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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 39.1908

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Nr. 2
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Gayet, Albert: Les portraits d'Antinoe͏̈
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https://doi.org/10.11588/diglit.24866#0145

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LES PORTRAITS D’ANTINOE

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prière est douée d’un pouvoir magique. Les versets de l’office sont
une incantation. La divinité invoquée est contrainte de se manifester,
d’obéir en quelque sorte à celui qui sait prononcer son nom véri-
table. C’est le propre de la liturgie d’exercer un pouvoir absolu
sur les puissances célestes, quel que soit le but de l’évocation.

Le christianisme primitif no pouvait échapper à cette loi, pas
plus qu’à l’importance attachée à la célébration du mystère. Aussi,
le geste donné par le portrait du personnage demeure-t-il le point
essentiel à dégager. La prise en possession de la couronne d’élec-
tion rentre dans ce cas; le port de la croix ansée aussi, puisqu’elle
apparaît comme le gage de la vie d’outre-tombe. L’épi de blé se
comprend pareillement. A l’époque antique, il avait été le symbole
d’Osiris, uni à la Terre, Isis. Les hymnes pharaoniques comparent
très souvent le dieu au grain de blé, qui germe de lui-même. Aussi,
quand, par l’intermédiaire des maîtres de l’Ecole d’Alexandrie, le
Christ fut devenu pour l’Egypte un autre Osiris, que le soleil de
l’Euchologe fut assimilé à celui qui avait brillé au ciel de nuit,
éclairant le monde funèbre, cet épi fut encore, pour elle, le corps du
nouveau dieu. La présence des lys est autrement caractéristique.
Inconnus sur les rives du Nil, ils relèvent uniquement du christia-
nisme primitif, qui, avec les roses, en fit les deux seules fleurs du
jardin paradisiaque où trône le Bon Pasteur. Et ce jardin, pourtant,
la donnée première s’en trouvait dans la religion pharaonique. C’est
lui que souhaite l’invocation du mort : « Donnez-moi de l’eau cou-
rante à boire, mettez-moi la face au vent du nord, sur les bords du
canal, et que sa fraîcheur calme mon cœur. » Cette source rafraîchis-
sante, désirée, devint, par image, celle qui versait la vie aux âmes
altérées de béatitudes célestes. Quand le culte isiaque s’introduisit à
Rome, elle reçut le nom de refrigerium, qui passa dans la liturgie de
l’Eglise, pour désigner le Paradis, de même que l’expression dormis
æterna était empruntée à celle de « demeure éternelle » donnée
par les Egyptiens à leurs tombeaux.

Un dernier geste, sur lequel on ne saurait trop insister, est celui
fourni par l’un des portraits d’hommes retrouvés cette année même.
La main gauche tient bien encore la couronne d’élection, mais la
droite décrit l’un des gestes, par lesquels les premiers chrétiens se
reconnaissaient entre eux, celui qui consistait à former avec les
doigts l’ensemble du monogramme divin XP. On peut, il est vrai,
voir aussi dans ce geste celui du prêtre qui vient de consacrer
l’hostie, geste qu’a conservé la liturgie. La première interprétation
 
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