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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 39.1908

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Nr. 1
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Bénédite, Léonce: J.-J. Henner, 5: artistes contemporains
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https://doi.org/10.11588/diglit.24866#0058

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

se figurer qu’une tète pourrait exprimer tout ce que disait celle
de la mère ». Ils partent tellement émus qu’ils se disent : « Com-
ment est-il possible que ces gens-là ne soient pas exaucés! » et
qu’ils n’auraient « pas été surpris de voir le miracle se faire ».
« M. Schnetz », ajoute-t-il, « m’a bien recommandé de réfléchir à
tout cela et de ne pas le perdre de vue et m’a dit que c’était là
qu’il a eu l’inspiration de son tableau intitulé Le Vœu à la Madone. »

Cette vie populaire, nous verrons que Henner, soit par souvenir
de son passé alsacien, soit par l'effet des encouragements de son
directeur, s’efforcera de la traduire, comme il a fait pour celle de
sa province natale. Mais il n'est plus bien celle fois dans son élé-
ment. tant il est maintenant changé, tant son esprit est habitué,
sous la conduite des maîtres, à voir les réalités de plus haut que
l’épisode, l’anecdote ou le pittoresque.

Néanmoins il apporte une ardeur qui ne s’attiédit pas à repaître
sa vue et son imagination de la beauté de ces spectacles, soit par
raison de pure délectation organique, soit par une préoccupation
plus ou moins consciente d’enseignement; car il opère un rappro-
chement constant entre l’œuvre des maîtres et le milieu où elle est
née, l’un faisant mieux comprendre l’autre, et réciproquement.
Quand il est rassasié un peu de tout le singulier et de tout le pitto-
resque, il s’attache à contempler d’un œil ému et ravi, interroga-
teur et pénétrant, les splendeurs de la nature et la beauté de la
femme. Et désormais il est fixé sur ses goûts, sur son orientation
définitive, sur ce qui était par prédestination sa vocation, jus-
qu’alors obscurément voilée.

Henner, en effet, aura puisé, en Italie, à trois sources d’enchan-
tements : la nature, la femme et l’art, l’art dont le but principal,
lui semble-t-il, est d’exalter les deux autres.

Gomme nous le savons, Henner a été de tout temps sensible au
plus haut point aux impressions du paysage. Nul modeste coin
d’Alsace ou même de la banlieue de Paris ne le laisse indifférent.
On peut comprendre dans quel état d’exaltation continue il se
trouve durant ces cinq années et demie où, rien que de la fenêtre
de sa chambre, il assiste à cette féerie perpétuelle du ciel italien.
A chaque instant, quand il écrit, il interrompt son journal ou sa
lettre par des exclamations lyriques : « Dieu ! quel beau ciel ! Je
viens de relever le nez et j’aperçois par ma fenêtre le Monte Mario
avec ses cyprès et ses pins d’Italie. Le ciel est d’un bleu gris en
 
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