Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art (3. Pér. 40.1908)

« LA GRAVURE ORIGINALE EN NOIR »

Ainsi s’intitule la réunion d’une quarantaine de graveurs ori-
ginaux qui pratiquent l’art de la gravure dans tous ses modes
d’expression, le burin comme l’eau-forte, le bois comme la
pointe sèche. La gravure n’est pour eux qu’une manière d’être des
artistes de personnalité vivante, des techniciens habiles à combiner
leur savoir et leur vision avec une sensibilité qui varie en intensité
de l’un à l’autre, mais qui produit néanmoins cette impression exquise
et toujours nouvelle, sans laquelle point ne saurait y avoir œuvre
d’art. En reprenant les lois observées par les maîtres d’autrefois, en
les accommodant à leur technique particulière, ces « hommes de
bonne foi » entendent renoncer à tant de truquages si aisés en
d’autres arts, à tant de procédés blâmables, dont certains usent en
faveur de l’exploitation d’une vogue mondaine.

La gravure originale monochrome ne pourrait souffrir, du reste,
l’emploi d’éléments étrangers. Par le simple jeu des oppositions
d’ombres et de lumières, il lui faut rendre tout le rayonnement de
la vie vibrante, chatoyante, émouvante; il lui faut représenter les
êtres et les choses, les spectacles d'humanité et les paysages aux
aspects infinis. Sans doute, on ne s’improvise pas graveur, et le
métier comporte une large part de préparation où la science et
l’adresse tiennent le premier rang; mais c’est la noblesse de cet art
de révéler, de prime-saut, dans l’œuvre exposée le bon tâcheron et
l’artiste qui trouve dans l’art des Rembrandt ou des Albrecht Durer,
des Delacroix ou des Meryon, une manière singulièrement puissante
d’exprimer avec probité et sincérité son émotion devant la vie.

A cet égard, l’Exposition inaugurale de la Société internationale
de la Gravure originale en noir (ou plutôt de la gravure originale