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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 39.1908

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Nr. 5
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Beaunier, André: Les salons de 1908, 1
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https://doi.org/10.11588/diglit.24866#0408

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382

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

Eve est toute nue, évidemment, et ne se tient pas mal. Adam, tout
nu, se vautre dans l’herbe ; et il a vraiment les muscles d’un gaillard,
des pectoraux superbes, une peau magnifique. Ce sera, cette Eve et
cet Adam, reconnaissons-le, un beau couple.

Un vigoureux arc-en-ciel — violet, indigo, bleu, vert, jaune,
orangé, rouge — encadre ces vaillantes nuptialités. Il consacre l’al-
liance des époux, sans doute ; et il est là comme un prodigieux
anneau nuptial.

Mais a-t-il raison d’être là?... Et oserais-je objecter à M. Gustave
Courtois un petit anachronisme?... Il me semble que l’arc-en-ciel
n’est pas antérieur à Noé ; quand le Paradis était encore terrestre,
il n’y avait pas d’arc-en-ciel. M. Gustave Courtois a donc négligé
la couleur locale : du reste, c’est le moindre tort qu’il ait eu à
l’égard de toute couleur!...

Et puis, cet arc-en-ciel rendait au peintre le service de diviser en
deux parties le panneau. Car, à gauche de l’arc-en-ciel, on voit ces
jeunes gens au temps de leurs primes amours; à droite, on les re-
trouve, les mêmes un peu plus tard, et qui ont eu un petit enfant.
C’est Caïn, si je ne me trompe, mais on ne s’en doute pas encore, tant
il n’est jusqu’ici qu’un bébé sage dans les bras de sa mère. Celle-ci
est habillée, désormais; et son mari travaille : pêcheur, il s’occupe
de ses filets et de son bateau.

Je ne saurais trouver de mots pour dire l’cnorme drôlerie de ce
tableau où sont deux Eve et deux Adam respectifs. Avant la faute et
après la faute. « Avant, après », — comme on voit, sur des pro-
spectus illustrés, une dame qui était chauve et qui ne l’est plus, avant
et après l’emploi de telle lotion capillaire.

Avec tout cela, quelle est l’idée qu’a voulu exprimer M. Courtois?
On ne met pas ainsi en symétrie, en pendant, de pareils emblèmes,
sans avoir un projet didactique !... Qu’est-ce que l’auteur du Paradis
perdu veut donc enseigner aux fiancés que la mairie de Neuilly
accueillera? La supériorité, probablement, de l’état conjugal sur
l’état d’innocence, même paradisiaque.

Ce n’est pas grave. Et, plutôt que d’épiloguer longtemps sur ce
thème, constatons que ces nudités édéniques n’étaient peut-être
pas tout indiquées pour une salle des mariages,—non!... Il y avait
mieux à trouver : quelque chose de plus subtil et comme de plus
voilé; quelque chose de plus gentil.

Un autre inconvénient de ce Paradis perdu, c’est la facture, qui
d’abord est commune et ennuyeuse et qui ne convient pas du tout
 
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