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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 40.1908

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Nr. 2
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Laloy, Louis: Chronique musicale
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https://doi.org/10.11588/diglit.24867#0185

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CHRONIQUE MUSICALE

Académie Nationale de musique: BORIS GODOUNOV, drame musical populaire
en 4 actes et un prologue, d’après Pouchkine et Karamsine, musique de Modeste
Moussorgski ; — Théâtre national de l’Opéra-Comique : BN1ÉGOUROTCHKA, conte
dramatique en 4 actes et un prologue, d’après Ostrovski, musique de Rimski-
Korsakov.

e sont deux œuvres bien russes, encore que profondément diffé-
rentes. L’une, qui ne cherche qu’à nous plaire, nous montre une
Russie de légende et de fantaisie; l’autre est l’image douloureuse
et grave de la Russie, telle qu’elle futà une de ces heures troubles
qui ne lui ont jamais été épargnées. Il y a une candide poésie
dans ce conte de la princesse Flocon-de-Neige, fille du roi River et de la reine
Printemps, qui rend infidèle le beau Mizguir, mais le fuit, et que l’amour con-
sume à l’instant qu’il s’empare d’elle : ainsi le soleil fait fondre la neige. Il
faut louer Rimski-Ivorsakov (dont la récente mort met en deuil la musique russe)
de n’avoir pas brandi, à cette occasion, de faciles symboles, et de s’êlre laissé
simplement aller au fil du récit, sans craindre même les digressions, pourvu
qu’elles fussent aimables. Ne regretterions-nous pas, en effet, qu’un ordre plus
sévère eût sacrifié ce bon roi qui enlumine son palais au son des cithares, ou le
beau berger Lel et ses insouciantes chansons? Nous sommes ici pour l’amuse-
ment, non pour l’édification; c’est une musique de loisir, bien éloignée de
l’application allemande ou du raffinement français, propre à un pays où Ton
est généreux du temps comme de toute chose, où les nuits sont longues, et se
passent, dans la buée du samovar, à parler de tout et de rien, avec un enthou-
siasme léger.

Il ne faut donc pas chercher ici des formes nouvelles. A quoi bon? Allons-
nous prendre si fort au sérieux les plaintes de Koupava délaissée par Mizguir,
qu’il y faille les accents mêmes du sanglot? Un rien de convenlion ne messied
pas, au contraire, en empêchant l’émotion de gâter notre plaisir. Il y aura donc
des airs, avec des reprises et des vocalises, ainsi que des récitatifs qui ne se tar-
gueront pas d’une véhémence superflue. Mais les danses recevront les plus riches
parures : car la danse est toute joie. Aussi les deux tableaux dont nous aurons
gardé le meilleur souvenir sont celui du carnaval, à la fin du prologue, et surtout
celui de la forêt, où une vigoureuse musique excite les ébats sauvages des dan-
seurs russes, et la grâce précieuse de MUe Regina Badet.
 
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