Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (3. Pér. 39.1908)

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GAZETTE DES BEAUX-ARTS

Jules II, d’Isabelle d’Este et d’Isabelle d’Aragon : seul M. de la Tour ‘,
au cours d’une notice sur l’ouvrage de Fabriczy, a refusé d’accepter
cette attribution nouvelle; M. Forrer l’a adoptée comme acquise dans
son Biographical Dictionary of Medallists2, si bien qu’il est néces-
saire de l’examiner de près, avant d’y adhérer ou de la rejeter.

C’est en 1885 que M. Bertolotti trouva dans les archives de Man-
toue un document qui nommait comme auteur certain des trois
charmantes médailles de Jules II, d’Isabelle d’Aragon et d’Isabelle
d’Este, ce Gian Cristoforo Romano, fils et petit-fils de sculpteurs

pisans, élève de Paolo Romano et
sculpteur des Gonzague, des papes
et du cardinal d’Aragon3. Il est cer-
tain que l’agréable médaille de la
célèbre Isabelle d’Este, marquise de
Mantoue et amie de Léonard, n’est
pas sans analogie avec celle de sa
belle-sœur, la duchesse de Ferrare :
la coiffure est, dans les deux mé-
dailles, composée de larges bandeaux
ondulés, répandus jusque sur les
épaules dans le portrait de Lucrèce,
négligemment relevés au-dessus de
la nuque dans celui d’Isabelle; les
deux bustes sont coupés de la même
façon; enfin, dans les deux pièces, ils n’occupent pas exactement le
milieu du champ : de ces analogies, MM. Rode et de Fabriczy ont
conclu que les deux portraits étaient de la même main, et ont iden-
tifié le Médailleur à l’Amour captif avec Gian Cristoforo Romano.

Mais cette conclusion n’est-elle pas hâtive? Les analogies exté-
rieures entre les portraits d’Isabelle d’Fste et de Lucrèce Borgia ne
résultent-elles pas simplement de ce que ces portraits des deux belles-
sœurs ont été faits vers le même temps, sous l’influence des mêmes
modes et dans la même atmosphère artistique 4? Car il y a autant
de dissemblances de style entre ces deux portraits, que d’analogies

PAR LE MAITRE
l’amour CAPTIF

1. H. de la Tour (Revue numismatique, 1903, p. 196).

2. Article Filippino Lippi.

3. Bertolotti, Artisti in relazione coi Gonzaga, p. 90 ; — P. Valton, Gian Cristoforo
Romano, médailleur (Revue numismatique, 1885, p. 316-324); — G. Gruyer, L’Art
ferrarais, t. I, p. 651-654.

4. G. Cristoforo Romano a travaillé pour les princes de Mantoue, et nous
verrons que le Médailleur à l’Amour captif ne peut être qu’un artiste mantouan.