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Gazette des beaux-arts: la doyenne des revues d'art — 3. Pér. 40.1908

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Nr. 5
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Locquin, Jean: Le paysage en France au début du XVIIIe siècle et l'œuvre de J. - B. Oudry (1686-1755)
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https://doi.org/10.11588/diglit.24867#0386

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354

GAZETTE DES BEAUX-ARTS

« Flamands », terme générique sous lequel on comprend aussi les
Hollandais. Ce n’est pas tout : Francisque Millet, Jean Cossiau,
Nicolas Spheyman viennent du Nord, à la suite de van der Meulen,
et tentent par des essais plus ou moins heureux de créer une école
de paysage, qui, s’inspirant du réalisme flamand, répondrait aux
dispositions du public parisien. Mais leur génie ne dépasse pas celui
de vulgarisateurs médiocres.

Entre 1665 et 1690, c’est assurément chez van der Meulen qu’on
trouve au plus haut degré le sentiment du paysage réaliste. Il
apporte de son pays d’origine un tempérament robuste de paysa-
giste, le souci de l’observation précise et de l’interprétation directe
de la nature, le scrupule de la vraisemblance topographique et pit-
toresque. Ses forêts plantées de grands chênes et percées de clai-
rières, ses chemins creux, ses sites agrestes, ne sont pas sans gran-
deur. Sans doute, c’est surtout comme peintre de batailles qu’il se
fit connaître en France, mais à ce titre encore il contribuait à former
des tendances coloristes. Les compositions silencieuses et rythmées,
les fonds en amphithéâtre de Poussin, d’où Coypel entendait monter
comme « un air de cantique », n’étaient pas disposés pour la guerre.
L’espace, les plans, les lointains détaillés, précis, brumeux ou en-
soleillés, la perspective aérienne, préoccupent avant tout les peintres
de batailles. Obligés de donner la sensation d’une atmosphère
alourdie par la fumée, la poussière et la chaleur, ils recourent à
toutes les ressources de leur pinceau et de leur palette. Us seraient
coloristes par nécessité s’ils ne l’étaient point par goût.

A la mort de van der Meulen, en 1690, on peut donc dire que
le réalisme et le coloris ont déjà cause gagnée en France et que les
paysagistes perdent en lui leur plus grand chef depuis Poussin.

Même ceux qui ne peuvent se résoudre à renoncer aux souvenirs
des ruines et des architectures antiques, comme les Allegrain et
Pierre Patel, témoignent d’une curiosité inaccoutumée pour les
effets de couleur dans le ciel et sur les feuillages1.

Malheureusement, au fond, beaucoup d’artistes et d’amateurs de
cette période de préparation et de transition, qui se prolonge jusque
dans les premières années du xvin° siècle, ne sont réalistes et colo-
ristes que d’occasion. Ils le sont comme d'autres sont parlementaires
ou jansénistes, par esprit d’opposition ou par cet instinct inné de
la polémique qui est dans le cœur de tout Français. Ils aiment les

Voir notamment Le Mois d’aoùt, au Louvre (n° 683), attribué à P.-A. Patel.
 
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