DOI Heft:
Nr. 5
DOI Artikel:Roche, Denis: Un "Saint-Sépulcre" démembré
DOI Seite / Zitierlink: https://doi.org/10.11588/diglit.24866#0449
418
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
Le bas-relief du Louvre semble d’une date postérieure aux sta-
tues de Yerteuil. La facture plus étroite, plus académique, paraît
d’une autre main, à moins qu’on ne veuille supposer qu’à l’exécu-
tion en marbre, la facture souple du modeleur se soit rétrécie.
Par les sculptures du château de La Rochefoucauld que nous
avons pu examiner avec soin (elles se réduisent malheureusement
à un buste en haut-relief, des médaillons et des culs-de-lampe),
par ces sculptures, par nos statues actuelles de Yerteuil, et par le
reste de tombeau du Louvre il apparaît qu’il y a eu chez les La
Rochefoucauld, entre 1525 et 1565 approximativement, des sculp-
teurs suivant une même iconographie et ayant plusieurs traits
d’une tradition commune. Leurs œuvres suivent exactement révo-
lution de l’histoire de l'art pendant cette période.
Si Ton n’admet pas que le sépulcre de Yerteuil ait été fait par
les soins d’Anne de Polignac aux approches de sa mort, le person-
nage auquel il paraît le plus vraisemblable de faire honneur de
cette commande est son fils, François III de La Rochefoucauld.
A la mort de sa mère, François avait environ trente ans, et
était lieutenant de la compagnie des guides du duc de Lorraine. En
1556, il perdit sa femme Silvie de la Mirandole, ancienne demoi-
selle d’honneur de Catherine de Médicis. On a au Louvre le portrait
de Silvic1. Le visage poupin et blanc, au nez droit, aux beaux
sourcils arqués, au front rond, nous semble correspondre, avec une
exactitude assez remarquable pour qu'on la note, avec la Marie « de
devers la tête » du Sépulcre, dont l’ajustement est si élégamment
travaillé. Ils correspondent aussi à une jolie tête souriante, peut-
être un peu plus idéalisée, mais encore de même structure — et la
seule qui soit telle parmi toutes les autres — placée au château de
La Rochefoucauld au retour d’angle de la galerie du premier étage.
La mort de Sil vie de la Mirandole causa à son mari « un si
extrême deuil », rapporte Mergey, qu’il « s’alla enfermer en l’abbaye
de Saint-Victor pour évaporer ses soupirs et regrets». II y parvint au
reste assez vite, et, dès le 31 mai suivant, il signait son contrat
avec la belle-sœur de Condé, Charlotte de Roye. Trois semaines
après ce second mariage, François de La Rochefoucauld fut contraint
de partir pour la guerre, au cours de laquelle il fut pris devant Saint-
Quentin. Il resta dix-huit mois prisonnier en Flandre, après lesquels,
mis à rançon au prix de 30 000 écus, Messieurs de Guise, le Conné-
1. Exposition des Primitifs français, n° 1021.
GAZETTE DES BEAUX-ARTS
Le bas-relief du Louvre semble d’une date postérieure aux sta-
tues de Yerteuil. La facture plus étroite, plus académique, paraît
d’une autre main, à moins qu’on ne veuille supposer qu’à l’exécu-
tion en marbre, la facture souple du modeleur se soit rétrécie.
Par les sculptures du château de La Rochefoucauld que nous
avons pu examiner avec soin (elles se réduisent malheureusement
à un buste en haut-relief, des médaillons et des culs-de-lampe),
par ces sculptures, par nos statues actuelles de Yerteuil, et par le
reste de tombeau du Louvre il apparaît qu’il y a eu chez les La
Rochefoucauld, entre 1525 et 1565 approximativement, des sculp-
teurs suivant une même iconographie et ayant plusieurs traits
d’une tradition commune. Leurs œuvres suivent exactement révo-
lution de l’histoire de l'art pendant cette période.
Si Ton n’admet pas que le sépulcre de Yerteuil ait été fait par
les soins d’Anne de Polignac aux approches de sa mort, le person-
nage auquel il paraît le plus vraisemblable de faire honneur de
cette commande est son fils, François III de La Rochefoucauld.
A la mort de sa mère, François avait environ trente ans, et
était lieutenant de la compagnie des guides du duc de Lorraine. En
1556, il perdit sa femme Silvie de la Mirandole, ancienne demoi-
selle d’honneur de Catherine de Médicis. On a au Louvre le portrait
de Silvic1. Le visage poupin et blanc, au nez droit, aux beaux
sourcils arqués, au front rond, nous semble correspondre, avec une
exactitude assez remarquable pour qu'on la note, avec la Marie « de
devers la tête » du Sépulcre, dont l’ajustement est si élégamment
travaillé. Ils correspondent aussi à une jolie tête souriante, peut-
être un peu plus idéalisée, mais encore de même structure — et la
seule qui soit telle parmi toutes les autres — placée au château de
La Rochefoucauld au retour d’angle de la galerie du premier étage.
La mort de Sil vie de la Mirandole causa à son mari « un si
extrême deuil », rapporte Mergey, qu’il « s’alla enfermer en l’abbaye
de Saint-Victor pour évaporer ses soupirs et regrets». II y parvint au
reste assez vite, et, dès le 31 mai suivant, il signait son contrat
avec la belle-sœur de Condé, Charlotte de Roye. Trois semaines
après ce second mariage, François de La Rochefoucauld fut contraint
de partir pour la guerre, au cours de laquelle il fut pris devant Saint-
Quentin. Il resta dix-huit mois prisonnier en Flandre, après lesquels,
mis à rançon au prix de 30 000 écus, Messieurs de Guise, le Conné-
1. Exposition des Primitifs français, n° 1021.