Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (3. Pér. 39.1908)

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tienne », « sujet encore hasardeux », avoue-t-il d’ailleurs : « j’ai peut-
être encore été mal inspiré » ; un Sacrifice cl'Abel que Schnetz trouve
a trop doucereux » et dont il le dégoûte pour le pousser vers des
sujets plus énergiques; Philoctète sur un rocher, qu’il exécute « sans
aucun goût ». « Aussi », conclut-il, « ai-je fait la chose la plus insi-
gnifiante et la plus poncive du monde. » Il s’est donné beaucoup de
peine et a perdu beaucoup de temps sans résultat sur une Sainte
Christine; il termine enfin une esquisse d’Ar/ar clans le désert,

qui figure dans les envois de 1862.

Bien que naturellement respec-
tueux et déférent et peu enclin aux
protestations turbulentes, Ilenner ne
peut s’empêcher de montrer de loin
en loin quelque mauvaise humeur
\ À envers l’Institut. 11 va jusqu’à écrire à
propos de ses envois : « Qu’on dise ce
qu’on voudra, je m’en fiche, même de
ce que dira l’Académie. » 11 l’accuse
aussi de n’avoir pas voulu « trop sanc-
tionner le succès » qu’il a eu avec son
Jeune baigneur endormi, en ne lui
accordant au Salon qu’une médaille de
3° classe.N’oublions pas, d’ailleurs,que
nous sommes en 1863, en pleine lutte
des artistes contre les intolérances du
jury, que d’excellents esprits s’étaient
unis de toutes parts contre ses exclu-
sions fanatiques et que le gouverne-
ment impérial avait dû intervenir,
celte même année, en organisant officiellement l’Exposition des
Refusés. L’écho de ces querelles n’arrivait, sans doute, qu’assez
affaibli à Rome; mais comment l’esprit indépendant de Henner,
que nous voyons scandalisé de la distribution qui a été faite des
médailles et « honteux » de celle qui lui a été décernée, quand il
voit « les noms de ceux qui ont des premières » ; comment n’eût-il
point partagé quelque peu les impatiences des exposants parisiens?

Ce qui désole Henner au milieu de tout cela, c’est qu’il a peut-
être conscience d’avoir découvert sa voie. Il se connaît très bien. Il
n’aime pas les grandes toiles, et il répugne de même aux composi-
tions compliquées. Le 20 juin 1861, dans une de ses lettres a l ita-

ÉTUDE POUR « SUZANNE AU BAIN »
DESSIN PAR J.-J. HENNER