur l’herbe, que M. R.

Collin a exposée sous le titre de Floréal. Le mensonge est permis en
peinture ; il a,parfois plus d’attrait que la vérité. Nous ne pensons pas,
en écrivant cette phrase, aux figures nues de M. Bouguereau, — si
affadies par les lavages et les savonnages qu’elles feraient prendre en
haine la propreté, — mais à un certain nombre d’ouvrages où le nu
nous apparaît très étudié dans les lignes et les colorations que lui
a faites la convention. Ces peintures contiennent encore une part
de vérité; en somme, la convention 11’a-t-elle pas été bâtie sur l’ob-
servation d’un certain nombre de documents vrais? Notre devoir
étant de reconnaître le talent partout où il se trouve, nous n'hésitons
pas à citer ici MM. L. Perrault, Chartran, P. Leroy et J. Ferry, dont
les figures académiques nous ont paru très recommandables.

Je passerai légèrement sur la peinture religieuse : elle n’est plus.
L’histoire ne vaut guère mieux; quelques peintres malintentionnés
ou d’une incapacité trop flagrante sont en train de lui porter les der-
niers coups. Que dire de la Folie du roi Nabuchodonosor de M. Roche-
grosse? On ne se sent même pas le courage de rire devant cette
triste peinture, d’une exécution à la fois si prétentieuse et si gros-
sière : le sujet est traité en scène d’opérette, mais feu Biard y eût
mis plus de gaieté. Il faut bien nous arrêter devant le tableau de
M. Benjamin Constant; la toile est gigantesque et vide, si vide qu’on
est pris de vertige. Justinien, dit le livret, et nous voyons assis à la
file, face au spectateur, une série d’êtres fossiles qu’on croirait fraîche-
ment exhumés : leurs riches vêtements ont conservé une certaine
fraîcheur, mais ils ne recouvrent plus rien ; les personnages sont
momifiés; de l’empereur et de son conseil, voilà tout ce qu’il reste.
 
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